Le vaccin contre les cancers ORL développé à Toulouse confirme ses promesses

Éviter les rechutes suite à des cancers ORL, c'est toute l'ambition du vaccin développé à Toulouse par l'Oncopole, en collaboration avec la biotech Transgene. À partir d'une technologie d'intelligence artificielle, les chercheurs sont parvenus à développer un vaccin personnalisé pour chaque malade. La première phase de l'étude clinique, qui a concerné une cinquantaine de patients dont 15 à Toulouse, a délivré des résultats très prometteurs et laisse place à de bons espoirs pour la phase suivante.
L'Oncopole de Toulouse est au coeur d'une étude clinique mondiale sur un vaccin contre les cancers ORL, qui font souvent l'objet de rechutes.
L'Oncopole de Toulouse est au coeur d'une étude clinique mondiale sur un vaccin contre les cancers ORL, qui font souvent l'objet de rechutes. (Crédits : Oncopole)

C'est une lueur d'espoir pour de nombreux patients. À Toulouse, bastion de l'Oncopole, centre d'excellence mondiale sur l'immunothérapie, un vaccin contre le cancer s'avère prometteur. En l'occurrence, celui-ci agit contre les cancers ORL, autrement dit ceux qui touchent la tête et le cou. « Sur la vingtaine de patients incubés dans le cadre de ce programme, les dix qui ont bénéficié du vaccin n'ont pas rechuté. A contrario, les dix autres patients observés qui n'en ont pas bénéficié ont rechuté », partage le professeur Jean-Pierre Delord, le directeur général de l'Oncopole et le médecin coordinateur de l'essai clinique.

Dans le monde, ils sont officiellement 48 patients intégrés à l'étude (mais tous n'ont pas encore été vaccinés), dont 21 en France et 15 à Toulouse, ville où tout a commencé. Au début de l'année 2021, le professeur Delord fait une première fois couler beaucoup d'encre en annonçant qu'un premier patient de l'Oncopole a bénéficié de ce vaccin contre le cancer. Deux années plus tard, cette première mondiale confirme les espoirs placés en elle : « pour l'instant, aucun des patients vaccinés n'a rechuté. C'est un signal encourageant mais il ne faut pas encore crier victoire », répète le chercheur qui demande de la patience.

« Quand il y a des rechutes sur ces cancers ORL, elles interviennent dans les deux à trois ans après le traitement, dans l'immense majorité d'entre elles. Par ailleurs, les rechutes concernent en moyenne un patient sur deux. Ces cancers sont un problème de santé publique », poursuit le directeur général de l'Oncopole.

Avec de l'intelligence artificielle

Concrètement, ce vaccin contre le cancer sera avant tout thérapeutique, car il agit après le dépistage de la maladie, mais il aura un rôle préventif face aux rechutes. Pour ce faire, l'établissement toulousain s'est associé avec la biotech Transgene, basée dans l'Alsace, pour développer le protocole.

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« Nous sommes dédiés à la recherche contre le cancer. Aujourd'hui nous avons quatre candidats-médicaments à l'essai-clinique, mais ce vaccin est le plus avancé de tous. Il mobilise l'ensemble de nos équipes. Pour développer cette approche personnalisée par patient, nous nous appuyons sur un châssis commun puis nous adaptons certaines molécules pour chaque patient, à partir d'une technologie d'intelligence artificielle », commente Hedi Ben Brahim, le directeur général de Transgene.

Cette intelligence artificielle est développée par le groupe japonais NEC, qui finance en partie cet essai clinique. Grâce à celle-ci, l'objectif est d'identifier une trentaine de mutations de la cellule cancéreuse par rapport à une cellule non-cancéreuse. Par la suite, l'ambition est de faire reconnaître au système immunitaire un antigène (macromolécule permettant le déclenchement d'une réponse immunitaire), qui va servir à protéger les cellules.

Une fois injecté, le traitement et les antigènes qui le composent permettent de réveiller les lymphocytes T présents dans les globules blancs, « comme tueurs » s'amuse à dire le directeur général de l'IUCT-Oncopole, car ce sont eux qui vont tuer les cellules cancérigènes. Ces globules blancs immunisés contre le cancer, car ayant suivi le traitement initial, permettront ainsi de combattre l'apparition de nouvelles cellules cancéreuses et donc d'éviter tout risque de rechute.

« C'est une formidable opportunité pour les patients », témoigne Sabrina Le Bars, co-fondatrice et présidente de l'association Corasso, qui informe et soutient les personnes touchées par un cancer rare de la tête et du cou.

Une phase 2 dans les cartons

Après plus de deux ans de travail et d'observation dans quatre cliniques dans le monde dont une aux États-Unis et en Angleterre, « cette phase clinique touche à son terme », admet Hedi Ben Brahim. L'enjeu pour tous les protagonistes du dossier est désormais de passer à la phase 2, qui devra concerner beaucoup plus de patients, avec l'espoir de bénéficier d'une procédure de mise sur le marché accélérée à terme.

« Notre objectif va être de déterminer les premiers temps de l'immunisation grâce à l'injection du vaccin. L'autre point sera d'identifier les effets de la vaccination. Pour l'instant, ce vaccin est très bien toléré et il n'y a pas d'effet secondaire de plus que ceux que nous faisons dans la vie de tous les jours », analyse le professeur Delord.

Les chercheurs associés au projet réfléchissent ainsi au périmètre de cette nouvelle phase de l'essai clinique qui s'annonce, avec l'espoir d'une mise sur le marché au plus tard dans cinq années.

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