Aéronautique : « Une IA générative type Chat GPT ne peut pas s'appliquer à l'aviation »

Chat GPT pourrait-il bientôt venir en aide aux pilotes ? Pas sûr au vu des nombreuses hallucinations générées par ce type d'intelligence artificielle générative. Raison pour laquelle à Toulouse, la PME OpenAirlines a opté pour une stratégie alternative en créant une intelligence artificielle spécialement dédiée aux pilotes qui puise dans les données d'une soixantaine de compagnies aériennes pour révéler les économies de carburant atteignables.
Alexandre Feray, fondateur d'OpenAirlines.
Alexandre Feray, fondateur d'OpenAirlines. (Crédits : Rémi Benoit)

Un an et demi après son lancement, Chat GTP revendique 180 millions d'utilisateurs actifs mensuels. L'intelligence artificielle générative s'immisce dans tous les corps de métier. Pourrait-elle bientôt arriver dans le cockpit des avions ? Pas sûr au vu des nombreuses hallucinations générées par ce type d'intelligence artificielle générative. « Nous avons testé l'utilisation d'une intelligence artificielle générique type Chat GPT ou Copilot de Microsoft pour proposer des trajectoires alternatives aux pilotes et générer des économies de kérosène. Nous nous sommes aperçus que cela donnait des choses peu intéressantes ou des banalités parce que l'IA ne comprenait pas le contexte des opérations aériennes. Chat GPT raconte parfois n'importe quoi et ce type d'hallucinations n'est pas admissible dans le milieu aérien où la sécurité est la priorité n°1», remarque Alexandre Feray, fondateur d'OpenAirlines.

Cette PME toulousaine fait figure de pionnière de l'écopilotage appliqué aux avions en lançant il y a plus de dix ans un logiciel qui permet d'économiser jusqu'à 5% de kérosène. Son fonctionnement est simple : après chaque vol, les compagnies récupèrent une carte mémoire à l'arrière de l'appareil où sont enregistrées toutes les données de vol. Le pilote a accès à une carte en 3D du trajet : l'itinéraire est bleu quand le pilote a bien maîtrisé sa conduite et vire au rouge quand il y a eu une erreur. Les compagnies aériennes ont de leur côté accès à une autre interface avec des données plus globales sur la conduite de l'ensemble des pilotes et des indications sur les causes de pertes de carburant : atterrissage trop brutal, détour au cours du trajet... La solution a déjà conquis une soixantaine de compagnies aériennes dont Air France, Easyjet, flydubai, Norwegian, Cebu Pacific, Atlas Air...

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L'intelligence artificielle pour détecter des gains de kérosène

Pour aller plus loin, Openairlines lance sur le marché dans les prochains jours un nouveau logiciel qui utilise non pas une intelligence artificielle générique type Chat GPT mais un outil spécialement adapté au pilotage qui va puiser dans les données (boîtes noires, météo, plan de vol) de la soixantaine de compagnies aériennes déjà clientes pour les aider à réaliser encore davantage d'économies de carburant.

« Les compagnies aériennes ont énormément de données et notre intelligence artificielle va leur faire gagner du temps en leur disant où les pilotes doivent concentrer leurs efforts. Par exemple si c'est le roulage monomoteur à l'aéroport de Los Angeles ou la mise en place de descentes continues à Rome. L'outil va surtout agréger les données d'une soixantaine de compagnies pour poser des objectifs réalistes puisque ayant déjà été atteints par 25% des pilotes. Cela permet de comparer et dire par exemple qu'accomplir une descente continue à Istanbul dans 75 % des cas, c'est bien, mais ce n'est pas extraordinaire. Par contre, faire 55 % de descentes continues à Paris-Orly, c'est très fort », détaille Alexandre Feray.

Déjà testée avec succès par les compagnies Hop !, Corsair ou Viva, la solution va pouvoir être utilisée désormais largement. En parallèle, Openairlines continue le développement d'un autre outil qui permettra à terme d'envoyer des alertes en temps réel aux pilotes pour mettre en place des procédures réduisant encore davantage l'empreinte environnementale des avions. Testé par Philippines Airlines l'an passé, ce produit pourra embarqué cet été à bord d'avions de Transavia, la compagnie low-cost d'Air France-KLM.

Pression accrue sur les compagnies aériennes

Après un trou d'air durant la crise sanitaire, OpenAirlines a enregistré ces dernières années une forte croissance puisque son chiffre d'affaires est passé 6,6 millions d'euros à près de 9 millions d'euros en un an avec un effectif de 90 collaborateurs et l'entreprise espère passer la barre des dix millions d'euros en 2024. Une activité grandissante qui répond à la pression environnementale grandissante sur les compagnies aériennes.

« Autour de la décarbonation de l'aviation, il existe une forte pression aussi bien venant des passagers, qu'une pression réglementaire et économique. Il est prévu d'augmenter à court-terme la part des carburants d'aviation durable (SAF) dans les avions. L'écopilotage permet d'agir dès maintenant», confirme Alexandre Feray. Le dirigeant glisse qu'en un an son outil d'éco-pilotage a permis d'économiser 1,4 million de tonnes de CO2, soit déjà sept fois plus que les carburants en aviation durable qui restent encore sous-utilisés (moins de 0,1% du carburant utilisé dans les avions).

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