Événementiel : "Des petits vont être absorbés par de grosses entreprises"

Dans une interview accordée à La Tribune, le président de l'association professionnelle Events 31, Jean-François Renac, fait le bilan de l'impact de la crise sanitaire et économique sur la filière événementielle en Haute-Garonne. Structuration de la dette, phénomène de consolidation, problème de jauges et de main-d'oeuvre. Le représentant aborde tous les sujets et estime une sortie du tunnel dans 12 mois.
Fermetures d'établissements, capacités financières en berne, reprise phasée : le président de l'association professionnelle Events 31 fait le point sur la situation actuelle de la filière événementielle.
Fermetures d'établissements, capacités financières en berne, reprise "phasée" : le président de l'association professionnelle Events 31 fait le point sur la situation actuelle de la filière événementielle. (Crédits : Comevent)

La TribuneÀ l'aube d'une reprise normale de l'activité et après plus d'un an de crise, quel est l'état du secteur événementiel dans le département de Haute-Garonne?

Jean-François Renac : Nous avons une dizaine d'entreprises qui ont cessé leur activité, soit en cessation des paiements, soit en redressement judiciaire avec peu de chances de s'en sortir, soit carrément en liquidation. Ce sont essentiellement des prestataires techniques, audiovisuels et des agences. Ce qui est vraiment significatif c'est que les cessations d'activité datent de l'automne, depuis il n'y a pas eu d'arrêt d'activité. C'est lié aux mesures d'accompagnement de l'Etat qui ont permis de maintenir à flot le secteur.

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Avec le recul, êtes-vous satisfait de l'action du gouvernement à votre égard ?

Après une période de flottement, l'Etat a été là pour soutenir la filière de façon intelligente. Il y a eu une grosse mobilisation autour de nos métiers. Au niveau régional, la DGFiP (direction générale des finances publiques) a été présente. Nous avons été en contact avec eux quasiment tous les jours. Il y a eu des bugs parce qu'ils ont géré des dizaines de milliers de dossiers par jour, mais si on regarde depuis le mois d'octobre ou novembre, tout a été quasiment réglé. Donc je pense que nous arriverons à enjamber cette crise.

Quelles problématiques liées à la crise touchent encore le secteur malgré la reprise qui se profile ?

Il y a des problématiques du secteur que l'on rencontre encore et qui viennent grever la trésorerie des entreprises. D'abord, le niveau des loyers, notamment pour les entreprises de l'événementiel qui ont des dépôts qui coutent extrêmement cher. Le loyer est une charge fixe qui est très importante et parfois plus que le fonds de solidarité. C'est une affaire qui n'a été réglée que pour les entreprises qui font plus d'un million d'euros de chiffre d'affaires par mois. Le second problème, ce sont les fonds propres des entreprises. Les trésoreries ont été complètement asphyxiées pendant les six à huit premiers mois de la crise, avant que les aides ne viennent les renforcer. Donc là, nous repartons avec très peu de moyens d'investissement.

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C'est un secteur qui va reprendre dans des conditions où les entreprises seront très endettées. Cela signifie que si l'on veut repartir de façon structurée, il va falloir étaler les dettes. Il y a donc encore un travail à faire sur les PGE. Nous pensons que quatre ans d'amortissement ne suffisent pas. Nous militons pour deux ans de franchise et six ans d'amortissement. Il faudrait aussi renforcer les fonds propres par des interventions des banques publiques. J'ai peur que certaines entreprises soient en incapacité de réinvestir sur du recrutement ou du matériel. Nous avons donc un secteur appauvri durablement, et de fait, je pense que l'une des conséquences sera la concentration : des petits vont être absorbés par des grosses entreprises régionales ou nationales.

La filière est-elle davantage soulagée à l'idée de reprendre enfin l'activité ou s'inquiète t-elle d'autant plus des capacités de remboursement des prêts qui ont été contractés au cours de la crise ?

Il y a un vrai soulagement. Le fait de pouvoir recommencer à réfléchir à nos métiers est vraiment enthousiasmant. Pour autant, nous allons avoir un problème de capacités de production. Nous avons des équipes très motivées mais qui n'ont pas travaillé à fond depuis un an, donc il faut remettre en route les process, le management, les équipes. D'autant que l'on a quand même beaucoup de jeunes qui ont quitté le métier. D'un point de vue économique, il y a des entreprises qui se sont outillées financièrement pour pouvoir voir à deux ans, et d'autres qui vont voir arriver assez rapidement le mur de la dette. Certains, pour ne pas dire beaucoup, jouent leurs atouts sur les trois mois qui viennent. Il faut absolument que cela marche maintenant, sinon cela va être difficile pour nous.

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À quelle échéance espérez-vous une reprise normale de l'activité ?

S'il n'y a pas de rechute sanitaire, la sortie de crise est entre six mois et un an dans le secteur. Si tout le monde recommence à travailler dans des conditions normales, si les événements ne sont pas freinés par des déplacements nationaux ou internationaux qui sont bloqués, si la vaccination poursuit son chemin, je pense que dans un an nous y verrons beaucoup plus clair.

Après plusieurs mois d'événements numérisés, quelle place sera désormais accordée au digital ?

C'est une solution de court terme. Le digital a permis de pallier les difficultés à se réunir, mais cela ne couvre qu'une partie du marché et du potentiel de l'événementiel. Cela couvre la diffusion d'information, mas plus il faut être interactif et moins cela fonctionne. Je crois que l'on va quand même rapidement revenir vers des événements en présentiel, mais avec une part de digital à l'intérieur. Les événements hydrides vont devenir la règle.

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