Aéronautique : Aura Aero confiant sur sa levée de fonds, malgré « le vide sidéral » de financement privé

Après un salon du Bourget qui a explosé les records de fréquentation, le constructeur aéronautique toulousain Aura Aero est en bonne voie pour boucler avant la fin de l'été une levée de fonds d'au moins 50 millions d'euros. Et ce malgré « le vide sidéral du financement privé » en France pour passer à l'échelle industrielle et la volonté ferme de la jeune société d'éviter l'entrée de tout fonds chinois, comme l'a martelé son président Jérémy Caussade lors de l'événement The Village organisé par La Tribune.
Jérémy Caussade, président d'Aura Aero, était présent à l'événement The Village à Cordes-sur-Ciel (81).
Jérémy Caussade, président d'Aura Aero, était présent à l'événement The Village à Cordes-sur-Ciel (81). (Crédits : Frédéric Scheiber)

Après quatre ans d'absence, le Salon du Bourget a battu tous les records de fréquentation en franchissant la barre des 400.000 visiteurs. Une édition record qui a permis au constructeur aéronautique toulousain Aura Aero de décrocher une dizaine de précommandes supplémentaires pour ERA, son avion de transport régional 19 places à propulsion électrique, de renforcer son partenariat avec Safran et de nouer un autre notamment avec EDF. L'événement pourrait aussi faciliter le bouclage d'une levée de fonds avant la fin de l'été pour la jeune société qui recherche entre 50 et 80 millions d'euros. « Le Bourget a bien aidé », confirme Jérémy Caussade.

Difficile de devenir une ETI en France

Le président d'Aura Aero est intervenu lors de l'événement The Village organisé par La Tribune les 30 juin et 1er juillet à Cordes-sur-Ciel (81) et est revenu sur le parcours du combattant pour obtenir des fonds privés pour passer à l'étape industrielle :

« En France, tout nous pousse à créer une société d'une vingtaine d'ingénieurs dans un garage. On peut vivre des années, des dizaines d'années remarquablement bien avec toute une panoplie de mécanismes. Rien que sur la place toulousaine, il existe au moins une dizaine de fonds privés qui peuvent faire du saupoudrage. De l'autre côté, nous avons aussi beaucoup de sociétés positionnées sur du LBO ou du capital développement, une activité assez traditionnelle. Et entre les deux, c'est assez simple, il n'y a rien, c'est le vide sidéral. Or, une société comme Aura Aero a vocation à devenir une ETI (entreprise de taille intermédiaire).»

L'entreprise est passée d'un salarié en 2019 à 200 collaborateurs aujourd'hui et veut mettre 150 millions d'euros pour créer une usine de 40.000 m2 à l'aéroport Toulouse-Francazal pour produire en série ses aéronefs biplaces et son avion régional électrique de 19 places. Le site industriel pourrait générer à terme un millier d'emplois.

Lire aussiAura Aero met 150 millions d'euros pour construire son usine d'avions électriques

Un constat partagé par Tristan Laurent, cofondateur d'Absolut Sensing qui développe une constellation de 24 satellites de détection du méthane : « C'est vrai que nous ne sommes pas encore armés en France, comme le sont des amis anglais ou américains à faire passer des startups à l'échelle industrielle. » La société grenobloise a levé 12 millions d'euros fin 2022 auprès de l'entreprise montpelliéraine Vol-V. Ce premier tour de table doit permettre de financer le démonstrateur de la constellation.

« L'année dernière, nous n'avons pas eu de problème à boucler cette levée. Désormais, nous nous dirigeons vers un nouveau tour de table de 25 millions d'euros d'ici la fin de cette année. Et c'est vrai que pour des opérations amonts avec une grande activité industrielle, c'est le vide », ajoute le dirigeant. La société, qui a annoncé lors du salon du Bourget avoir été sélectionnée par le programme de l'UE pour la surveillance satellitaire des émissions de méthane, emploie actuellement 100 personnes et devrait recruter 50 collaborateurs supplémentaires dans les prochains mois.

Lire aussiMesure des gaz à effet de serre : Absolut Sensing prépare à Toulouse sa future constellation GESat

Les fonds chinois, « une ligne rouge » pour Aura Aero

Pour Jérémy Caussade, « il y a bien une urgence absolue à ce que les fonds privés se réveillent » :

« L'ambition qui a été posée par la Commission européenne, c'est net zéro émission pour le secteur aéronautique en 2050. Sachant qu'il faut à près de dix ans pour mettre sur le marché un nouvel avion et commencer à le livrer de façon régulière, il n'y a rien d'impossible. Par contre, si on continue à avoir des fonds qui sont aussi peu à la hauteur, il y a deux solutions : soit les sociétés vont mourir et se rendront à l'étranger, soit elles se retrouveront comme 90 % des sociétés européennes dans notre secteur avec des fonds chinois au capital. »

 Le dirigeant relève par ailleurs que Aura Aero a été nommé par l'Union européenne au comité directeur de l'Alliance for zero emission aviation aux côtés d'Airbus pour représenter les constructeurs européens. « La raison est simple. Nous sommes la seule scale-up européenne à ne pas avoir de fonds chinois dans notre capital », narre Jérémy Caussade pour qui l'arrivée de fonds chinois est « une ligne rouge ». « Je préfère que la boîte s'arrête que d'avoir des fonds chinois sur une société installée à Toulouse-Francazal », glisse-t-il.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.