Face à la crise sanitaire, qui se transforme en crise économique, l'avionneur européen Airbus a annoncé (pour le moment) une réduction de ses cadences de production de 33% et la suspension voire la suppression d'investissements "non essentiels". Parmi eux, la transformation de la ligne de production de l'A380 à Toulouse en atelier d'A321 contre environ 250 millions d'euros.
Comme l'a démontré La Tribune dans une enquête, ces décisions du grand donneur d'ordre inquiètent toute la supply chain aéronautique, qui compte plus de 70 000 emplois rien que sur le territoire de Toulouse Métropole. Plusieurs sous-traitants de rang 1, 2 et 3 craignent ainsi de devoir couper dans leurs effectifs pour s'ajuster aux cadences des avionneurs du monde entier. Alors pour tenter de soutenir la filière qui a donné à Toulouse une renommée mondiale, la Région Occitanie vient d'annoncer son intention de mettre sur pied un "contrat de filière spécifique" pour surmonter cet épisode de Covid-19, tout comme pour les filières de la viticulture et du thermalisme qui bénéficieront d'un dispositif similaire.
"Pour aider le tissu de la sous-traitance dans le secteur aéronautique, la Région Occitanie va mettre en place un Plan Ader exceptionnel. Il comprendra notamment un volet très important sur la formation, reprenant le dispositif 'Former plutôt que licencier', car nous voulons faire en sorte que ces compétences restent sur notre territoire. Ainsi, nous pourrons mobiliser des moyens très importants avec le Pole Emploi à ce sujet", a annoncé Carole Delga, la présidente du Conseil régional d'Occitanie, mercredi 29 avril.
En soit, ce dispositif de soutien à la sous-traitance aéronautique n'est pas nouveau. Par le passé, la filière a déjà bénéficié de quatre plans Ader pour accompagner les sous-traitants dans l'innovation et la montée en cadence. Le dernier en date, le plan Ader IV, doté de 200 millions d'euros, devait s'achever en 2021. Que va-t-il devenir ? Les fonds restants qui lui étaient destinés vont-ils être injectés dans ce nouveau plan ?
Un montant encore à définir
Des questions encore sans réponse pour le moment. De plus, aucun budget total n'a encore été dévoilé. Mais si la présidente de la Région Occitanie, Carole Delga, évoque un plan "exceptionnel", la filière pourrait alors bénéficier d'un plan d'aide bien plus important que le dernier en date.
"Pour le moment, les moyens financiers ne sont pas déterminés. Nous sommes en train de les construire. Nous espérons y injecter des fonds européens. Mais je peux dire que ce plan s'étalera sur une durée de 24 à 36 mois", précise la socialiste.
Pour éclaircir ces zones d'ombre, l'élue régionale et ancienne ministre doit avoir une réunion au cours de la semaine du 4 mai avec le Gifas, le Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales. Une réunion qu'elle a obtenu en tant que représentante des Conseils régionaux sur les questions aéronautiques au sein de ce syndicat professionnel présidé par Éric Trappier.
Les élus locaux interpellent le gouvernement sur le besoin d'un plan de soutien plus vaste
Par ailleurs, en plus de cette action au niveau régional grâce à sa compétence sur le développement économique, la Région Occitanie et sa présidente attendent un plan de soutien européen pour les filières de l'aéronautique et automobile.
"J'ai interpelé le président de la République et je réitère ma demande portant sur un plan européen de soutien à ces filières, qui ont besoin d'un gros coup de pouce", a-t-elle fait savoir lors d'une visio-conférence organisée le 29 avril.
Avant Carole Delga, d'autres élus de la sphère toulousaine se sont manifestés en ce sens ces derniers jours. Parmi eux, le maire de Toulouse et président de Toulouse Métropole, Jean-Luc Moudenc. Ce dernier a ainsi adressé le 27 avril un courrier au ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, qu'il a rendu public.
"Dans le cadre du plan de relance économique actuellement en préparation auprès du gouvernement, il faut renforcer la souveraineté industrielle et technologique du secteur aéronautique et spatial, emblématique de l'économie toulousaine. Nous devons garantir le leadership des fleurons de l'industrie française et européenne basés sur notre territoire. La mise en œuvre de leviers puissants est attendue pour un soutien financier immédiat à ces filières. Il faut notamment engager les investissements nécessaires pour un nouveau programme aéronautique majeur. Je serai vigilant, en particulier, afin que ces mesures de relance se concentrent notamment vers les petites et moyennes entreprises de la filière aéronautique et spatiale, qui sont majoritaires dans le secteur", a expliqué l'élu, président de France Urbaine, pour justifier sa démarche.
Selon plusieurs experts du secteur, plusieurs dizaines de milliers d'emplois de la filière et localisés dans la région toulousaine sont menacés à terme par la chute du trafic aérien, qui met en difficulté les compagnies et les constructeurs d'avions.
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