Événementiel : à Toulouse, la cinquième vague plombe un secteur déjà transformé par la crise

Après une saison estivale réussie, voilà que la filière événementielle toulousaine fait face à une nouvelle série d’annulations. En cause, les déclarations faites par le gouvernement pour enrayer le cinquième vague de la Covid-19. Jean-François Renac, président d’Events 31, fait le point sur la situation économique des entreprises du secteur, leurs inquiétudes, et les conséquences qu’ont déjà eu ces deux dernières années sur ce marché pour le moins bousculé.
La filière toulousaine de l’événementiel s’inquiète des conséquences qu’aura la cinquième vague du Covid-19 sur son activité.
La filière toulousaine de l’événementiel s’inquiète des conséquences qu’aura la cinquième vague du Covid-19 sur son activité. (Crédits : DR)

"C'est l'un des Etats en Europe qui a fait le mieux pour soutenir les entreprises, il n'y a pas de débat là-dessus [...], mais le fait que l'on ait des incertitudes vis-à-vis des mesures qui seront mises en place par le gouvernement pour que notre secteur affronte cette période crée des troubles, des inquiétudes", indique Jean-François Renac, président de l'association professionnelle Events 31 à La Tribune.

Oublié le temps de la saison estivale, la Covid-19 bouleverse à nouveau le secteur de l'événementiel depuis le début du mois de décembre. Les annulations de séminaires d'entreprises, pots de départs, et autres événements grand public suivent effectivement le rythme de la cinquième vague de l'épidémie. Un phénomène amplifié ces derniers jours par les déclarations publiques de Jean Castex, Premier ministre, et Elisabeth Borne, ministre du Travail, qui ont déconseillé les rassemblements en entreprise.

Conscient des conséquences économiques qu'auront ces annulations en série sur les sociétés qui en sont dépendantes, le gouvernement et Emmanuel Macron ont donc annoncé la ré-instauration du chômage partiel pris en charge à 100 % par l'Etat, sans reste à charge pour l'employeur, jusqu'au 31 décembre au moins. Ce dispositif sera complété par la prise en charge intégrale des coûts fixes des entreprises. Si ces mesures sont bien accueillies par les professionnels du secteur, les conditions pour y accéder font débat.

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"Il n'y a pas de cadre légal"

Car pour en bénéficier, les entreprises devront justifier de l'arrêt temporaire de leur activité ou bien comptabiliser des pertes de chiffre d'affaires mensuelles d'au moins 65 %. Un 'détail' qui ne passe pas auprès des patrons concernés, selon le dirigeant d'Events 31.

"Ce seuil est trop élevé, il va exclure beaucoup d'entreprises. 50 % de perte sur un mois, c'est déjà dramatique. Cette mesure n'est pas cadrée à la réalité de ce que vivent les entreprises aujourd'hui", indique-t-il, tout en demandant la simplification de la procédure permettant la compensation des coûts fixes.

D'autres points suscitent des crispations. Parmi eux, le manque de clarté des annonces. Le président de l'association professionnelle réunissant près de 200 entreprises toulousaines du secteur fait savoir que "déconseiller fortement, ce n'est pas interdire". "Cela signifie qu'il n'y a pas de cadre légal. Nos clients souhaitent annuler leurs événements car ils imaginent qu'ils sont interdits, et demandent le remboursement de leurs acomptes. Nous le refusons, justement parce que les événements ne sont pas interdits. Cela crée des tensions avec eux, ce n'est pas simple", explique-t-il.

Est aussi pointée du doigt l'échéance du début de l'amortissement des prêts garantis par l'Etat (PGE), dont les versements doivent débuter pour certains dès mars 2022. Un délai régulièrement critiqué, notamment par les gérants de discothèques, et qui ne conviendrait pas malgré déjà deux reports. Jean-François Renac estime effectivement que la période juillet-octobre, bien que réussie économiquement, n'a pas suffi à reconstituer convenablement les trésoreries, notamment des petites et moyennes entreprises :

Nous savons que des sociétés vont avoir du mal à rembourser les PGE. Il faut faire 5 à 6 % de résultat complémentaire par an pour assumer cette charge-là, et aujourd'hui, nous n'y sommes pas du tout. C'est donc un vrai sujet.

Jean-François Renac

D'autant que le mois de décembre s'annonce compliqué pour beaucoup de ces entreprises.

Les chiffres d'affaires s'effondrent à nouveau

Au niveau national, le syndicat des activités événementielles estime que 45 % du chiffre d'affaires prévisionnel de la période décembre-janvier est déjà perdu.

Dans le bassin toulousain, Events 31 évoque "au moins 50 % de perte d'activité" et 35 % de perte de chiffre d'affaires, en se basant sur les données communiquées par 80 de ses adhérents début décembre. Or depuis quelques jours, les professionnels toulousains évoquent 70 % de perte de CA, en interne et dans les médias. Ainsi, si les statistiques manquent encore de fiabilité, le constat est sans appel pour Jean-François Renac : "Nous sommes sur une pente très raide", prévient-il.

Prestataires techniques, traiteurs ou encore gestionnaires de salles ne sont pourtant pas logés à la même enseigne, et un grand flou semble frapper ce secteur d'activité. Les événements extérieurs sont annulés les uns après les autres selon l'association professionnelle, tandis que les foires et salons organisés dans des espaces clos seraient plus épargnés. Les propos tenus dans nos colonnes par Patrice Vassal, gestionnaire du MEETT de Toulouse, concordent.

"Il est possible que les entreprises soient plus frileuses que les organisateurs de foires et salons, puisqu'elles ont une responsabilité plus importante vis-à-vis de leurs salariés", suggère Jean-François Renac.

Cette nouvelle vague de Covid déverse donc avec elle de nouvelles problématiques dans la profession, et renforce également certains phénomènes déjà connus.

"Le phénomène de concentration tape sur les plus faibles"

Notamment, la baisse d'attractivité des métiers de l'événementiel qui induit des difficultés de recrutement, mais aussi la restructuration de ce secteur.

Concept Group, prestataire technique de taille dans la région toulousaine, a ainsi été rachetée par Novelty avant l'été, une entreprise installée aux quatre coins de la France, au Royaume-Uni ou encore aux Émirats arabes unis. Quant aux traiteurs de l'événementiel de la Ville rose, ils seraient trois sur une dizaine à avoir déposé le bilan.

Nous ne sommes plus sur un marché composé d'acteurs régionaux moyens, nous sommes sur un marché avec un ou deux gros acteurs.

Jean-François Renac

À noter que les patrons et salariés de l'événementiel avaient alerté de ces risques dès septembre 2020 avec l'opération « Alerte rouge », qui s'était déroulée aux quatre coins de Toulouse.

Malgré ces transformations provoquées par la crise, le marché de l'événementiel toulousain n'est pas pour autant sacrifié. "La bonne nouvelle, c'est qu'on a observé une élasticité qui est quasi-nulle sur la reprise. Quand on sort d'une période de crise, l'activité reprend très fortement. Le secteur rebondira, sans aucun doute, simplement il le fera avec moins d'opérateurs", conclut Jean-François Renac.

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