Aéronautique : un grand projet toulousain pour accélérer l'électrification des avions

A Toulouse, l'IRT Saint-Exupéry vient de lancer un projet à 60 millions d'euros pour développer tout un panel de technologies clés pour accélérer l'électrification de l'aviation. L'institut de recherche technologique, qui vient de fêter ses dix ans, va aussi aider la filière à réduire sa dépendance au titane russe et engager davantage de travaux de recherche pour soutenir la filière spatiale.
A Toulouse, l'IRT Saint-Exupéry vient de lancer un projet à 60 millions d'euros pour développer tout un panel de technologies clés pour accélérer l'électrification de l'aviation.
A Toulouse, l'IRT Saint-Exupéry vient de lancer un projet à 60 millions d'euros pour développer tout un panel de technologies clés pour accélérer l'électrification de l'aviation. (Crédits : Aura Aero)

La course contre la montre est engagée. Le constructeur aéronautique toulousain Aura Aero vise 2026 pour réaliser le premier vol de son avion de transport régional hybride de 19 places avant une mise en service deux ans plus tard. Quant à Airbus, Daher et Safran, ils ont annoncé lors du dernier salon du Bourget vouloir faire voler d'ici la fin de  l'année Ecopulse, un démonstrateur d'avion hybride électrique pensé autour du TBM, la gamme d'avion phare de Daher.

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 Accompagner l'essor de l'électronique de puissance

A Toulouse, l'IRT Saint-Exupéry, qui vient de fêter ses dix ans, compte prendre sa part dans cette révolution. L'institut de recherche technologique vient de lancer le programme Filae (FILière Aéronautique Electrique), un projet doté d'un budget de 60 millions d'euros sur sept ans (cofinancé par le secrétariat général pour l'Investissement dans le cadre de France 2030) pour développer tout un panel de technologies clés pour accélérer l'électrification de l'aviation.

« Nous voulons nous positionner comme un acteur proactif de la décarbonation avec un certain nombre de projets autour notamment de l'essor de l'électronique de puissance, nécessaire pour monter en tension et permettre l'électrification de l'aviation légère. Nous allons aussi étudier les impacts sur les câbles des avions de ces fortes tensions et des échauffements plus importants. Il faudra donc changer l'isolation des câbles. Et puis, nous allons devoir gérer les dégagements thermiques finalement générés par l'électronique de puissance », illustre Denis Descheemaeker, directeur général de l'IRT Saint-Exupéry.

Le programme espère contribuer à structurer une filière française et européenne en électronique de puissance (SIC/GAN) compatibles avec l'environnement aéronautique, à développer les activités de R&T pour supporter la gamme des aéronefs CS23, avec des partenaires comme Daher, Ascendance ou encore Aura Aero, développer des briques de technologies clefs pour une chaîne électrique propulsive via un consortium large d'académiques et d'industriels comme Airbus et Safran et enfin favoriser la mise en place de formations initiales et continues. Les 12 projets du programme Filae vont mobiliser jusqu'en 2030, près de 25-30 chercheurs, 30-50 post-doctorants, 30 doctorants et 50 stagiaires/apprentis.

Consommer moins de titane

Outre ce grand programme, l'IRT Saint-Exupéry veut aussi aider dans les prochaines années la filière aéronautique à réduire sa dépendance au titane russe. « La situation géopolitique actuelle (tensions sur l'approvisionnement des matières premières, guerre Russie-Ukraine) ainsi que les enjeux climatiques imposent à l'industrie aéronautique de rechercher des solutions permettant de réduire son empreinte carbone et de supporter le développement de filières de recyclage de métaux critiques en Europe occidentale, dont le titane fait partie », fait remarquer l'IRT.

Le projet de recherche intitulé DEFITitane vise à proposer de nouvelles sources d'approvisionnement d'alliages de titane et développer des gammes de fabrication moins émettrices de gaz à effet de serre, plus sobres vis-à-vis de la consommation d'énergie et réduisant la quantité de matière première mise en œuvre. Un projet qui s'inscrit dans la suite logique du programme MAMA qui a permis d'atteindre des gains significatifs. « Nous avons réduit de 30 à 40% la quantité de matière nécessaire et notamment de titane pour produire une pièce », note Denis Descheemaeker.

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Rendre l'intelligence artificielle fiable

Par ailleurs, l'IRT Saint-Exupéry va bientôt lancer la suite du programme Deel (pour Dependable and Explainable Learning). Initié en 2018, le programme transatlantique mené entre Toulouse et le Québec visait à certifier les algorithmes utilisés par les outils d'intelligence artificielle. « Dans l'aéronautique, l'intelligence artificielle peut s'implémenter dans de la navigation basée vision, c'est-à-dire avec des caméras qui donnent la vision et servent à reconnaître finalement une piste d'atterrissage. Mais bien sûr, le système doit être sûr à 100 %. Surtout, il faut être en mesure d'expliquer pourquoi une IA prend telle ou telle décision. C'est la condition nécessaire pour intégrer de l'intelligence artificielle dans des systèmes critiques comme les avions », avance le directeur général de l'IRT.

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 Une intelligence artificielle explicable, c'est d'ailleurs l'une des grandes différences par rapport aux outils développés par les Gafam à qui l'on reproche le côté boîte noire de leurs solutions. Ces travaux de recherche pourraient servir au-delà de la filière aéronautique et notamment dans le secteur de la santé. L'IRT Saint-Exupéry travaille déjà avec le CHU de Toulouse et l'Oncopole sur différentes applications de l'intelligence artificielle comme pour la mise au point de vaccins personnalisés, de l'aide au diagnostic sur les myopathies rares, ou d'outils de recommandation pour optimiser le parcours patient dans le cadre du traitement de certains cancers.

Plus de spatial dans la prochaine décennie

Créé il y a dix ans pour répondre aux besoins de la filière aéronautique, l'institut veut aujourd'hui davantage adresser les problématiques du secteur spatial, en pleine ébullition avec l'explosion du NewSpace. « Le secteur spatial vit une révolution telle qu'il offre beaucoup d'opportunités et en même temps il est nécessaire d'entreprendre de nombreux travaux de recherche pour que le secteur spatial français conserve son rang. Le spatial occupera peut-être encore plus de place au sein de l'IRT dans la nouvelle décennie », conclut Magali Vaissière, présidente de l'IRT Saint-Exupéry.

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