Guerre en Ukraine : Global Smart Rescue peaufine son boîtier de détection des catastrophes

Le Toulousain Global Smart Rescue développe un boîtier capable de transmettre des données environnementales par satellite afin de prévenir ou maîtriser les catastrophes notamment lorsque les réseaux terrestres sont endommagés. L'innovation a déjà été testée lors d'opérations humanitaires au Liban ou plus récemment au début de la guerre en Ukraine et devrait être industrialisée dès 2023.
Le boîtier de Global Smart Rescue a été testé dès mars dernier en Ukraine.
Le boîtier de Global Smart Rescue a été testé dès mars dernier en Ukraine. (Crédits : STRINGER)

C'était il y a près de deux ans. En octobre 2020, la tempête Alex balaie la vallée de la Roya dans le Parc national du Mercantour (Alpes-Maritimes). Des ponts sont détruits, limitant les déplacements des habitants qui se retrouvent également privés d'eau et l'électricité. "Des villages ont été coupés du monde physiquement et aussi au niveau des télécommunications. Pendant plusieurs jours, aucune communication n'était possible. Notre solution permettrait de garder le contact dans ce type de catastrophe", fait valoir Henri Delattre, PDG de Global Smart Rescue.

Fondée en 2019 à Toulouse, la startup développe un boîtier capable de transmettre des données environnementales par satellite afin de prévenir ou maîtriser les catastrophes notamment lorsque les réseaux terrestres sont endommagés.

À l'origine du projet, Bertrand Massat (aujourd'hui directeur technique de la société) a survécu à l'ouragan Hugo (qui a sévi en Guadeloupe en 1989) et connaît très bien les conséquences dévastatrices des catastrophes naturelles. Lorsque la mairie de New York lance un appel à idées pour améliorer leur gestion des secours en ayant une remontée d'informations provenant du terrain, l'homme prévient son ami Thierry Fayard, actuellement chercheur au CNES, qui conçoit une solution technique innovante et en dépose le brevet. Henri Delattre, qui est détenteur d'une société de négoce d'or d'investissement, est contacté par Thierry Fayard pour investir 100.000 euros dans le capital de l'entreprise et cofonder ce qui deviendra Global Smart Rescue. La BPI a également financé le développement du projet à hauteur de 118.000 euros en début d'année 2021.

Neuf capteurs environnementaux

Ensemble, ils mettent au point la LAB (Little Alert Box), un boîtier capable de transmettre des éléments avant, pendant, et après une catastrophe à partir de neuf capteurs de données environnementales : un détecteur de sons, un détecteur infrarouge, un détecteur de gaz, un détecteur de fumée, un détecteur de lumière, un capteur de pression atmosphérique, un capteur d'humidité, un capteur de température et un dispositif de géolocalisation GNSS.

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Le boîtier est équipé de neuf capteurs de données environnementales. (Crédits : Global Smart Rescue)

En cas d'incident, une intelligence artificielle prévient le détenteur des 'boîtes' et parvient dans la plupart des cas à deviner le type d'événement en cours.

"Si la température extérieure augmente brusquement en l'espace d'une minute et que notre système détecte aussi une augmentation de la pression et des composés organiques volatils (COV), il est possible de dire tout de suite qu'il y a eu une explosion, suivi d'un incendie ou inversement", illustre Henri Delattre.

Limiter l'impact des catastrophes

Les données transitent par satellite, un internet plus résilient que les réseaux terrestres en cas de catastrophe naturelle et qui pourrait apporter des informations précieuses aux secours pour intervenir plus efficacement.

"Quand les communications terrestres sont coupées, les secours ne savent pas ce qu'il se passe et comment prioriser leurs interventions. Les personnes sur place, les autorités locales ou les particuliers, ne peuvent pas remonter des informations d'urgence. L'IOT satellite permet de garder ce contact pour faire transiter des alertes humaines ou redescendre des consignes des autorités. Par exemple, un maire peut envoyer un court message, de la taille d'un tweet pour dire 'j'ai trois personnes en urgence absolue'. Les données issues des paramètres environnementaux peuvent, si elles sont gérées intelligemment, permettre de vraiment d'optimiser la réponse des secours et de limiter l'impact de la catastrophe", estime le PDG de Global Smart Rescue.

Aujourd'hui, les données transitent via le système de l'Américain Irridium mais demain l'arrivée en orbite de nouvelles constellations IOT à l'instar de la française Kinéis pourrait abaisser le coût d'accès à ce type de service. "En utilisant des constellations de type Kinéis, nos solutions seront beaucoup moins chères. L'objectif c'est d'atteindre un prix de 300 euros pour le boîtier. L'autre intérêt de Kinéis est qu'il s'agit d'une constellation française donc cela répond à un enjeu de souveraineté", poursuit l'entrepreneur.

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Le boîtier qui dispose d'un réseau GSM intégré pourra devenir une antenne relais en cas de destruction des réseaux téléphoniques. Les survivants d'une catastrophe pourront ainsi s'y connecter (de façon active ou passive) afin de signaler leur localisation aux secours ou pour recevoir des informations gouvernementales.

Global Smart Rescue a déjà pu tester son boîtier au Liban en octobre 2021 et au début de la guerre en Ukraine dès mars 2022 via les pompiers du Groupe de secours catastrophe français, une ONG réalisant du sauvetage et apportant de la logistique lors de crises humanitaires.

"Nous avons équipé les véhicules du GSCF de deux de nos boîtiers pour suivre leur position, garder le contact par satellite mais surtout sécuriser leurs interventions. Au début de la guerre, c'était très risqué de se rendre en Ukraine. Si nous perdions leur contact, nous aurions été en mesure d'alerter les autorités françaises. Nous avons eu beaucoup de retours positifs sur notre innovation. Cette expérimentation nous a aussi permis de soulever des points d'amélioration comme par exemple le fait de s'équiper de batteries adaptées au grand froid", indique Henri Delattre.

Le boîtier devrait être testé dès le mois de septembre par les pompiers du Sdis de Haute-Garonne. Il sera industrialisé dans le courant de l'année 2023.

Par ailleurs, la société a adoptée une technologie militaire pour mettre au point un appareil de haute technologie capable de contacter le téléphone de victimes coincées sous un effondrement même quand les réseaux terrestres sont hors service. "Un tel équipement coûte 300.000 euros. L'idée serait que Global Smart Rescue dispose de quatre ou cinq centres en France pour intervenir sur demande en moins de trois heures avec cet appareil pour localiser les téléphones encore allumés et faciliter le contact avec les secours", ajoute-t-il.

Global Smart Rescue commence également à commercialiser un module à intégrer aux équipements opérables à distance pour assurer un suivi y compris dans les zones blanches grâce aux liaisons satellites. "Dans les gazoducs ou les oléoducs, les industriels doivent parfois envoyer un technicien sur place alors que notre système est capable par exemple de relancer le système informatique d'un appareil ou d'engendrer une coupure d'urgence sans même se déplacer", explique Henri Delattre. Un partenariat vient d'être signé avec une école d'ingénieurs au Burkina Faso pour déployer la technologie en Afrique où il reste encore beaucoup de zones blanches.

La jeune société de neuf salariés escompte un chiffre d'affaires entre 200.000 et 500.000 euros en 2023 et prévoit une forte croissance dans les cinq années à venir face à une "explosion des besoins en sécurité civile et en sûreté sur les nouvelles technologies". Elle travaille actuellement sur une levée de fonds d'au moins un million d'euros pour faciliter l'industrialisation de ses produits.

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