Ils s'appellent Eurécia, Lyra Network, Septeo ou Val Software. Ces éditeurs de logiciels ont connu en quelques années un développement exponentiel. D'après une étude menée auprès d'une trentaine d'entre eux par la Cabinet EY en partenariat avec le cluster Digital113 et le Syntec numérique, les éditeurs de l'Occitanie ont connu une croissance de leur chiffre d'affaires de 22% entre 2015 et 2017.

Et ce n'est qu'une moyenne. Fondée en 2006 à Castanet-Tolosan, au sud-est de Toulouse, l'entreprise Eurécia s'est spécialisée dans des solutions logicielles pour la gestion RH des entreprises de type PME et ETI (notes de frais, plannings, congés...).

"Sur les cinq dernières années, notre chiffre d'affaires a été multiplié par quatre, et en deux ans la progression est de +75%. Notre chiffre d'affaires en 2019 devrait croître encore de 35% pour passer de 3,8 à 5 millions d'euros. Nous prévoyons de recruter 20 personnes cette année", explique Pascal Grémiaux fondateur d'Eurécia.

Même constat chez ses confrères. Par exemple, Anton Bielakoff à la tête de Lyra Network, spécialiste de la sécurisation des opérations monétiques et des paiements en e-commerce, prévoit de passer de "60 à 70 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2019 et de recruter 40 personnes". À noter que la société implantée à Labège compte déjà aujourd'hui 170 collaborateurs. Du côté de Val Software, PME basée à Blagnac et axée sur les solutions logicielles pour les acteurs de la formation, son PDG, Alain Rabary, a besoin d'embaucher 38 personnes alors que l'effectif est aujourd'hui de 67 salariés.

Des difficultés de recrutement

D'après l'étude EY, les éditeurs de logiciels en Occitanie employaient 3 500 personnes en 2017 (soit une croissance 14% en deux ans). Mais 85% des personnes interrogées, observent des difficultés de recrutement.

Plusieurs facteurs peuvent expliquer ces freins à l'embauche. Premièrement, l'Occitanie tout comme le reste de la France est touchée par une pénurie d'ingénieurs et de développeurs. Selon l'enquête EY, 76% des éditeurs de la région recherchent des développeurs. Autant dire que la demande est largement supérieure à l'offre. "Les 17 écoles à Toulouse qui forment à ces métiers ne suffisent pas à couvrir les besoins. C'est la même situation à Paris. Quelques établissements ont vu le jour comme l'école 42 ou le Wagon mais cela ne suffit pas", relève Pierre-Alexandre Feuillet, auteur de l'étude EY.

À cette pénurie s'ajoute aussi la concurrence d'autres acteurs de la filière. Pierre-Alexandre Feuillet remarque que depuis quelques années les grands groupes informatiques (Microsoft, IBM..) n'arrivent plus à recruter des collaborateurs à Paris, ces derniers préférant travaillant dans les grandes métropoles avec un meilleur cadre de vie. Par conséquent, ces grands groupes ont installé des antennes dans les grandes métropoles régionales, ce qui tarit encore plus le vivier de talents pour les éditeurs de logiciels. D'autant que dans le même temps, les ESN (entreprises de services numériques) comme CGI ou Alten ont énormément recruté.

"Nous sommes encore peu connus. Nous devons travailler notre marque employeur", pointe Alain Rabary. Pour remédier à cette méconnaissance des métiers notamment dans le logiciel, le cluster Digital 113 (né de la fusion de DigitalPlace et de FrenchSouthDigital) a travaillé avec le Syntec sur la plateforme Lien numérique . "Au lieu de partir d'une fiche de poste, on part d'un problème du quotidien pour expliquer comment les métiers du numérique ont une utilité dans la société", avance Amélie Leclercq, directrice générale de Digital 113. Enfin, Alain Rabary relève que "dans les filières informatiques, la part des filles est passée en 20 ans de 35 à 20%" et que ce manque de féminisation freine aussi l'accroissement du vivier de talents.

Des éditeurs peu présents à l'international

Au-delà du recrutement, le dernier enseignement de l'enquête est que les éditeurs de logiciels d'Occitanie sont encore peu implantés à l'étranger.

"92% de leur chiffre d'affaires est réalisé en France. Le constat est le même sur le reste du territoire. Seules des entreprises comme Criteo (qui réalise près de 2 milliards de chiffres d'affaires, ndlr) ont plus de 90% de leur activité hors de l'Hexagone. Les entreprises de moins de 50 millions d'euros de chiffres d'affaires sont très ancrées nationalement", note Pierre-Alexandre Feuillet.

Les éditeurs occitans de logiciels ont donc de nouvelles parts de marché à aller chercher en dehors du territoire français, mais là encore cela ne pourra se faire sans recrutement.