Régulation : « Le modèle économique des aéroports doit évoluer » (Thomas Juin, UAF)

Au moment où Toulouse réunit pendant trois jours 90 aéroports francophones, le président de l'UAF, Thomas Juin, rappelle l'urgence d'une évolution du modèle économique des plateformes de manière à financer les lourds investissements de décarbonation et de modernisation à venir.
Le président de l'UAF (Union des aéroports français), Thomas Juin à Toulouse.
Le président de l'UAF (Union des aéroports français), Thomas Juin à Toulouse. (Crédits : Rémi Benoit)

« C'est une édition record. Toulouse réunit pendant trois jours 650 dirigeants de 90 aéroports venus de France mais aussi de Belgique, du Canada, de la Côte d'Ivoire, du Maroc et de la Suisse », introduit Philippe Crébassa, président du directoire de l'Aéroport Toulouse-Blagnac.

Le berceau historique de l'aéronautique devient, jusqu'au 24 mai, l'épicentre des Rencontres des aéroports français & francophones. L'occasion pour le président de l'Union des aéroports français (UAF), Thomas Juin, co-organisateur de l'événement, de rappeler l'urgence d'«une évolution du modèle économique des plateformes ».

« Quand une compagnie aérienne se pose sur l'aéroport, elle paye des taxes pour l'usage des installations. Mais aujourd'hui, cette compagnie ne paie pas le juste prix. L'aéroport a, par ailleurs, des ressources extra-aéronautiques (issues des commerces de l'aérogare ou des parkings, ndlr) qui compensent ce système déficitaire et font baisser les tarifs. Ce mécanisme n'est pas vertueux puisque actuellement, les aéroports n'ont pas les ressources pour développer véritablement toutes leurs activités, qui plus est dans un paysage aéroportuaire en France et dans le monde devenu très concurrentiel. »

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Thomas Juin, président de l'UAF, et Philippe Crébassa, président du directoire de l'aéroport Toulouse-Blagnac. (Crédits : Rémi Benoit)

Un constat partagé par Philippe Crébassa à Toulouse : « Quand ATB développe un projet immobilier comme l'hôtel quatre étoiles NH, les revenus générés par ce type d'activités viennent subventionner aujourd'hui le service public aéroportuaire déficitaire ».

Une réforme pour préserver en partie les revenus non-aéronautiques

D'où l'idée d'une réforme de la régulation aéroportuaire, amorcée fin novembre dernier avec l'annonce au congrès de l'UAF, par Clément Beaune, alors ministre des Transports, de la fin de la caisse unique mêlant tous les revenus générés par les grands aéroports français. Les aéroports français sont toujours dans l'attente des modalités réglementaires de cette réforme.

« Mais le ministre devrait annoncer prochainement un aménagement de caisse, autrement dit une partie des ressources provenant de la caisse non aéronautique sera préservée pour investir dans des domaines qui sont essentiels pour demain comme l'amélioration de la qualité de service au sein des plateformes », fait savoir Thomas Juin.

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De lourds investissements pour l'arrivée de l'hydrogène

Un aménagement selon lui essentiel pour financer les lourds investissements de décarbonation et de modernisation à venir. Les aéroports doivent se préparer à l'arrivée exponentielle des carburants d'aviation durable. Alors que ces carburants d'un nouveau genre, issus notamment d'huiles de cuisson usagées, pèsent actuellement seulement 0,1% de la consommation mondiale des avions, le règlement RefuelEU impose une proportion croissante de SAF, à raison de 2% en 2025, 20% en 2030, 70% en 2050. A Toulouse, par exemple, depuis le mois de mars, l'aéroport fait venir par camion, d'un site de TotalEnergies à Bordeaux, des carburants d'aviation durable produits à partir d'huiles de cuisson usagées. Les SAF représentent déjà 4% des carburants disponibles sur le quatrième aéroport régional français.

Lire aussiL'aéroport Toulouse-Blagnac s'allie avec TotalEnergies pour proposer du carburant d'aviation durable

Les plateformes doivent aussi anticiper l'arrivée potentielle des avions à hydrogène. Alors qu'Aéroports de Paris ou même l'aéroport toulousain se préparent déjà à cette transformation, le président de l'UAF relève que « ces aéroports ont une taille critique suffisante pour dégager les investissements nécessaires pour des projets d'avions à hydrogène dont les retombées économiques pour les plateformes ne sont pas attendues avant dix ans ». Airbus s'est, par exemple, fixé de faire voler un avion à hydrogène en 2035.

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« Le parcours passagers ne doit pas être une course d'obstacles »

 Thomas Juin souligne également que « les aéroports français doivent disposer des moyens pour rester dans la course en matière de qualité de service pour que le parcours des voyageurs dans les aéroports ne soit pas une course d'obstacles ».

« Nous sommes dans un monde très sécurisé et nous sommes en train de travailler sur des sujets qui montrent que l'entrée de la technologie pour améliorer l'expérience passager », poursuit-il, citant notamment la montée en puissance de la biométrie pour vérifier les passeports.

Le président de l'UAF appelle enfin de ses voeux les pouvoirs publics à « une visibilité et une projection tarifaire qui soient faites sur plusieurs années », notamment des contrats régulation économique (CRE), de manière à pouvoir engager de lourds plans d'investissement. Une évolution impulsée en fin d'année par Clément Beaune. Mais en revanche, les plateformes n'ont toujours pas digéré l'instauration par le gouvernement d'une nouvelle taxe climat sur les concessions autoroutières et les grands aéroports, qualifiée notamment d'« hérésie » par le président de l'aéroport toulousain.

Lire aussi« La taxe climat sur les aéroports est une hérésie » (Philippe Crébassa, Aéroport Toulouse-Blagnac)

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Commentaires 3
à écrit le 23/05/2024 à 9:50
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Oui mais pour cela il faudrait que nos dirigeants politiques et économiques soient eux-mêmes en mesure d'évoluer et c'est toujours là que ça coince et partout.

à écrit le 22/05/2024 à 18:28
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L'urgence serait de réduire les nuisances sonores à la périphérie des aéroports en commençant par un arrêt total entre minuit et 6 heures du matin pour le bien être des riverains qui devraient être l'objet d'autant d'attention que les passagers !!!

le 23/05/2024 à 14:52
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A une limite près: la date de la "riverain-ité". Connaissiez vous les environs AVANT la construction de CdG ?

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