Des moteurs électriques made in Toulouse pour les bateaux et les drones

La société toulousaine Occitem est en train d'industrialiser la confection de moteurs électriques pour des marchés de niche : paramoteurs, drones, bateaux de plaisance, camions poubelles, engins de chantier... Un savoir-faire unique qui a déjà tapé dans l'oeil de la co-entreprise de Stellantis et Nidec.
Près de Toulouse, Occitem est en train d'industrialiser la confection de moteurs électriques pour les bateaux et les paramoteurs.
Près de Toulouse, Occitem est en train d'industrialiser la confection de moteurs électriques pour les bateaux et les paramoteurs. (Crédits : Rémi Benoit)

Il n'y a pas que les voitures à franchir le cap de l'électrique. Alors que l'Union européenne veut interdire la vente de voitures à moteur thermique à partir de 2035, les autres moyens de locomotion sont également poussés à faire leur transition énergétique. À Toulouse, la société Occitem cherche justement à industrialiser la confection de moteurs électriques en petites séries pour des marchés de niche.

Fondée en 2019 par Marc Tunzini qui a consacré toute sa carrière aux moteurs électriques successivement chez Valeo, Thales et Safran, la jeune pousse dispose depuis le printemps dernier d'une première ligne de fabrication pour répondre à un important contrat pour des bateaux de plaisance. « Il s'agit d'un moteur immergé. Nous allons en produire 120 moteurs cette année, puis 200 en 2024 et 500 en 2025. Et quand le marché sera à maturité, le but est de produire environ 1.000 moteurs par an pour ce client », explique Géraldine Vieillard, directrice générale d'Occitem.

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Occitem a lancé une ligne de fabrication pour produire des moteurs électriques pour des bateaux de plaisance. (Crédits : Rémi Benoit)

Paramoteurs, drones, camions poubelles, engins de chantier...

La société a aussi mis au point un moteur électrique très compact (22 cm de diamètre) à destination des paramoteurs mais qui pourrait tout aussi bien s'adapter à d'autres types d'aéronefs ultra-légers comme les drones.« Il existe une volonté de passer à l'électrique sur les loisirs. Les moteurs électriques permettent de faire moins de bruit. Aujourd'hui, des clubs ferment à cause des plaintes des riverains à cause de ces nuisances. Et puis, avec le moteur thermique, de l'essence va couler dans le coffre de l'appareil », observe Marc Tunzini. La production en série de ce moteur pour les paramoteurs sera lancée à partir de l'année prochaine près de Toulouse avec de l'électronique fabriqué en Nouvelle-Aquitaine par la société Black Swan Technology.

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Marc Tunzini et Géraldine Vieillard sont à la tête d'Occitem. (Crédits : Rémi Benoit)

Occitem réalise aussi des opérations de prototypage sur les moteurs qui équiperont de futures voitures électriques pour Emotors, la coentreprise créée par le groupe Stellantis et une filiale du fabricant japonais de moteurs électriques Nidec. Mais de l'aveu de Marc Tunzini, il existe « des centaines de niches » possibles pour appliquer le savoir-faire d'Occitem.

« Avec l'interdiction dans les centres-villes des moteurs thermiques, les engins de chantier vont par exemple devoir passer à l'électrique pour continuer à circuler. Nous fabriquons aussi des moteurs électriques qui vont équiper les camions poubelles de la ville de Genève. Ces engins sont très énergivores car ils s'arrêtent et redémarrent sans cesse. Or les camions thermiques au freinage ne récupèrent aucune énergie alors qu'en électrique, l'énergie est renvoyée vers la batterie », décrit le dirigeant.

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Un savoir-faire unique en son genre

La jeune pousse a déjà décroché ses premiers contrats grâce à un savoir-faire unique en son genre : la confection de moteurs électriques dotés d'un bobinage à épingles.

« Le bobinage classique est réalisé avec un fil de cuivre rond qui vient s'enrouler comme  une pelote de laine autour du moteur. C'est beaucoup plus facile à industrialiser en raison de ce mouvement de rotation mais c'est aussi moins performant qu'un bobinage à épingles avec une dissipation de la chaleur moins importante. Il existe déjà des lignes de fabrication de moteurs électriques à bobinage à épingles dans l'automobile où le coût de production très onéreux est amorti par les grands volumes de voitures fabriquées. Mais ce n'est pas envisageable pour les marchés de niche. Un constructeur ne va pas investir un million d'euros pour une petite série de 200 moteurs par an. À l'inverse dans l'aéronautique, le bobinage à épingles est réalisé manuellement par des opérateurs chevronnés.

Nous avons voulu combler le vide entre les processus développés dans l'automobile et l'aéronautique pour industrialiser la confection de ces moteurs à bobinage à épingles pour de petites séries », explique Géraldine Vieillard, directrice générale d'Occitem.

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Occitem se démarque par la confection de moteurs électriques dotés d'un bobinage à épingles (comme sur le moteur de gauche) plus performant que les moteurs à bobinage classique (moteur de droite). (Crédits : Rémi Benoit)

 Après plusieurs années de R&D, Occitem a mis au point des moteurs atteignant un gain de 20% de performance avec un encombrement égal, ou alors des moteurs plus petits avec le même niveau d'efficacité ou encore un allongement de l'autonomie des batteries. Un gain de performance crucial alors qu'actuellement le poids et le prix très élevés des batteries freinent le passage vers la mobilité électrique. « Notre technologie est d'autant plus intéressante pour maximiser l'utilisation des batteries dans un véhicule. Nous sommes dans un monde où les ressources futures seront limitées. Ne pas gâcher d'énergie devient crucial, » pointe Marc Tunzini.

Occitem a développé avec la société toulousaine Dreamtech ses propres machines pour commencer à fabriquer en série ses moteurs électriques. « Le fil de la bobine de cuivre entre dans la machine, il est ensuite redressé, puis décapé à son extrémité pour permettre la soudure et découpé en baguettes », décrit Géraldine Vieillard. Occitem s'est appuyée sur l'entreprise toulousaine Cirtem pour réaliser l'électronique associé au moteur des bateaux.

Une levée de fonds d'ici la fin de l'année

La pépite a aussi conçu pour les moteurs de la co-entreprise Stellantis-Nidec un procédé pour déposer au goutte-à-goutte du vernis sur les moteurs.« S'il y a trop de vernis, cela génère des dépôts, les épingles se collent entre elles. Cette étape garantit l'isolation des moteurs et l'étape de cuisson qui intervient en suivant va consolider mécaniquement le stator », ajoute-t-elle.

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Occitem a imaginé pour la co-entreprise Stellantis-Nidec un procédé pour déposer au goutte-à-goutte du vernis sur les moteurs. (Crédits : Rémi Benoit)

Installée à Colomiers, Occitem a reçu pour ses premiers développement une subvention de 180.000 euros de la Région Occitanie dans le cadre de l'initiative Maele (Mobilité Aérienne Légère et Environnementalement responsable). Elle fait partie des jeunes pousses sélectionnées dans le programme d'Airbus Développement pour lequel la société va bénéficier d'une aide de 30.000 euros. La jeune société aimerait décrocher un financement supplémentaire pour imaginer des hélices silencieuses associées à ses moteurs de paramoteurs. L'entreprise, qui a frôlé les 500.000 euros de chiffre d'affaires l'an passé et qui devrait doubler la mise cette année, prévoit une levée de fonds d'un demi-million d'ici fin 2023.

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Commentaire 1
à écrit le 11/09/2023 à 8:16
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c est superbe comme truc. c est exactement ce qu il fait pour redresser la france (c est pas en incitant les gens a investir dans du parpaing (ex Pinel) qu on va redresser le pays)

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