Airbus vise toujours 2035 pour faire voler son avion à hydrogène. L'annonce de ce programme a entraîné dans son sillage l'émergence d'une poignée de projets d'aéronefs à hydrogène en France. D'après une étude de l'Insee menée en partenariat avec le pôle de compétitivité Aerospace Valley et publiée le 19 mars, 5% des entreprises de la filière en Occitanie et en Nouvelle-Aquitaine travaillaient, au cours de l'année 2022, sur des projets en lien avec la décarbonation des aéronefs et/ou du spatial.
Décarbonation des avions et usines moins énergivores
Les entreprises qui mènent des projets liés à la décarbonation travaillent principalement sur la réduction de la consommation de carburant via l'essor de moteurs ultra sobres, l'optimisation des trajectoires de vol ou l'utilisation de matériaux plus légers. C'est le cas, par exemple, de Safran qui développe (avec General Electric dans le cadre du programme Rise) un moteur non caréné, dont le gain de masse permettrait de réduire de 20% les émissions de CO2 par rapport aux moteurs de la génération LEAP entrés en service lors de la dernière décennie sur les avions monocouloirs d'Airbus et de Boeing. De son côté, Daher a dévoilé, au début de mois, une pièce de la queue d'un avion TBM réalisée entièrement en thermoplastiques, de quoi préparer l'arrivée de ces matériaux recyclables et plus légers dans les avions du futur.
Parmi les autres projets, viennent ensuite les nouvelles propulsions, d'abord hybrides ou électriques, mais aussi à hydrogène. A Toulouse, Aura Aero met au point ERA, un futur avion hybride régional dont le premier vol est prévu en 2026, et Beyond Aero développe un avion d'affaires de quatre à huit passagers. Mais l'Insee note que les autres ruptures technologiques fortes comme le développement des carburants d'aviation durables font pour l'instant l'objet d'un nombre « marginal » de projets au sein de la filière
Au-delà des projets de décarbonation concernant les produits finaux du secteur (en l'occurrence les avions), 37% des entreprises de la filière aérospatiale en Occitanie et en Nouvelle-Aquitaine ont mis en place au moins un projet pour améliorer la performance environnementale de leur activité. Près d'un quart des entreprises cherchent à optimiser leurs sites de production : recours à des matières recyclées, optimisation des découpes pour minimiser les chutes, diminution de la consommation énergétique des bâtiments avec des ampoules basse consommation, mise en place de panneaux solaires ou amélioration de l'isolation. En 2022, 14% des entreprises de la filière ont travaillé sur l'optimisation environnementale de ces phases de tests et de certification, très consommatrices d'énergie.
Les grands groupes mènent la danse
L'Insee relève que ces projets sont plus fréquemment portés par de grandes entreprises : 58% d'entre elles ont mis en place au moins un projet lié à la performance environnementale contre 44% des ETI et 32% des PME. Un écart encore plus marqué si on ne regarde que les projets de décarbonation des avions ou des engins spatiaux : 24% des donneurs d'ordres ont au moins un projet en cours contre seulement 3% pour les ETI et les PME.
L'une des raisons est que les grands groupes ont davantage d'équipes dédiées à la R&D, un facteur qui facilite la mise en place de projets liés à la performance environnementale. Ainsi, d'après l'étude, 55% des entreprises ayant une activité R&D ont mis en place au moins un projet environnemental, contre 29% pour celles qui ne font pas de R&D.
« Les entreprises de la filière évoluent dans un contexte où elles doivent faire face à la reprise post-crise sanitaire, qui incite plus à augmenter les cadences qu'à innover. À court terme, les entreprises sont donc confrontées à d'autres défis : hausse des coûts de l'énergie, difficultés d'approvisionnement, manque de main d'œuvre », observe l'Insee.
Ce qui explique que la situation économique de l'entreprise influe sur la mise en oeuvre de tels projets : seulement 26% des entreprises dont le chiffre d'affaires aérospatial baisse entre 2021 et 2022 ont mis en place au moins un projet pour améliorer la performance environnementale.
A noter que cette dichotomie entre grands groupes et PME s'observe également au niveau de la menace cyber. Au sein de la filière aéronautique en Occitanie et en Nouvelle-Aquitaine, si les grands donneurs d'ordres sont fortement sensibilisés au risque d'attaques informatiques, les sous-traitants sont beaucoup moins protégés, portant le risque de fragiliser l'ensemble du secteur.
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