Mesure des gaz à effet de serre : Absolut Sensing prépare à Toulouse sa future constellation GESat

La startup grenobloise Absolut Sensing va monter en puissance dans les prochaines semaines à Toulouse. Elle compte y employer une trentaine de personnes d'ici fin 2023 pour préparer le lancement de son démonstrateur prévu début 2024 et sa constellation de 24 nanosatellites à horizon 2025 qui devra permettre d'identifier et mesurer les rejets de gaz à effet de serre dont le méthane, principal responsable du réchauffement climatique. Forte d'un premier contrat avec l'ESA, elle prépare aussi un service à destination des industriels et financiers.
Absolut Sensing prévoit d'envoyer dans les trois prochaines années une constellation de 24 nanosatellites français pour mesurer les rejets de méthane et d'autres gaz à effet de serre.
Absolut Sensing prévoit d'envoyer dans les trois prochaines années une constellation de 24 nanosatellites français pour mesurer les rejets de méthane et d'autres gaz à effet de serre. (Crédits : Absolut Sensing)

Fondée en octobre 2021, la startup grenobloise emploie déjà une quinzaine de personnes sur son siège social et autant au sein de son bureau à Toulouse. Mais Absolut Sensing prévoit de recruter encore une vingtaine de personnes dans la Ville rose d'ici fin 2023. « C'est allé très vite et cela va très vite car il y a une vraie urgence à agir », commente Tristan Laurent, le co-fondateur et le CEO de la jeune entreprise.

Sensible à la question environnementale, le dirigeant ambitionne de faire de son entreprise « le Bureau Veritas de la mesure des gaz à effet de serre et d'audit impartial des entreprises sur leurs rejets de carbone ». Pour ce faire, Absolut Sensing compte s'appuyer sur un système de mesure hybride mêlant une constellation de 24 nanosatellites, des drones et des moyens au sol.

« Aujourd'hui, les régulateurs ne s'appuient principalement que sur des estimations et non sur de la mesure exacte et en temps réel. Dans les faits, l'Europe a très peu de moyens pour mesurer le CO2, il y a donc des choses à faire. Nous, nous sommes donc là pour développer la technologie nécessaire pour analyser et surveiller les émissions de gaz à effet de serre. Nous serons en mesure de tel pays ou telle entreprise a émis telle quantité de gaz à effet de serre sur une période donnée », commente Tristan Laurent.

Pour s'assurer un développement si rapide, Absolut Sensing peut s'appuyer sur son premier client et pas des moindres, car il s'agit de l'Agence spatiale européenne (ESA). La startup grenobloise a été chargée de mettre en oeuvre en service en deux temps. Tout d'abord, définir les besoins techniques puis fournir les données d'émissions du méthane. « C'est le principal polluant responsable du réchauffement climatique », justifie le dirigeant, qui devra fournir des bilans d'émissions annuels puis trimestriels à son client. Avec l'innovation de l'entreprise française, la Commission européenne compte mener des politiques sur la protection de l'environnement et notamment adresser des pénalités financières aux plus importants émetteurs de méthane.

Des futurs satellites français

Pour démontrer la pertinence de son offre, Absolut Sensing compte envoyer un satellite démonstrateur d'une cinquantaine de kilos au début de l'année 2024, avec le lanceur Falcon 9 de SpaceX. Pour réaliser ce premier satellite nommé GEN1, l'entreprise a choisi NanoAvionics, basé en Lituanie. « Le contrat prévoit la fourniture d'une plateforme cubesat 16u, ainsi qu'un support pour les campagnes de test, le lancement et les opérations », précise un récent communiqué commun des deux parties. Ce démonstrateur embarquera à son bord un capteur cryogénique développé par le groupe Absolut, auquel la startup grenobloise appartient.

« Le groupe Absolut a été fondé par des anciens d'Air Liquide qui ont une importante expérience en cryogénie. Pour la mesure du méthane, c'est une compétence technique indispensable qui a justifié un rapprochement avec eux dès notre création. Le groupe est parvenu à développer un capteur miniaturisé avec cette technologie que nous pouvons produire en série. Seule la Nasa était arrivée à concevoir un tel capteur, mais sans le rendre manufacturable », commente Tristan Laurent.

Il y a quelques mois, le groupe a d'ailleurs levé 12 millions d'euros auprès de l'entreprise montpelliéraine Vol-V dont la moitié a été fléchée vers Absolut Sensing. Ce premier tour de table doit permettre de financer le démonstrateur et commencer à investir en vue de sa constellation de 24 nanosatellites, pour laquelle la startup compte choisir un fabricant français. Prévu en trois phases, le plan de déploiement de la constellation GESat prévoit le lancement en 2025 d'une première flotte de 12 satellites dédiée à la mesure des émissions de méthane (CH4). Cela sera suivi en 2026 du lancement d'une flotte de six satellites supplémentaires qui permettra la mesure de la pollution de dioxyde de carbone (CO2), puis d'ici à 2027 d'une dernière de 6 satellites pour la mesure du protoxyde d'azote (N2O).

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« Le siège social de l'entreprise restera à Grenoble car c'est là-bas que se trouve l'expertise et c'est là-bas que seront construits les capteurs. Toulouse abritera toute notre ingénierie spatiale, étant donné que nous serons opérateur d'une constellation satellitaire », détaille le CEO.

Un appel à projets important

Avec sa future constellation, Tristan Laurent compte également proposer une offre de service aux émetteurs de méthane. « Ils ont besoin d'une cadence supplémentaire dans le reporting des données voire quasiment du temps réel », justifie-t-il. Pour ce faire, Absolut Sensing mène un consortium sur un appel à projets de France 2030, notamment composé du groupe Total Énergies et CS Group, afin de mettre au point ce futur service à destination du secteur privé.

« L'idée est d'être capable, à partir de notre de système de mesure hybride des émissions de gaz à effet de serre, de leur fournir un système de messagerie et d'alerte en quasi temps réel pour être capable de détecter par exemple une fuite sur une plateforme pétrolière. Par ailleurs, l'ambition est de leur délivrer en direct les rejets de polluants de l'ensemble de leurs implantations industrielles ou d'un site donné », présente Tristan Laurent.

Avec cet appel à projet en cours d'instruction, l'idée est d'offrir un service commercial aux industriels, mais aussi aux assureurs et surtout aux banques d'affaires et autres acteurs financiers qui veulent connaître l'empreinte environnementale de leur portefeuille d'actifs.

En cas de succès sur cette procédure, Absolut Sensing envisage la réalisation assez rapide d'une seconde levée de fonds pour accélérer le déploiement de ce service commercial, qui viendra alors compléter la première offre dédiée aux régulateurs. « L'ensemble de notre projet nécessite un investissement de 50 millions d'euros », projette le CEO, donnant ainsi le gap à combler.

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