VoltAero : l'avion hybride-électrique d'un ancien d'Airbus bientôt visible à Toulouse

Imaginé par l'ancien directeur innovation d'Airbus, Jean Botti, l'avion hybride Cassio de la startup VoltAero va se poser sur l'aéroport Toulouse-Francazal le 10 juillet. La société développe des avions de quatre à dix places capables de voler en 100% électrique sur 200 km et de faire appel au-delà à des moteurs thermiques. La mise en service commerciale est prévue fin 2023 avec une capacité à terme de 150 avions produits par an.
Le démonstrateur Cassio va atterrir à l'aéroport Toulouse-Francazal le 10 juillet prochain.
Le démonstrateur Cassio va atterrir à l'aéroport Toulouse-Francazal le 10 juillet prochain. (Crédits : VoltAero / Jean-Marie Urlacher)

Le marché de la décarbonation de l'aviation est en pleine effervescence depuis quelques mois. Airbus a fait grand bruit en septembre dernier en dévoilant trois concepts d'avions à hydrogène avec l'ambition de faire voler un avion d'au moins 100 places totalement décarboné d'ici à 2035Aura Aéro s'est fixé pour objectif de faire voler un avion de transport régional électrique de 19 places fin 2026, etc.

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Aux manettes du programme E-Fan

Jean Botti fait figure de pionnier en la matière. Membre du Comex d'Airbus pendant dix ans et ancien directeur général délégué technologie et innovation d'Airbus Group, il fait partie de ceux qui ont imaginé l'avion électrique dès les années 2000.

"Nous avons fait voler au salon du Bourget en 2011 un Cricri de 20 kilowatts de puissance. En 2015, l'E-Fan, un avion à propulsion électrique doté de 60 kilowatts, réalise un vol historique en parvenant à traverser la Manche", se remémore-t-il.

Mais en 2017, alors qu'Airbus décide d'arrêter les recherches sur un avion tout-électrique pour se concentrer sur une solution hybride baptisée E-Fan X (projet lui-même stoppé au printemps 2020), Jean Botti quitte le groupe pour fonder sa propre société VoltAero et développer la gamme d'avions hydrides électriques Cassio.

"Avec l'E-Fan, nous étions trop en avance et puis nous aurions dû créer une société à part beaucoup plus légère et agile que la grosse machine Airbus. Mais cela a permis de créer VoltAero. Le premier vol du Cassio a été réalisé en octobre 2020 et depuis une centaine de vols ont été effectués. Cet appareil est doté de 600 kW, autrement dit il est trente fois plus puissant que le CriCri et dix fois plus puissant que l'E-Fan. Il s'agit vraiment un saut technologique", salue le dirigeant de VoltAero.

L'aviation hybride pour désenclaver les régions ?

Après une première présentation au public mi-juin à Lyon lors du salon France Air Expo, le démonstrateur Cassio réalisera la semaine prochaine un tour de France dans onze aéroports régionaux. L'avion hydride-électrique se posera à l'aéroport de Toulouse-Francazal le 10 juillet après-midi et en repartira le lendemain matin. Des aéroports régionaux qui constituent la zone de chalandise du Cassio.

"En Europe, vous avez 43 aéroports sur 2.570 qui trustent pratiquement tout le volume de passagers. Notre idée, c'est de mieux utiliser les infrastructures existantes et de désenclaver les régions avec cette aviation régionale verte en point-à-point. Tout ne peut pas se faire en TGV. Il existe des liaisons qui restent extrêmement complexes et coûteuses en train, je pense aux transversales Bordeaux-Strasbourg, Nantes-Strasbourg, etc", développe Jean Botti.

Avant d'ajouter :

 Avec le Cassio, il sera possible de faire toutes les distances inférieures à 200 km en tout-électrique. Sur un trajet de 200 à 600 km, l'hybride léger permettra de réaliser 30% d'économies d'énergie. En hybride lourde de 600 à 1.200 km, 8% d'économies d'énergie sont accomplies. Et dans tous les cas, les décollages et atterrissages se font en électrique. Avec cette aviation verte, les coûts d'exploitation sont plus faibles. Chaque vol peut transporter jusqu'à 10 passagers et il est possible de réaliser plus de rotations parce que nos avions coûtent nettement moins cher que des ATR ou des Airbus."

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Dans le détail, VoltAéro planche sur trois concepts d'avions : le Cassio 330 (comme 330 kilowatts) disposant de quatre places, le Cassio 480 doté de six places et enfin le Cassio 600 (avec 600 kilowatts de puissance) qui pourra emmener dix passagers. La mise en production de la première version du Cassio est attendue fin 2023 avant le lancement des deux autres versions qui devrait s'échelonner jusqu'en 2026. 

voltaero cassio

Version commerciale du Cassio (Crédits : VoltAero).

Une cinquantaine d'appareils commandés

Et l'entreprise a déjà engrangé des lettres d'intention portant sur une cinquantaine d'appareils. VoltAero a officialisé il y a quelques jours à Montpellier la signature d'un accord avec Airways Aviation pour développer des liaisons aériennes régulières et à la demande dans le sud de la France et utiliser ces aéronefs pour de la formation de pilotes. VoltAero a également signé avec la compagnie Finistair qui réalise des vols entre Brest et l'île de Ouessant. À l'étranger, la société a engrangé une commande de Kinectair aux États-Unis et d'une vingtaine d'avions en Thaïlande. D'autres annonces pourraient intervenir après la présentation du Cassio au mois de juillet à Oshkosh (Etats-Unis), où se tient le plus grand salon aéronautique mondial.

"Nous ne visons pas forcément la formation de pilotes avec des petits avions de 60 kilowatts sur le modèle du biplaces de Pipistrel. Notre cible, c'est plutôt la petite aviation commerciale régionale, les particuliers qui volent sur tout le marché US et asiatique. Le Cassio pourra aussi transporter des bien avec un avion à la carte puisqu'il est possible d'enlever les sièges et de n'avoir qu'un pilote pour faire transiter des colis. Cela pourrait permettre de véhiculer par exemple entre Brest et Ouessant les envois de La Poste et toutes sortes de biens dans les îles. Et puis, il existe un usage sanitaire, notre appareil quatre places étant capable de transporter un fauteuil roulant et celui de six places un voire deux brancards lors d'une évacuation", complète Jean Botti.

Et quand on l'interroge sur la concurrence naissante dans l'aviation électrique avec par exemple les annonces du Toulousain Aura Aéro sur un avion électrique de 19 places, il répond : "La concurrence aujourd'hui vient principalement des Etats-Unis. Des avions électriques qui volent aujourd'hui avec des passagers à bord, il n'y en a pas en France."

À terme, VoltAero projette des cadences de 150 avions par an fabriqués en Nouvelle-Aquitaine, dans le secteur de Royan où la société a pris ses quartiers. Pour le marché US et asiatique, l'entreprise mise sur la vente de licence et de la fabrication délocalisée sur place. Le projet a bénéficié de trois millions d'euros de la région Nouvelle-Aquitaine et a été lauréat du Green Deal européen qui lui a valu 2,1 millions d'euros de subventions et qui pourrait lui permettre de lever 22 millions d'euros en equity (dont 11 millions de l'Europe) d'ici la fin de l'année.

La jeune pousse emploie actuellement 23 salariés mais a développé également des collaborations avec Safran et Sonaca si bien qu'au total une soixantaine de personnes travaillent au développement de Cassio. Le chef d'entreprise espère arriver à une centaine de collaborateurs fin 2022. Membre du pôle de compétitivité Aerospace Valley, VoltAero n'écarte pas de futures collaborations avec les fournisseurs toulousains pour l'industrialisation de Cassio.

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