Industrie : Faut-il une rallonge au plan de relance aéronautique ?

Il y a près d'un an, l'État a débloqué 15 milliards d'euros pour soutenir spécifiquement la filière aéronautique, paralysée par la crise sanitaire. Pour un député toulousain, les enjeux et les besoins de ces acteurs ont changé. Une rallonge de ce plan s'imposerait. Explications.
Le plan de relance dédié à l'aéronautique est-il suffisant ? Pour un député toulousain, la réponse est non.

Gelé dans son élan. La crise sanitaire de la Covid-19 a en quelques semaines stoppé un écosystème florissant, en constante croissance, que rien se semblait pouvoir arrêter... jusqu'au début de l'année 2020. Le trafic aérien étant paralysé en raison des restrictions de déplacement qui touchent le monde entier, les besoins en aéronefs ont fondu en quelques jours. Fruit de cette situation, l'industrie aéronautique en recherche constante de montée des cadences de production n'a eu d'autre choix que de faire machine arrière.

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Devant cette situation, le gouvernement français a été dans l'obligation de soutenir ce fleuron industriel. "Il ne faut pas oublier que nous sommes le seul pays au monde à pouvoir construire un avion de A à Z, ce qui est loin d'être le cas pour d'autres industries", souligne un haut dirigeant toulousain de la filière aéronautique. Pour conserver cet avantage, le gouvernement a présenté courant juin 2020 un plan de relance spécifique à la filière aéronautique de 15 milliards d'euros. En réalité, sur cette somme, sept milliards sont des prêts déjà engagés pour sauver la compagnie Air France et 3,5 milliards d'euros représentent de la garantie export visant à soulager les compagnies aériennes.

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Cinq milliards d'euros supplémentaires

Sans grand calcul, il ne reste plus que 4,5 milliards d'euros à destination des acteurs industriels de la filière aéronautique, dont près d'un est sanctuarisé pour alimenter un fonds de consolidation de la supply chain aéronautique. Depuis, les États-Unis de Joe Biden ont acté un plan de relance de 1.900 milliards de dollars pour son économie (contre 100 pour la France). Dans ce paysage, des députés et élus français appellent à un nouveau plan de relance hexagonal ou à une rallonge du premier. Pour un député toulousain, indépendamment du plan national, l'enveloppe dédiée à l'industrie aéronautique doit être réévaluée.

"Nous avons constamment besoin de réajuster les choses, surtout en période de crise. Les besoins des entreprises et de leurs secteurs ne sont pas les mêmes entre aujourd'hui et un an en arrière. Il faut faire évoluer ce plan de relance et octroyer une rallonge à l'aéronautique", n'hésite pas à dire Pierre Cabaré, le député (LREM) de la 1ère circonscription de Haute-Garonne, située en plein coeur de l'écosystème évoqué.

Dans quelles proportions l'État doit-il aborder à nouveau ce secteur ? En milliards ? En dizaines de milliards ? "Il faut une rallonge au moins pour arriver aux 20 milliards d'euros au total. Mais attention, je ne parle pas de n'importe quelle rallonge", plaide celui qui compte bien se présenter aux prochaines élections législatives de 2022. Pierre Cabaré estime que ces cinq milliards d'euros supplémentaires doivent permettre notamment de couvrir totalement les frais de R&D des petits et moyens acteurs de cette industrie, partis en quête d'une meilleure automatisation de leurs procédés, mais aussi de l'avion décarboné.

"Il ne faut pas faire porter des frais de R&D à ces acteurs de l'aéronautique, d'autant plus que les petits sous-traitants, de rang 3 et 4, sont les oubliés de l'histoire ! Ils payent le prix du ruissellement social des acteurs plus importants en devant adapter leurs effectifs et certains leur demandent de se diversifier. Pour ces TPE et PME, la diversification est dans leur ADN, mais parfois cela ne suffit pas pour passer la crise. Néanmoins, il faut les soutenir et maintenir ces emplois où ils sont car il y aura forcément une reprise, et nos entreprises devront être au rendez-vous", milite le locataire de l'Assemblée nationale.

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Pour mémoire, les quelques milliards à disposition des acteurs industriels permettent notamment aujourd'hui de financer le chômage partiel de longue durée, un fonds de modernisation de l'industrie aéronautique à hauteur de 300 millions d'euros sur trois ans et notamment près de deux milliards gérés par le Corac pour financer des travaux en lien avec l'avion "vert". Par ailleurs, les acteurs de l'industrie aéronautique peuvent également s'emparer d'une nouvelle enveloppe de 175 millions d'euros dédiée à l'industrie du futur mais qui ne fait pas partie du plan de relance aéronautique.

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Une loi Climat à revoir

Cette amplification du plan de relance dédié à l'aéronautique doit aussi se faire, selon lui, au travers de l'aménagement de la loi Climat, qui a été adoptée en première lecture à l'Assemblée nationale et se destine maintenant à être examinée par le Sénat. Comme une cinquantaine d'homologues de tous bords, Pierre Cabaré est vent debout contre les articles 35 à 38 de ce texte qui concernent le trafic aérien, dont plus particulièrement le 36 qui interdit les lignes intérieures quand une alternative de moins de 2 heures 30 en train existe.

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"Ce texte a été imaginé au moment où le trafic aérien était en croissance constante. Mais la crise de la Covid-19 a régulé ce trafic et il reviendra à un niveau modéré. Nous sommes vraiment maladroits avec ce bashing à l'égard de l'aéronautique. J'aurais préféré qu'on reporte cette partie du texte de deux ou trois ans le temps que le trafic aérien reprenne. Néanmoins, je compte sur la seconde lecture à l'Assemblée nationale pour trouver un point d'équilibre avec le Sénat plutôt que ce couperet qui tombe. Sinon, je souhaite que les résultats de cet article soient évalués dans deux ans", expose le député de La République En Marche.

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