Urbanisme à Toulouse : quelles conséquences après l'annulation du PLUi-H ?

Ayant pour mission d'instaurer le concept de "densité modérée" sur l'ensemble de la Métropole de Toulouse, le PLUi-H (qui remplace les 37 plans locaux d'urbanisme de chaque commune) a été annulé par le tribunal administratif mardi 30 mars. Pour quelles raisons cette décision a été prise et quels effets va-t-elle avoir sur la délivrance des permis de construire dans la quatrième ville de France ? Éléments de réponse.
L'annulation du PLUI-H à Toulouse met à mal le projet de densité modérée voulu par la Métropole.

3.600 pages de règlement parties en fumée ? C'est ce vers quoi se dirige la quatrième ville de France. Le tribunal administratif de Toulouse a annulé, mardi 30 mars, la délibération de Toulouse Métropole du 11 avril 2019 approuvant le plan local d'urbanisme intercommunal et de l'habitat. Pour mémoire, ce nouveau document d'urbanisme, dont son élaboration avait été entamée en 2015, vise à remplacer le plan local d'urbanisme (PLU) des 37 communes de la Métropole.

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Surtout, ce PLUi-H devait permettre la concrétisation d'un concept chère à Jean-Luc Moudenc, maire de Toulouse et président de l'intercommunalité, "la densité modérée". Une stratégie qui vise notamment à limiter la consommation du foncier et à reconstruire la ville sur elle-même, tout en bâtissant 7.000 logements neufs par an pour répondre à la croissance démographique, répartis équitablement entre la ville-centre et les différentes couronnes. Mais le tribunal administratif local en a jugé autrement.

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"Le tribunal a considéré que l'absence de prise en compte des données récentes avait conduit les auteurs du PLUIH à surestimer la consommation d'espace passée et à surévaluer les besoins fonciers résultant des prévisions économiques et démographiques. Il a relevé que l'objectif retenu pour la consommation future avait été présenté à tort comme traduisant une réduction du rythme de la consommation d'espace et comme un accroissement de l'effort demandé par le SCOT (Schéma de cohérence territoriale, ndlr). Il a enfin jugé que les projections de consommation d'espace n'étaient pas définies de manière à permettre de s'assurer de leur cohérence avec l'objectif retenu. Il en a déduit que l'objectif de consommation d'espace sur lequel se fondait le PLUIH n'induisait pas une modération effective de cette consommation, mais, à l'inverse, sans justification probante, une hausse du rythme de prélèvement d'espaces naturels, agricoles et forestiers par rapport à la décennie antérieure", selon un communiqué de presse de la juridiction.

Une date d'effet encore inconnue

Cette dernière pointe donc du doigt des chiffres insincères concernant la consommation du foncier sur le territoire métropolitain. "Avec le PLUi-H, nous allons sanctuariser et protéger pas moins de 24 147 hectares de surface sur les 46 511 hectares que représentent la Métropole, soit 51,9% de notre territoire. Sans oublier que ce taux ne prend pas en compte les parcs et jardins publics", se félicitait pourtant à l'époque Jean-Luc Moudenc. Par conséquent, le groupe d'opposition Alternative pour une Métropole Citoyenne évoque "une accusation lourde". "Ce sont donc trois années de perdues pour la métropole toulousaine", estime le collectif mené par le maire de L'Union, Marc Péré et la conseillère municipale Hélène Magdo.

"C'est une très mauvaise nouvelle pour les habitants de toutes les communes. Nous avions vôté contre à l'époque car dans le PLUi-H il y avait un déséquilibre entre la ville centre et les communes autour sur la répartition des logements neufs. Par ailleurs, nous avions des craintes sur le manque de logements sociaux et ce document ne prend pas en compte la densification prévue sur le corridor de la future troisième ligne de métro à Toulouse. Enfin, Jean-Luc Moudenc avait retenu à l'époque le scénario de consommation des espaces agricoles le moins ambitieux des trois proposés", se remémore Isabelle Hardy, conseillère municipale et métropolitaine d'opposition, aux côtés d'Antoine Maurice, co-présidents du groupe Métropole écologiste et citoyenne pour des territoires solidaires.

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Du côté de Toulouse Métropole, directement visée par ces attaques et le délibéré du tribunal administratif, "la collectivité souhaite réserver l'exposé de l'ensemble des arguments qu'elle fera valoir au juge administratif". Effectivement, ce document d'urbanisme qui fusionne les 37 PLU des communes de l'agglomération est bel et bien annulé, mais la date d'effet de cette annulation est encore à déterminer. "Le tribunal a décidé de surseoir à statuer sur cette date d'effet, pour permettre aux parties de débattre de la question de savoir s'il y a lieu de moduler dans le temps les effets de cette annulation. Il rendra sa décision sur ce point à l'issue d'une nouvelle audience publique", fait savoir l'instance.

"Toulouse Métropole avait en effet demandé, lors de l'audience publique, qu'en cas d'annulation du PLUi-H par le juge de première instance, une modulation dans le temps des effets de cette annulation soit appliquée. La Métropole dispose donc de 15 jours pour transmettre au Tribunal des éléments complémentaires", complète l'intercommunalité.

"Ce n'est pas un drame"

Malgré cette attente sur l'entrée en vigueur officielle de cette annulation, l'urbanisme toulousain ne devient pas un domaine sans règle dans lequel les promoteurs immobiliers ont carte blanche. Dans ce cas particulier, ce sont les anciens PLU respectifs à chaque commune de la Métropole de Toulouse qui s'appliqueront désormais, une fois la date d'annulation déterminée.

"Cela ne va avoir aucune conséquence sur les permis de construire déjà validés, au contraire de ceux en cours d'instruction. Le retour au PLU pour chaque commune va modifier la constructibilité de certains terrains, à la hausse ou à la baisse, et certains projets, pour lesquels les permis n'ont pas été délivrés, devront probablement être revus et adaptés. Néanmoins, il est encore trop tôt pour connaître parfaitement les conséquences de cette décision. Ce qui est certain c'est que ce sera du cas par cas, projet par projet", réagit Stéphane Aubay, le président de la Fédération des promoteurs immobiliers d'Occitanie.

Déjà confrontés à une baisse de la délivrance des permis de construire sur la métropole toulousaine, aux conséquences non négligeables sur le marché de l'immobilier neuf, les promoteurs craignent désormais un nouveau coup d'arrêt de leur activité avec cette décision de justice.

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"C'est gênant car cela risque d'autant plus de générer des retards sur certains projets, nous aurions donc préféré nous en passer. Néanmoins, ce n'est pas un drame non plus. Des PLU ont déjà été annulés par le passé et cela n'a pas empêché les promoteurs d'avancer", tient à rassurer en conclusion Stéphane Aubay.

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