Climat : près de Toulouse, un centre inédit en France pour vivre une inondation en direct

Au sud de Toulouse, la startup Floodframe, inventeur d'un airbag de l'eau pour protéger les maisons des inondations, a ouvert, avec le soutien de la Région Occitanie et l'assureur Allianz, un centre inédit en France pour tester des solutions innovantes face à des intempéries. Avec le changement climatique, la facture des catastrophes naturelles ne cesse de s'alourdir, engageant le débat sur l'assurabilité des biens.
Le centre permet de simuler une inondation pour tester des moyens de protection.
Le centre permet de simuler une inondation pour tester des moyens de protection. (Crédits : Florine Galéron)

Depuis près de dix ans, mis à part une responsabilité civile, Yan Lépineux n'a plus d'assurance pour son camping. Implanté dans le Gers au bord d'une rivière, il a subi 15 inondations en l'espace de 25 ans.

« En 2014, nous avons vécu une importante inondation avec un million d'euros de dégâts et notre assureur (Groupama) a résilié le contrat. Si nous voulions retrouver un contrat aujourd'hui, il faudrait débourser plusieurs dizaines de milliers d'euros par an, sans compter les franchises importantes au moindre dégât, ce qui n'est pas soutenable pour un petit camping qui fait 250.000 euros de chiffre d'affaires », retrace le gérant.

Premier risque naturel en France

Plutôt que de mettre la clé sous la porte, Yan Lépineux se rapproche de startups afin d'expérimenter les dernières innovations pour protéger ses locations. Depuis près de trois ans, un mobile-home et un chalet sont équipés d'une sorte d'airbag placé sous le logement et qui le fait flotter comme une bouée en cas de montée des eaux. Une innovation déployée par la startup FloodFrame, née au Danemark et qui a implantée une filiale en France fin 2021.

« Les inondations sont le premier risque naturel en France et pourtant il n'existe aucune solution normée comme peuvent l'être par exemple les extincteurs pour les incendies. On reste avec les mêmes concepts depuis des millénaires : le sac de sable ou la digue », remarque Rémi Alquier, directeur général de Floodframe.

Lire aussiFloodFrame ouvre une filiale à Toulouse pour protéger le bâti des inondations

A une centaine de kilomètres des locaux de Floodframe, le département voisin de l'Aude a été profondément marqué par de violentes crues en 2018, ayant entraîné la mort de 15 personnes et endommagé plus de 400 maisons lors d'un phénomène de ruissellement intense causé par plus 300 millimètres de pluie qui se sont abattus en seulement dix heures, soit l'équivalent de cinq mois de précipitations.

Quatre centimètres d'eau par minute

D'où l'idée de créer à Baziège, au sud de Toulouse, un centre inédit en France pour tester des solutions innovantes face aux inondations. Le projet de 220.000 euros a été financé à hauteur de 100.000 euros par la région Occitanie, les fonds restants étant apportés par Floodframe, qui bénéficie par ailleurs d'un partenariat avec l'assureur Allianz.

Dans une piscine de béton de 140 m2, un mobil-home équipé du système Floodframe est installé. Soudain, les vannes s'ouvrent et l'eau monte à une vitesse de quatre centimètres par minute. L'airbag se déploie au fil du ruissellement. Une fois, la démonstration terminée, la piscine est vidée et l'eau est réinjectée dans un bassin à proximité.

inondation bassin

 Entre les démonstrations, l'eau réinjectée dans un bassin à proximité. (Crédits : Florine Galéron)

Lire aussiLe Cnes et Météo France lancent une plateforme pour renforcer la résilience face aux inondations

Dans un autre bloc de béton, le site teste la protection d'une oeuvre d'art équipée sous son socle d'un dispositif flottant de Floodframe.

« C'est un véritable enjeu de protéger le patrimoine artistique. Nous avons été contactés par la Ville de Paris pour plusieurs oeuvres installées dans un jardin en bordure de Seine, qui ont été inondées à plusieurs reprises, causant des dégradations », explique Rémi Alquier.

Le centre permet aussi à d'autres startups de mener des expérimentations. C'est le cas, par exemple, de la société Flowstop, lauréate d'un prix au concours Lépine en 2023 pour son dispositif gonflable qui protège les ouvertures (portes, baies vitrées...).

inondation

Le site teste aussi des innovations pour protéger les oeuvres d'art et les ouvertures des habitations. (Crédits : Florine Galéron)

« Il n'y a pas une seule réponse face aux inondations, il faut une complémentarité des solutions », relève Yan Lépineux.

Le gérant teste également dans son camping le dispositif Flowstop pour sa piscine : « Un mur a été construit tout autour de la piscine et le dispositif se positionne au niveau du portillon. En cas d'alerte inondation, on le gonfle en deux minutes et on est protégés ».

Lire aussiRisque climatique sous haute surveillance : les six innovations lancées par Predict Services

« Le nerf de la guerre, c'est le financement »

Mais pour équiper l'ensemble de ses mobil-homes et chalets,« le nerf de la guerre, c'est le financement », ajoute-t-il. L'airbag de Floodframe coûte 500 euros du m2, soit une dizaine de milliers d'euros à débourser pour un seul mobil-home. Pour sa part, le dispositif gonflable de Flowstop coûte entre 600 euros pour une fenêtre et jusqu'à 1.800 euros pièce pour un hangar. Le gérant de camping compte sur des subventions pour financer la moitié des sommes à engager.

Car avec le changement climatique, la facture des catastrophes naturelles ne cesse de s'alourdir, ouvrant un débat sur l'assurabilité des biens. La caisse centrale de réassurance, estime ainsi que pour le péril inondation, le coût moyen annuel devrait augmenter de 15% par an d'ici à 2050 en raison de l'aléa climatique, soit plus de 148 millions d'euros. L'Etat a donc décidé d'augmenter la surprime liée aux catastrophes naturelles au 1er janvier 2025.

« Mais ce n'est pas soutenable dans la durée d'augmenter les cotisations. C'est la raison pour laquelle, nous développons des solutions pour éviter la réalisation des dommages », souligne Pierre Vaysse, directeur assurance de biens et responsabilité au sein d'Allianz.

Une fois les dispositifs normés, Allianz pourrait recommander ces solutions à ses assurés et réduire les primes ou les franchises pour les concitoyens équipés de protections.

Lire aussiVorteX-io décroche 2,5 M€ pour créer le premier service européen de prévision des inondations et des sécheresses

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.