Anniversaire de la mort de Pablo Escobar : un Occitan veut profiter du boom touristique en Colombie

Trente ans jour pour jour après sa mort, le narcotrafiquant Pablo Escobar continue d’attirer des milliers de curieux à Medellín, une ville en pleine mutation économique, comme en témoigne Adrien Bergue, originaire de Prades (Pyrénées Orientales) et ancien étudiant à Toulouse. Avec un ami, le Français a ouvert un guide touristique sur internet dédié à la Colombie. Portrait.
Après leurs études à Toulouse, deux amis ont voulu profiter de l'essor touristique en Colombie.
Après leurs études à Toulouse, deux amis ont voulu profiter de l'essor touristique en Colombie. (Crédits : Adrien Bergue)

C'était le 2 décembre 1993. Réfugié sur le toit de sa maison de Medellín, son fief, Pablo Escobar tombait sous les balles de la police colombienne. Durant deux décennies, le « boss » du cartel de Medellín a contrôlé près de 90% du trafic mondial de cocaïne, amassant des milliards de dollars et faisant des milliers de morts... En 1991, la ville affichait ainsi un taux d'homicides de 375 pour 100 000 habitants, un record.

Aujourd'hui, sa maison, « le Monaco », dans un secteur résidentiel de la ville, tout à côté du quartier à la mode de Laureles, est toujours debout mais rien n'indique que le plus célèbre des narcotrafiquants y a vécu et y a été tué. « Elle a été rachetée par une personne qui y a ouvert une école d'espagnol. C'est d'ailleurs chez elle que j'ai pris mes premiers cours en arrivant à Medellín, sans rien connaître de l'histoire du bâtiment, témoigne Adrien Bergue, trente-quatre ans. On s'est quand même posé des questions quand on a vu tout un tas de voitures s'arrêter en permanence devant la maison. »

Ne pas occulter l'histoire

Né dans le village de Prades, dans les Pyrénées-Orientales, Adrien Bergue est ensuite parti étudier à Toulouse avec à la clé un DUT en génie civil. Avec un ami, il a donc monté en 2018 le site tomplanmytrip.com, sorte de guide touristique interactif sur internet. Le duo se rémunère grâce à des partenaires commerciaux (hébergements, prestataires d'activités, transporteurs...) mis en avant sur le site et qui leur versent une commission.

Le jeune homme partage aujourd'hui sa vie entre la France et la Colombie, où il se rend notamment lors d'intenses périodes de prospection destinées à tester et recruter de nouveaux partenaires. En plus d'afficher ses partenaires et des articles sur la Colombie, le site devrait fournir en 2024 une base d'itinéraires à effectuer dans tout le pays avec un système de filtres pour organiser plus rapidement son séjour. Le duo a choisi de ne pas promouvoir les circuits consacrés à Pablo Escobar. « On n'a pas voulu les mettre en avant, admet le Français, mais après on est toujours dans le dilemme de se dire qu'historiquement, il ne faut pas l'occulter pour que les gens sachent ce qu'il a fait et comment était la vie en Colombie à ce moment-là, mais on n'a pas de partenaire qui fasse ce tour-là en particulier. »

En plus de sa maison, somme toute modeste au vu de la fortune qu'il avait amassée grâce au trafic de cocaïne, les circuits Escobar passent aussi par la « Catedral », l'imposante prison « personnelle » du célèbre baron de la drogue, devenue aujourd'hui un véritable parc d'attraction ouvert à la visite.

« C'est à un moment où il était acculé par le gouvernement colombien et par les États-Unis, explique Adrien Bergue. Il a voulu montrer patte blanche en se construisant lui-même sa propre prison, mais il y vivait plutôt bien et continuait ses affaires ! »

Le Français reconnaît donc que le mythe reste vivace, même si « dans le pays, au vu des habitants, il n'a pas une bonne image. Il n'occupe pas une place de choix dans le cœur des Colombiens, ce qui se comprend. Il a quand même fait beaucoup de dégâts. Les gens essaient plutôt d'oublier cette période et ce passé. Ce sont les séries TV sur les plateformes comme « Narcos » qui ont relancé cet engouement. » En novembre 2023, le parquet général colombien annonçait la saisie d'une propriété ayant appartenu à Pablo Escobar, où vivait aujourd'hui son frère et où a été découvert un musée clandestin rempli d'objets ayant appartenu ou rendant hommage au célèbre défunt baron de la drogue.

Paradis pour nomades numériques

La métamorphose de Medellín date de la fin des années 2000. « Aujourd'hui, le quartier emblématique, c'est Comuna 13, l'ancien quartier San Javier, détaille Adrien Bergue. C'était vraiment la plaque tournante du trafic de drogue avec des enlèvements, des meurtres et des extorsions au quotidien. Depuis quelques années, il s'est apaisé et le street art et le hip hop ont remplacé les gangs. Les autorités colombiennes essaient de l'ouvrir aux touristes. » Le succès, lui, est au rendez-vous. Medellín a attiré l'an dernier 1,4 million de touristes étrangers, principalement américains, soit pour la première fois davantage que sa rivale Carthagène, construite sur la côte caraïbe et jusqu'à présent le spot le plus visité de Colombie. Medellín se métamorphose et attire aujourd'hui aussi les nomades numériques, ces jeunes étrangers en sac à dos qui travaillent en général pour des startups, de n'importe où sur la planète à condition d'avoir une bonne connexion internet... et du soleil !

« À Medellín, la vie ici est moins chère qu'ailleurs, grâce à un peso, la monnaie locale, extrêmement bas, assure Adrien Bergue. Aujourd'hui, il y a beaucoup de restaurants et de bars où sortir le soir comme dans le quartier de Poblado. Ça offre pas mal de possibilités à des personnes qui voudraient rester un peu plus longtemps et travailler en ligne. »

Perchée à 1 500 mètres d'altitude, l'altitude idéale pour profiter de la chaleur la journée et de la fraîcheur le soir, Medellín est surnommée la ville de l'éternel printemps. La communauté de travailleurs à distance Nomad List classe d'ailleurs la métropole colombienne comme la troisième destination d'Amérique latine, juste après Buenos Aires et Mexico. Revers de la médaille pour les Colombiens, les prix de l'immobilier explosent et les locations de courte et moyenne durée type Airbnb se multiplient, poussant toujours un peu plus loin les habitants du centre-ville. Ainsi, certains loyers ont augmenté de 80 % durant les premiers mois de 2023.

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