En visite à ATR, Carole Delga dévoile un plan "avion vert" de 100 millions d'euros

La présidente du conseil régional d'Occitanie a dévoilé un "Plan Avion Vert" de 100 millions d'euros, sur trois ans via plusieurs dispositifs, à l'occasion d'une visite à ATR. L'avionneur régional, qui va équiper ses aéronefs d'un moteur moins énergivore (le 127-XT) dès 2022, lance également des travaux de recherche pour une gamme d'avions hybrides, l'ATR EVO. Les détails.
Le conseil régional d'Occitanie a dévoilé un Plan Avion Vert de 100 millions d'euros, mardi 31 mai.
Le conseil régional d'Occitanie a dévoilé un "Plan Avion Vert" de 100 millions d'euros, mardi 31 mai. (Crédits : Rémi Benoit)

C'est un nouveau coup de pouce en faveur de "l'avion vert" de la part du conseil régional d'Occitanie. Sa présidente, Carole Delga, vient d'annoncer le déblocage prochain d'une enveloppe de 100 millions d'euros pour l'avion bas carbone. "Il est essentiel de montrer que l'avion vert se pense en partie en Occitanie. Nous avons besoin d'un transport aérien qui a un impact environnemental moindre", complète l'élue qui a été un temps pressentie pour occuper Matignon.

Concrètement, cette nouvelle enveloppe va tout d'abord permettre de renouveler l'appel à manifestation d'intérêt (AMI) mené en collaboration avec le pole de compétitivité Aerospace Valley à destination des innovations portant sur l'aviation décarboné et légère. Après une première édition en 2021, qui a accompagné une vingtaine de projets avec 10 millions d'euros, ce sont à nouveau 10 millions d'euros qui seront consacrés à ce dispositif par la collectivité. "La première édition, qui était un test, a connu un véritable engouement et nous avons encore des projets à financer. Nous allons désormais pérenniser le dispositif dans le temps", fait savoir Carole Delga. Ce premier AMI sera très prochainement rejoint par un autre AMI, lui aussi de 10 millions d'euros, cette fois-ci à destination des carburants durables, surnommés SAFE dans le secteur aéronautique.

Delga Bortoli

Aux côtés du président exécutif d'ATR Stefano Bortoli (à gauche), Carole Delga a annoncé le déblocage de 100 millions d'euros pour l'aviation bas carbone (Crédits : Rémi Benoit).

Avec ces fonds publics, la collectivité espère davantage mobiliser la filière autour de la question des carburants nouvelle génération (à base d'huile de cuisson usagée par exemple), pour lesquels les approvisionnements sont encore complexes. C'est surtout un moyen pour le conseil régional d'Occitanie de donner du grain à moudre à son futur technocampus, de plusieurs milliers de mètres carrés qui doit sortir de terre fin 2024 au sein de l'aéroport Francazal. Pour mémoire, ce projet - qui doit réunir dans un même lieu industriels, chercheurs et tissu académique - devait se consacrer uniquement à des projets de recherche autour des questions de l'hydrogène. Désormais, ce futur lieu totem sera aussi dédié aux carburants durables comme l'a fait savoir Carole Delga lors de la présentation de ce nouveau "Plan avion vert". "Selon des ingénieurs, il y a des synergies entre le SAFE et l'hydrogène", justifie-t-elle.

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Le technocampus de Francazal réorienté vers le SAFE

Le plan annoncé en fin de journée, mardi 31 mai, prévoit un budget de 35 millions d'euros pour ce technocampus. Celui-ci mettra à disposition de la filière, sous forme de location, des équipements, des locaux et des compétences humaines, afin de permettre la réalisation de tests à grande échelle et développer des programmes de recherche de manière collaborative. Mais ce lieu sera aussi bien dédié aux applications aéronautique, que ferroviaire ou encore terrestre à l'image du constructeur de bus à hydrogène albigeois Safra qui suit de près l'évolution de ce dossier. Dans l'entourage de la présidente socialiste du conseil régional, on concède néanmoins que ce technocampus aura un modèle très proche d'un IRT, comme il en existe déjà un sur la place toulousaine (l'IRT Saint-Exupéry).

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Mais en réalité, ce fléchage de 35 millions d'euros avait déjà été annoncé précédemment par la collectivité, ce qui fait tomber à 65 millions d'euros l'enveloppe totale de nouveaux budgets de ce "Plan "avion vert". Celui-ci comprend, en plus des deux AMI, une dizaine de millions d'euros pour la formation et le développement des nouvelles compétences de la filière aéronautique. Par ailleurs, 20 millions d'euros seront fléchés vers des projets innovants et d'envergure européenne dès qu'ils visent à décarboner l'aviation. Enfin, 15 millions d'euros seront consacrés à "des contrats innovation sur l'avion vert", dont les contours restent encore à préciser.

ATR

Les budgets débloqués par le conseil régional d'Occitanie auront aussi une vocation de formation et l'émergence de compétences nouvelles dans la filière (Crédits : Rémi Benoit).

Ce "Plan avion vert" de 100 millions d'euros n'est pas le premier geste de la socialiste en faveur du secteur qui est le second plus gros employeur dans la région derrière l'agroalimentaire. Au plus fort de la crise, la collectivité avait débloqué un plan exceptionnel de 100 millions d'euros, dont 20 pour le spatial, afin d'aider la sous-traitance à surmonter cette période. "Tous les crédits ont déjà été consommés", assure Carole Delga. De plus, la collectivité, en partenariat avec l'État, doit débuter en fin d'année les discussions afin de façonner la cinquième version du Plan Ader, destiné là aussi à accompagner la sous-traitance aéronautique dans ses grands enjeux comme la consolidation, l'innovation, l'exportation, etc.

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ATR vise les 50 avions livrés en 2024

Pour dévoiler ce plan dont les fonds seront affectés sur trois ans, les équipes de la présidente du conseil régional ont choisi l'avionneur franco-italien basé à Blagnac (Haute-Garonne), ATR. Et le contexte s'y prête bien puisque les deux actionnaires d'ATR, Airbus et Leonardo, ont donné leur feu vert mi-mai pour étudier le lancement d'une nouvelle famille de turbopropulseurs appelée ATR EVO, doté d'un moteur hybride. "Cette nouvelle éco-conception comprendra de nouvelles hélices, ainsi qu'une cabine et des systèmes améliorés. L'appareil restera un biturbopropulseur compatible à 100 % avec du carburant d'aviation durable (SAF)", précise l'entreprise qui emploie 1.200 personnes dans le monde, dont 600 rien qu'à Blagnac et environ 300 sur sa ligne d'assemblage à Saint-Martin-du-Touch non loin de là. "Une fois commercialisé, le nouvel ATR 'EVO' ouvrira la voie à un futur décarboné pour le transport aérien. Ses atouts-clés sont une amélioration de 20 % du rendement énergétique global et sa compatibilité 100 % SAF. Autrement dit, propulsé au kérosène, l'appareil émettra plus de 50 % de CO2 de moins qu'un jet régional. Avec 100 % de SAF, ses émissions seront proches de zéro", assure Stefano Bortoli, le président exécutif d'ATR.

En attendant la concrétisation de ce nouveau programme, l'avionneur régional va équiper dès 2022 ses avions avec un nouveau moteur, le 127-XT, développé par son fournisseur canadien historique, Pratt & Whitney, en remplacement du 127-M. "Avec ce nouveau moteur, nous allons réduire de 20% ses coûts de maintenance sur sa durée de vie et nous gagnons 3% de consommation de carburant par rapport au moteur actuel, ce qui fait que nos avions régionaux consommerons 45% de moins qu'un jet", explique Stefano Bortoli. C'est la compagnie Air Corsica qui bénéficiera en premier de ce tout nouveau moteur, après sa commande de cinq appareils dotés du 127-XT officialisée lors du dernier salon de Dubaï en novembre 2021.

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Le nouveau moteur, le 127-XT, qui va équiper les ATR dès 2022 (Crédits : Rémi Benoit).

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Enfin, l'avionneur - qui se vante d'avoir aujourd'hui 1.600 avions en vol dans 100 pays à travers 200 opérateurs - a récemment opéré depuis son centre R&D à Francazal le vol inaugural de son ATR 42-600S STOL. Celui-ci, d'une capacité de 30 à 50 places, sera en capacité de réaliser des décollages et atterrissages sur des pistes courtes, de moins de 800 mètres.

"Il y a actuellement près de 500 aéroports dans le monde avec des pistes de 800 à 1 000 m que l'ATR 42-600S pourrait desservir", explique ATR, qui a déjà reçu "20 engagements de la part d'opérateurs et de loueurs" pour cet aéronef.

Après avoir livré 31 avions en 2021, le groupe franco-italien vise une remontée des cadences pour atteindre les 50 avions livrés en 2024. Une projection jugée raisonnable en interne au regard du contexte économique international. Avant la crise sanitaire, ATR livraient en moyenne, sur les cinq années précédentes, environ 70 aéronefs.

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