"Une course mondiale s'est lancée sur l'électrification de l'aviation et nous sommes convaincus que nous sommes au meilleur endroit sur Terre pour le faire", lance Jérémy Caussade, président de Aura Aéro. Le constructeur aéronautique toulousain a inauguré ce lundi 22 mars sa première ligne d'assemblage au coeur du hangar HM7 de l'aéroport de Francazal.
La jeune société a vu le jour durant l'été 2018 sous l'impulsion de Jérémy Caussade (ancien d'Airbus) et de ses deux associés, Fabien Raison (ex-Airbus) et Wilfried Dufaud (ex-Assystem), rencontrés par le biais de Réplic'Air, une association chargée de reconstruire des avions anciens.
Positionné dans un premier temps sur les avions de voltige biplaces, Aura Aéro a connu ces derniers mois une grande accélération de ses projets. En juillet 2020, la société a réalisé un premier vol pour le premier appareil de sa gamme, Intégral R. Cet avion de voltige vise à couvrir les besoins de formation des pilotes professionnels civils ou militaires ainsi que le marché de pilotes propriétaires. L'été prochain, ce sera au tour d'Intégral S, une variante à train tricycle plus adaptée aux écoles de formation, de voler pour la première fois. Et puis en 2022, Aura Aéro prévoit de faire voler Intégral E, une version électrique de ses biplaces. La société a déjà engrangé sept commandes fermes d'avions Intégral (vendus à partir de 300.000 euros pièce) auprès de clubs (Midi-Pyrénées Voltige et Dijon Voltige).
L'avion de voltige Intégral R a réalisé son premier vol en juillet 2020 (Crédits : Rémi Benoit).
Jusqu'à 400 km en 100% électrique
Mais la jeune pousse prépare déjà l'étape supérieure. Aura Aéro planche sur ERA (electric regional aircraft), un avion de transport régional de 19 places à propulsion électrique dont le premier vol est attendu en 2024 et la mise en service programmée fin 2026.
Aura Aéro planche sur un avion de transport régional électrique de 19 places (Crédits : Rémi Benoit).
"ERA aura la possibilité de réaliser plusieurs missions. Premièrement, des vols de moins de 400 kilomètres 100% électrique. Pour les missions plus longues, l'avion fera appel à son turbogénérateur avec tout de même une réduction significative des émissions carbones de l'appareil (80% de réduction de CO2 sur un vol de 400 à 800 km d'après la société, ndlr)", décrit Jérémy Caussade.
L'aéronef pèsera environ huit tonnes et s'adressera au marché des vols domestiques. "Nos clients seront les compagnies aériennes, des opérateurs air-taxi, de grands logisticiens. Nous pourrons réaliser du transport de point à point, des liaisons régionales mais également de l'air-taxi. Il existe une quantité de lignes transversales en France qui sont un enfer en matière de mobilité", estime le dirigeant. Aura Aéro sera par exemple en mesure de réaliser un vol 100% électrique sur une ligne transversale Toulouse-Lyon (360 km à vol d'oiseau).
Cinq compagnies aériennes et opérateurs air-taxi se sont déjà montrés intéressés et pourraient détacher certains de leurs salariés pour accélérer le développement de l'avion. Aura Aéro travaille également en lien étroit avec les acteurs du transport régional. Côté production, les éléments des batteries d'avions seront fabriqués à Grenoble au sein de la gigafactory de Verkor et Aura Aéro se chargera de les assembler.
30 avions par an en 2022
À Francazal, le constructeur toulousain occupe 3.500 m2, soit la majeure partie du hangar et commence la production en série des avions de voltige biplaces. "Plus on s'approche des portes du hangar, plus les avions sont finis. Plus on s'en éloigne, plus sont disposés des éléments voire des pièces des aéronefs", décrit Jérémy Caussade, En octobre 2020, Aura Aéro a racheté Air Menuiserie, une entreprise normande qui fabrique la structure en bois carbone de ses aéronefs. Pour le moment, le site normand livre des aérostructures complètes pour les avions mais l'objectif est de réaliser à l'avenir le maximum de la fabrication à Toulouse.
Aura Aéro mise sur des pièces en bois carbone (Crédits : Rémi Benoit).
"À leur arrivée, les pièces en bois carbone passeront par l'atelier menuiserie où nous ferons le collage du fuselage, de la voilure. L'étape suivante sera le prééquipement de la voilure et du fuselage (installation de l'électricité, de la lumière). Ensuite, nous ferons la jonction voilure fuselage pour former un avion. Puis, nous viendrons équiper le moteur avec ses capteurs préparés dans l'atelier électrique ainsi que l'équipement de la planche de bord équipé, du ponton central et de tous les différents des derniers éléments électriques, avioniques. Et enfin, l'avion pourra passer aux essais en vol", poursuit le cofondateur d'Aura Aéro.
Objectif : sortir une quinzaine d'avions dès 2021, puis 30 aéronefs en 2022 avec une cadence qui pourrait culminer à 50 appareils par an à terme.
L'atelier électrique s'appuie sur des outils numériques (Crédits : Rémi Benoit).
Une centaine de collaborateurs fin 2021
Pour réaliser tous ces projets, Aura Aéro a déjà bouclé une levée de fonds de série A (moins de 10 millions d'euros) et projette à l'été de réaliser un tour de table de série B (10 à 40 millions d'euros). La société a également bénéficié d'un soutien important de la région Occitanie (1,3 million d'euros depuis la création de l'entreprise). Une enveloppe de trois à cinq millions d'euros supplémentaires est prévue pour l'avion électrique de 19 places. Aura Aéro est passée de deux à 50 salariés depuis janvier 2020 et vise une centaine de collaborateurs fin 2021.
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