Consolidation aéronautique : Latécoère finalise ses grandes manoeuvres avec l'acquisition du Canadien Avcorp

Après plusieurs mois de tractations, le sous-traitant aéronautique toulousain Latécoère vient de finaliser le rachat du Canadien Avcorp. Cette cinquième opération de croissance externe en 18 mois (une autre est encore à venir) permet à l'industriel de faire une entrée significative sur le marché américain de la défense. Le sous-traitant de rang 1 se rapproche ainsi de son désir de taille critique d'un milliard d'euros de chiffre d'affaires en 2025. Dans les colonnes de La Tribune, le directeur général de Latécoère, Thierry Mootz, justifie cette opération.
Latécoère boucle une cinquième opération de croissance externe en 18 mois avec le rachat du Canadien Avcorp.
Latécoère boucle une cinquième opération de croissance externe en 18 mois avec le rachat du Canadien Avcorp. (Crédits : Frédéric Scheiber)

"Après le closing de l'opération que nous espérons à la fin du troisième trimestre (2022), nous aurons fait le gros de ce que nous voulons faire", confie à La Tribune Thierry Mootz, le directeur général de Latécoère. Le sous-traitant aéronautique de rang 1 a officialisé, jeudi 5 mai, l'acquisition du sous-traitant canadien Avcorp.

Ce quasi-aboutissement - l'opération doit encore passer quelques étapes juridiques - se présente comme la cinquième acquisition de la sorte pour la société toulousaine en moins de 18 mois. Après les sites mexicains de Bombardier EWIS en 2020, Latécoère a aussi acquis SDM au Mexique et TAC en Belgique en 2021, puis Malaga Aerospace, Défense & Electronics Systems (Mades), dont l'acquisition pour cette dernière doit être finalisée dans les prochaines semaines. Comme annoncé au début du mois d'avril, le spécialiste des aérostructures et des systèmes d'interconnexion prépare également une sixième acquisition sur la partie nord-américaine toujours, mais dont l'identité de la société restera confidentielle tant qu'un accord n'aura pas été trouvé entre les deux parties. "Ensuite, ce seront des acquisitions au fil de l'eau et en fonction des besoins, s'il y en a d'autres. Sur le marché de la consolidation aéronautique, il faut être opportuniste", tient à tempérer le dirigeant.

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En devenant un acteur actif de la consolidation aéronautique, désirée par les grands acteurs de la filière comme Safran et Airbus, Latécoère veut retrouver une taille critique, qui pourrait atteindre à moyen terme le cap du milliard d'euros de chiffre d'affaires d'un point de vue comptable. "En 2019, nous réalisions 713 millions d'euros de chiffre d'affaires. Avec la crise sanitaire, nous sommes tombés à 380 millions en 2020. Pour nous, c'est une façon de faire de la croissance comptable assez rapidement (...) Avec le nouvel ensemble, on devrait atteindre un chiffre d'affaires de 500 voire 550 millions d'euros en 2023 puis avoisiner le milliard en 2025", présente Thierry Mootz.

Plus présent dans le secteur de la défense

Dans ce nouvel ensemble, Avcorp représente un poids non négligeable avec ses forces actuelles. Forte de 450 salariés et trois grands sites de production, la société canadienne a réalisé un chiffre d'affaires de 99 millions de dollars canadiens en 2021, soit près de 94 millions d'euros. "Avcorp est un fournisseur d'aérostructures comprenant des sous-ensembles d'ailes, des pièces composites à grande échelle et des services après-vente, avec une exposition à des plateformes de première importance, notamment le F-35, le B737 Max, le B767 et le B787", décrit Latécoère dans un communiqué. Au-delà de l'aviation civile, le Toulousain Latécoère va donc s'ouvrir davantage au marché de la défense, véritable bouée de sauvetage de l'industrie aéronautique ces deux dernières années.

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"L'acquisition d'Avcorp nous permet d'accéder au marché américain de la défense, qui est un marché très dynamique. Jusqu'à présent, nous faisions 1% de notre chiffre d'affaires dans la défense et là nous allons passer à 12%. Avec l'acquisition de Mades, nous serons à 20%. Par ailleurs, cette opération avec Avcorp nous permet de compléter notre empreinte américaine. De 20% de notre chiffre d'affaires envoyé aux États-Unis, nous passons à 34% et au niveau des effectifs, nous évoluons de 24% à 31% de nos salariés présents en Amérique du Nord", précise Thierry Mootz.

Faut-il y voir un lien avec le fait que depuis fin 2019 et une OPA du fonds d'investissement Searchlight Capital Partners, Latécoère a désormais un actionnaire majoritaire américain ? Pas du tout pour son directeur général, qui met en avant la volonté d'être proche de ses clients que sont Airbus, Boeing, Bombardier ou encore le Brésilien Embraer. "Latécoère a un héritage totalement français, demeure une société française et à titre personnel, j'aime beaucoup l'idée de planter le drapeau français à l'étranger", lance le patron qui a lâché 41 millions de dollars canadiens (soit environ 39 millions d'euros) pour le rachat des actions d'Avcorp.

Latecoere

Le directeur général de Latécoère prépare une sixième opération de croissance externe (Crédits : Rémi Benoit).

"Un gros effort à faire sur la gestion de nos liquidités"

Cette opération de croissance externe entre dans le cadre du plan "Ambitions 2020-2025" du sous-traitant aéronautique de rang 1. Au-delà d'une croissance comptable rapide, ce plan doit permettre une meilleure compétitivité via notamment l'innovation. Latécoère vient ainsi d'investir cinq millions d'euros pour ouvrir à Toulouse un centre de développement spécialisé sur les matériaux composites, avec une équipe de vingt personnes, afin de répondre au mieux aux futurs besoins de ses clients en quête d'avions plus légers et donc moins énergivores.

Dernier axe de ce plan, le retour à une situation financière saine. Bien que la société soit parvenue faire une augmentation de capital de 220 millions d'euros en 2021 pour financer sa croissance externe, tous les voyants ne sont pas au vert pour Latécoère. "Nous avons un gros effort à faire sur la gestion de nos liquidités", reconnait Thierry Mootz.

Après avoir perdu près de 200 millions d'euros en 2020, l'industriel aéronautique qui emploie près de 4.800 personnes a perdu plus de 112 millions d'euros au cours de l'année 2021.

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