Spatial : Loft Orbital en plein rush à Toulouse avant de lancer ses premières constellations

REPORTAGE. Cinq ans après son arrivée à Toulouse, Loft Orbital est en train de finaliser le premier satellite de sa première constellation qui sera envoyée en orbite à partir du mois d'octobre. En hypercroissance, la société franco-californienne du NewSpace a recruté une centaine de salariés dans la Ville rose et doit livrer une vingtaine de satellites d'ici fin 2025.
Loft Orbital a reçu jeudi à Toulouse la visite de la secrétaire d'Etat au Numérique Marina Ferrari.
Loft Orbital a reçu jeudi à Toulouse la visite de la secrétaire d'Etat au Numérique Marina Ferrari. (Crédits : Florine Galéron)

Le rythme s'accélère à Toulouse pour Loft Orbital. L'une des figures de proue du NewSpace dans la Ville rose entre dans les phases finales de développement de ses deux premières constellations de satellites.

Fondée en 2017 à San Francisco par Antoine de Chassy, Pierre-Damien Vaujour et Alex Greenberg, Loft Orbital a implanté deux ans plus tard une équipe française à Toulouse. À la différence des acteurs traditionnels de la filière spatiale, Loft Orbital n'est pas un fabricant de satellites qui programme le lancement d'une charge utile pour un client. La jeune pousse achète des plateformes satellitaires et se charge ensuite des technologies logicielles qui permettent l'interface entre les charges utiles des clients (caméras, capteurs) et la plateforme. Une fois le satellite lancé, les clients de Loft Orbital peuvent prendre le contrôle de leur charge utile et accéder à leurs données.

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Une vingtaine de satellites à envoyer d'ici fin 2025

Depuis sa création, la startup a déjà lancé trois premiers satellites (deux en octobre 2021 et le troisième en janvier 2023) de services partagés entre une demi-douzaine de clients par satellite qui se répartissent les coûts de la mission. Depuis le début de l'année, les cadences s'accélèrent pour la startup, avec un satellite envoyé au mois de mars, un autre prévu en juillet. Surtout, entre le mois d'octobre et début 2025, Loft Orbital doit envoyer en orbite les dix satellites de la constellation d'observation de la Terre commandée par le Canadien EarthDaily. Et l'année prochaine, la société devra aussi livrer les dix satellites d'une constellation à destination du département de la Défense américaine.

« Nous allons passer d'une société qui envoie en orbite un satellite par an à une société qui va lancer dix satellites par an », résume Emmanuelle Méric, directrice Europe de Loft Orbital devant la secrétaire d'Etat au Numérique Marina Ferrari, en déplacement ce jeudi en Haute-Garonne.

Pour réussir ce passage à l'échelle crucial, la startup s'est alliée avec Airbus. Alors que sur ses premiers modèles, Loft Orbital avait acheté les plateformes satellites auprès de Leostella (coentreprise de Thales Alenia Space et Spaceflight Industries), pour industrialiser son modèle économique, la jeune société a commandé auprès d'Airbus 32 plateformes d'orbite basse (dérivées de celles qui équipent la constellation télécoms OneWeb).

« Cela nous permet de bénéficier d'une chaîne de montage très rapide et fiable puisque la constellation OneWeb compte déjà plus de 600 satellites en orbite », commente Frédéric Cristini, directeur commercial de la startup.

Le géant européen du spatial est actuellement en train de réaliser à Toulouse les étapes finales sur le premier satellite de la première constellation de Loft Orbital. La startup se charge, de son côté, d'intégrer les charges utiles. Dans les locaux qu'elle a investis l'an passé dans l'hypercentre de Toulouse, Loft Orbital dispose aussi d'un laboratoire pour mener des tests de radiofréquences, et d'un centre de contrôle pour opérer les satellites une fois qu'ils sont envoyés dans l'espace.

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Centre de contrôle et laboratoire radiofréquences de Loft Orbital à Toulouse. (Crédits : Rémi Benoit)

Nouvelle levée de fonds en réflexion

 À terme, Loft Orbital aimerait décrocher un client d'ancrage français ou européen pour accélérer son développement en France avec l'ouverture d'un centre pour intégrer les charges utiles aux satellites et les tester sur place. La société a déjà commencé à construire sa chaîne d'approvisionnement en misant sur le "made in France" avec les partenariats avec Airbus pour les plateformes, mais aussi avec Syrlinks pour les radiocommunications et Anywaves pour les antennes.

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En un an, Loft Orbital a doublé ses effectifs sur son entité toulousaine qui dépasse la centaine de collaborateurs (sur un effectif mondial de 230 personnes) de vingt nationalités différentes. Face à cette hypercroissance (la startup fait partie du Next40), la pépite du NewSpace pourrait bientôt se retrouver à l'étroit dans ses 1.000 m2 répartis sur quatre niveaux. Après avoir levé 140 millions de dollars fin 2021, un nouveau tour de table à trois chiffres est en réflexion.

Charges utiles virtuelles

Car la startup est déjà en train de plancher sur des constellations supplémentaires encore plus disruptives.

« De par notre modèle historique, nous sommes capables d'embarquer plusieurs charges utiles hétérogènes (de taille et répondant à des fonctionnalités différentes, ndlr) provenant de plusieurs clients à bord d'un satellite. Nous avons montré, avec le dernier satellite envoyé en mars dernier (YAM6), que nous pouvons aller plus loin. Les clients n'ont plus besoin de fournir de capteurs (caméras) et peuvent se contenter de charges utiles virtuelles, notamment des briques logicielles qui tournent à bord du satellite », relève Emmanuelle Méric.

Il est même possible de déclencher des missions en quelques jours à distance sur des satellites déjà en orbite. Pour Loft Orbital, le satellite nouvelle génération YAM6 est le précurseur de nouveaux cas d'usage pour le spatial pour lequel un partenariat a été noué avec Microsoft, géant du cloud et de l'intelligence artificielle.

« Il existe trois cas d'usage principaux. Le premier, c'est de pouvoir envoyer des alertes au sol dans des situations d'urgence comme en cas de feux de forêt. Nos satellites vont se connecter avec des satellites en orbite géostationnaires pour arriver à communiquer en temps réel avec le sol. Le deuxième cas d'usage, c'est ce qu'on appelle la prise de décision autonome, autrement dit le satellite n'a pas besoin de recevoir de tâches pour générer et collecter de la donnée supplémentaire. Le troisième aspect, c'est que grâce à l'intelligence artificielle, le satellite va déjà réaliser un premier filtrage des données pour ne faire redescendre au sol que des informations pertinentes (par exemple supprimer les images satellites encombrées par des nuages, ndlr) », décrit Elisa Carcaillon, directrice du développement commercial chez Loft Orbital.

Sur ce modèle de constellations d'un nouveau genre, Loft Orbital estime n'avoir pas de concurrence frontale : « A la différence d'autres acteurs du NewSpace comme Unseenlabs ou Kinéis (en passe de déployer respectivement une constellation dans la détection radiofréquence et une autre dans l'Internet des objets, ndlr), Loft Orbital n'a pas vocation à développer l'ensemble de la chaîne de valeur pour des constellations spécialisées. Notre société va fournir une infrastructure spatiale mise à la disposition des clients pour déployer une charge utile physique ou virtuelle, via des algorithmes d'intelligence artificielle à bord de satellites déjà en orbite, pour des missions très variées », conclut Emmanuelle Méric.

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