Covid-19 : la prime aux soignants fait polémique au CHU de Toulouse

Un syndicat a allumé un incendie en interne en révélant que des directeurs du CHU de Toulouse vont bénéficier de la prime Covid, dédiée au personnel soignant qui a affronté l'épidémie. Des faits qui ont obligé la direction de l'établissement de santé à prendre la parole sur le sujet lors d'une conférence de presse, mercredi 17 juin, pour éclaircir certains points des modalités de versement. Explications.
La prime Covid sème le trouble au sein du CHU de Toulouse.
La prime Covid sème le trouble au sein du CHU de Toulouse. (Crédits : Rémi Benoit)

La prime Covid-19 en guise de reconnaissance au personnel soignant, décidée par le gouvernement, est-elle en train de devenir "un truc foireux", comme le pense Vincent Bounes, le responsable du Samu 31 ? Tout a commencé lundi 15 juin quand la CGT du CHU de Toulouse a dénoncé sur son site internent et ses réseaux sociaux que certains directeurs de l'établissement de santé toucheraient le montant maximal de 1 500 euros, tandis que des personnels soignants, au contact des malades n'en verraient pas la couleur.

"Le directeur général du CHU de Toulouse (Marc Penaud, ndlr) a choisi nominativement les agents qui auront 1 500 euros et celles et ceux qui n'auront que 500 euros. Cette prime est présentée par le gouvernement comme une reconnaissance de celles et ceux qui ont pris en charge des patients Covid-19 et qui ont été mobilisés par les circonstances exceptionnelles d'exercice... Nous avons découvert aujourd'hui que le DRH, la DRH adjointe et le directeur des soins allaient toucher 1500 euros, alors que certains soignant.e.s ayant pris en charge des patients Covid, beaucoup d'ASH et de personnels techniques ultra mobilisés pendant la période n'auront que 500 euros (...) C'est un véritable scandale", écrit le syndicat sur ses supports de communication.

En réalité, ce sont cinq directeurs et directeurs adjoints qui sont concernés par cette prime de 1 500 euros. "Les directeurs d'hôpitaux ont des salaires très confortables et des primes très importantes chaque année, cette information est à vomir", poursuit la CGT. Mais pour Vincent Bounes, qui refuse de toucher une telle prime, "il n'y a pas de dossier" face à la mobilisation de tous les instants des personnes concernées.

"Nous sommes partis du principe qu'il fallait avoir vraiment mouillé la chemise pour avoir cette prime. Pendant huit semaines, j'étais tous les jours à l'hôpital. À chaque fois, j'ai vu les mêmes directeurs. Ils étaient le matin, le soir et la nuit. Ils avaient les mêmes horaires que moi, donc ça ne me choque pas ! Ils ne l'ont pas volé !", insiste-t-il.

"Cela n'a rien d'original"

Hasard du calendrier, la direction du CHU de Toulouse avait prévu un point presse en début d'après-midi, mercredi 17 juin, pour faire "un bilan Covid-19", soit le surlendemain de ces révélations et au lendemain d'une manifestation du personnel soignant dans les rues de Toulouse, au cours de laquelle certains participants ont dénoncé le fait qu'ils ne toucheraient pas cette prime Covid défiscalisée.

Lire aussi : En images : les soignants défilent à Toulouse pour qu'on ne les oublie pas

Par conséquent, Marc Penaud n'a eu d'autres choix que de s'expliquer pour tenter d'éteindre la polémique grandissante.

"J'ai souhaité distinguer cinq directeurs adjoints car ce sont des personnes qui ont été extrêmement disponibles tout au long de la crise, à toute heure du jour comme de la nuit, et qui ont été ardemment présents pour accompagner le personnel dans de nombreux chantiers. Sans ces actions, nous n'aurions pu transformer l'hôpital avec une telle agilité. Cela n'a rien d'original (cette prime) et ils représentent 0,1% des personnes qui vont toucher le montant maximum de 1 500 euros", se justifie Marc Penaud.

Pour mémoire, le gouvernement a décidé d'accorder ce geste financier à la totalité du personnel pour tous les établissements de santé publics placés en zone rouge pendant l'épidémie (Est de la France et Île-de-France). Néanmoins, le décret a été modifié pour distinguer 117 établissements placés en zone verte qui ont dû faire face tout de même à un flux important de patients, dont le CHU de Toulouse. Ce dernier avait même accueilli des malades des régions Grand-Est et Île-de-France.

Lire aussi : Covid-19 : Toulouse et l'Occitanie accueillent 18 patients du Grand Est

Plus de 4 000 personnes concernées au CHU

Seulement, et c'est en raison de cette particularité que la polémique toulousaine a débuté, pour ces 117 établissements, ce n'est pas la totalité du personnel qui peut avoir accès à cette prime de 1 500 euros, mais seulement 40% de l'effectif total. Une autre partie peut toucher un supplément moins important, de 500 euros. Alors, le directeur général du CHU de Toulouse a dû définir des critères d'éligibilité à cette prime. Marc Penaud a donc mené plusieurs concertations, et a même proposé des rencontres bilatérales avec les quatre syndicats, mais une seule a accepté.

"Pour bénéficier de la prime, il faut notamment avoir travaillé 38h30 sur les deux derniers mois, soit une semaine environ. Par ailleurs, il faut avoir travaillé pour 45 jours d'hospitalisation Covid-19, donc soit cinq patients qui sont restés neuf jours dans le service ou neuf patients qui ont été hospitalisés cinq jours. Le personnel soignant qui est également allé renforcer les équipes parisiennes au plus fort de l'épidémie pourra en bénéficier", détaille Marc Penaud.

Ainsi, sur 15 350 personnes qui travaillent au CHU de Toulouse, 12 940 salariés peuvent toucher la prime de 1 500 euros. Sur ce quota, 8 508 toucheront une prime de 500 euros. Les 4 432 restants auront droit à la récompense maximale. Parmi eux, 78,5% sont des soignants, 15% du personnel technique et 6,4% du personnel administratif. Les bénéficiaires seront indemnisés sur leur paie du mois de juin.

Néanmoins, certains ayant exprimé la volonté de ne pas en bénéficier, le personnel qui le souhaite peut faire don de sa prime à l'Institut Saint-Jacques, le fonds de dotation du CHU de Toulouse, ou à un autre organisme caritatif. "Au départ, cette prime, c'est foireux ! Si 40 % des personnes l'ont, ça veut dire que 60 % ne l'ont pas et seront donc déçus. Sincèrement, la direction générale a fait au mieux avec ce truc qui est foireux au départ, je le répète. Ils ont vraiment essayé de faire dans la transparence", conclut Vincent Bounes.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 1
à écrit le 19/06/2020 à 9:26
Signaler
Bonjour. Cette prime à certes avoir avec le mérite mais aussi par rapport à une grille de salaire. Tout honneur aux directeurs qui furent là 24h/24, mais à ce moment là décernons leur une médaille s'ils ont besoin de reconnaissance, ce que je peux c...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.