A Toulouse, Space Elevator encourage la diversité dans le spatial dès le collège

A Toulouse, l'association Space Elevator initie, dès le collège, les jeunes aux débouchés offerts par le spatial. Une manière de voir au-delà de la figure idéalisée de l'astronaute mais aussi de lever l'autocensure dans les parcours d'orientation dans un secteur qui compte notamment moins d'un quart de femmes.
(Crédits : Rémi Benoit)

« En terminale, c'est déjà trop tard, les jeunes ont déjà décidé leur orientation. Il y a déjà eu un filtre hyper fort, notamment sur les filles, qui s'autocensurent ou qui s'intéressent un peu moins aux filières scientifiques. Avec Space Elevator, nous avons fait le pari d'agir un peu en amont pour favoriser la diversité dans le spatial  », avance Pierre Bertrand, président de Space Elevator.

Cette association, née en 2022, a réuni le 29 mars dernier une centaine de collégiens à la Cité de l'espace à Toulouse pour leur faire découvrir les métiers du spatial à travers des rencontres avec des professionnelles du secteur et une visite de l'exposition immersive LuneXplorer. La structure délivre également des kits dans les lycées pour apprendre aux élèves à construire des fusées à eau ou la charge utile d'un cubesat. Objectif : montrer à ces ados que le spatial n'est pas réservé à une certaine partie de la population.

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Des rôles modèles pour inspirer

D'où l'importance de rôle modèles pour témoigner des opportunités qu'offrent le secteur.

« J'ai grandi dans un tout petit village, dans une famille monoparentale. Ma mère ne connaissait pas l'existence des prépas. Et j'ai été marquée durant mes études par une présentation de l'astronaute Claudie Haigneré, alors que je n'étais pas forcément attirée par le spatial », se remémore Audrey Berthier, directrice du Medes (l'Institut de médecine et physiologie spatiales) à Toulouse.

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Cette ingénieure a présenté son métier aux groupes de collégiens aux côtés d'expertes issues de Thales Alenia Space, Airbus Defence & Space, Loft Orbital, avec l'idée de montrer la variété de débouchés possibles dans le secteur au-delà de la figure idéalisée de l'astronaute.

« Rien que dans l'ingénierie spatiale, il existe des dizaines de métiers différents. Cette diversité de métiers est l'un des aspects du spatial que j'aime énormément », témoigne Cécilia, ingénieure chez Airbus Defence & Space.

Des partages avec les lycéens qui sont aussi l'occasion de lever certains stéréotypes : « Il ne faut pas avoir peur du code et de la programmation et s'enlever ce cliché du codeur, que moi aussi j'avais, du garçon avec des lunettes derrière son ordinateur », indique Emma Vatine, ingénieur logiciel et opératrice de satellites chez Loft Orbital.

« C'est un métier hyper stimulant puisque tu communiques avec l'espace littéralement tous les jours », poursuit-elle devant les collégiens.

Seulement 22% de femmes

En l'espace de quelques années, l'essor des startups du NewSpace a coïncidé avec l'émergence d'une nouvelle génération de dirigeantes à l'instar d'Hélène Huby au sein de The Exploration Company, ou à la tête des antennes françaises de l'Américain Loft Orbital (Emmanuelle Méric), l'Espagnol Pangea Aerospace (Marie-Laure Gouzy), l'Italien Aiko (Aurélie Baker), le Portugais Tekever (Nadia Maaref) ou encore aux manettes du site toulousain de Thales Alenia Space (Nathalie Font)...

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Pour autant, l'industrie spatiale a encore un long chemin à parcourir, notamment pour atteindre la parité. D'après une étude menée par l'association européenne Eurospace, le secteur compte seulement 22% de femmes et encore moins à des postes techniques ou d'encadrement.

« Il y avait parfois une seule femme dans un open space de 30 personnes », se remémore Pierre Bertrand, passé par plusieurs acteurs du secteur (OneWeb, Loft Orbital...).

Le vivier de candidatures féminines pourrait même connaître un nouveau coup de rabot dans les années à venir. Avec la réforme du lycée de 2019, un garçon a désormais 2,3 fois plus de chances qu'une fille d'avoir un bac scientifique.

« Depuis la réforme Blanquer, le nombre de lycéennes dans les spécialités scientifiques a grandement diminué. Le niveau actuel de parité n'est pas satisfaisant mais les projections ne sont pas du tout positives », déplore Pierre Bertrand.

La fidélisation des talents féminins est aussi un enjeu pour la filière. D'après un index européen publié fin 2022, 73% des salariées du secteur ont déclaré avoir été discriminées sur leur lieu de travail contre seulement 32% de leurs homologues masculins.

Pourtant, le secteur aura d'énormes besoins dans la décennie à venir. La filière spatiale, qui emploie plus de 20.000 salariés dans le Sud-Ouest, entend recruter entre 1.200 et 2.600 personnes par an à horizon 2030.

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