C'est - peut-être - le début de la nouvelle vie de ce qui était jusqu'à la fin de l'année 2021 la fonderie SAM, la « Société aveyronnaise de métallurgie ». Le conseil régional d'Occitanie s'apprête à devenir le propriétaire de ce site industriel de plusieurs milliers de mètres carrés à l'entrée de Decazeville. La transaction sera bouclée dans les premières semaines de l'année 2024, au travers de l'Agence régionale de l'aménagement et de la construction (Arac).
« Nous avons mis du temps à racheter l'outil industriel du fait de la complexité juridique du dossier et notamment la présence des actionnaires chinois pour mener à bien cette transaction, étant toujours propriétaires des lieux », souligne Carole Delga, la présidente socialiste de la région Occitanie, Carole Delga.
L'élue s'était rendue sur place en novembre 2021, quelques jours seulement après la décision de mise en liquidation immédiate de la fonderie SAM prononcée par le tribunal de commerce de Toulouse. Carole Delga avait alors promis « un avenir » à la SAM. Très en lien avec la présidente de région sur ce dossier, Bruno Le Maire, le ministre de l'Économie, avait lui aussi à l'époque était optimiste sur ce point : « ce n'est pas parce que la SAM ferme que le site industriel doit fermer ».
Au début de la décennie 2020, cette fonderie employait encore plus de 350 personnes, après un redressement judiciaire en 2019 et une reprise par le chinois Jinjiang. Seulement, au cours de l'année 2020, un administrateur judiciaire a repris la direction de l'entreprise et donc écarté les repreneurs en raison de plusieurs promesses d'investissements non tenues particulièrement. Pour autant, Jinjiang a gardé la propriété de l'usine.
De lourdes créances
Mais ce mouvement à la tête de ce sous-traitant automobile n'est qu'un petit épisode d'un dossier qui a fait couler beaucoup d'encre pendant plusieurs années. Après avoir connu une période faste et une collaboration avec une multitude de constructeurs, la fonderie SAM s'est enfermée dans un business modèle périlleux en travaillant uniquement avec Renault.
Cette situation de mono-client a d'ailleurs rendu difficiles toutes les tentatives de reprise par des acteurs privés. « Bercy (où le ministère de l'Économie est logé, ndlr) et Renault nous ont lâché, c'est pour cette unique raison que cela ne s'est pas fait », rappelle sur un ton amer Carole Delga. Une analyse partagée par Matthieu Hède, le PDG du groupe lotois MH Industries, intéressé pour reprendre l'usine et une certaine de salariés jusqu'à l'été 2022. Seule contrepartie ? Que Renault puisse garantir un matelas de commandes pendant deux à trois années le temps que MH Industries organise le pivot de la fonderie SAM. L'élue et l'entrepreneur n'ont pas été entendus par le constructeur automobile français menant ainsi à l'échec de ce projet.
« Une fonderie ne doit pas voir son activité s'arrêter. Il faut comprendre que relancer une fonderie à l'arrêt est très complexe et très onéreux. Ce sont des équipements qui ont constamment besoin d'être actifs et entretenues », explique notamment Matthieu Hède pour justifier le besoin de Renault dans l'équation, lui jouit d'une activité en pleine croissance.
Selon l'entrepreneur, l'absorption de la fonderie allait coûter environ une trentaine de millions d'euros. Une somme qui comprend notamment le dédommagement d'une certaine partie de l'ardoise laissée par l'actionnaire chinois. Selon les mandataires judiciaires chargés du dossier, ils devaient désintéresser les créanciers à qui il est dû « plus de 25 millions d'euros », en avril 2022. La région Occitanie n'a pas communiqué sur l'investissement qui a permis ce rachat de l'usine, mais plusieurs millions d'euros pourraient avoir été nécessaires.
Des repreneurs toujours intéressés ?
Bientôt détentrice officielle du site, la collectivité souhaite recréer de l'emploi, par dizaines, dans un bassin qui a connu de multiples déconvenues industrielles ces dernières années comme le plan social à l'usine Bosch de Rodez ou l'arrêt du projet Phénix à la SNAM de Decazeville qui consistait à produire des batteries pour des véhicules électriques à partir d'éléments d'occasions. Dans l'idéal, la région Occitanie aimerait héberger de la production sur différents secteurs d'activités, en proposant à la location le foncier disponible ainsi que les principaux outils du site aussi acquis par le conseil régional.
« Il y a toujours eu des prospects pour la fonderie SAM. Nous travaillons actuellement avec d'autres repreneurs mais rien n'est signé actuellement donc je ne peux pas en dire davantage », informe Carole Delga.
Au sein des services de la collectivité, une équipe dédiée suit comme du lait sur le feu ce dossier, complexe et très symbolique sur le plan politique. Les fonctionnaires associés à ce travail militent en coulisse pour faire de l'ancienne fonderie SAM un « site industriel clés en main France 2030 ».
Afin d'accélérer le dossier, tout comme celui de l'usine Bosch de Rodez dont la socialiste se dit « très déçue » des derniers rebondissements, l'élue a sollicité Roland Lescure pour une visite de terrain dans l'Aveyron. Seulement, celui qui était ministre de l'Industrie sous Élisabeth Borne est toujours en salle d'attente et ne sait pas encore s'il fera partie du gouvernement Attal.
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