Blue Spirit Aero vise fin 2024 pour le premier vol de son avion à hydrogène de quatre places

Fondée par un ancien cadre de Dassault, la jeune société Blue Spirit Aero a déjà franchi des étapes-clés dans le développement de son avion à hydrogène de quatre places qui a la particularité de miser sur une propulsion distribuée de douze moteurs. Grâce au soutien de France 2030, la société va pouvoir produire un premier prototype d'aéronef appelé à voler d'ici fin 2024 pour une mise en service attendue fin 2026.
Blue Spirit Aero expose au salon du Bourget une version taille réelle de la cabine de son avion zéro émission Dragonfly.
Blue Spirit Aero expose au salon du Bourget une version taille réelle de la cabine de son avion zéro émission Dragonfly. (Crédits : Florine Galéron)

Qui remportera la bataille des petits avions à hydrogène ? Le projet d'Airbus de faire voler un avion régional à hydrogène d'ici à 2035 a entraîné dans son sillage l'émergence d'une poignée de projets de petits aéronefs électriques, hybrides ou à hydrogène. Alors que le Toulousain Beyond Aero a profité du premier jour du Salon du Bourget pour diffuser une vidéo de son futur avion d'affaires à hydrogène de 4 à 8 places, 100 mètres plus loin, Blue Spirit Aero expose une version taille réelle de la cabine de son avion zéro émission Dragonfly.

25 ans d'expérience dans l'hydrogène

L'aéronef a la particularité de disposer de douze moteurs (six sous chaque aile) en misant sur une propulsion électrique distribuée.

« Mes 25 ans d'expérience m'ont permis d'imaginer l'avion idéal. Plutôt que d'avoir un seul moteur électrique alimenté par une grande pile à combustible qui reçoit l'hydrogène, j'ai préféré immédiatement répartir la propulsion sous la forme de douze petits moteurs dispatchés sur les deux ailes de l'aéronef. Ce design renforce la robustesse de l'appareil face à la panne. L'avion peut continuer à voler avec jusqu'à huit moteurs sur douze en panne. Ensuite, l'avantage de la pile à combustible est de fournir trois fois plus d'énergie qu'une batterie. Cela permettra à notre appareil de voler 700 kilomètres à 230 km/h avec autrement dit près de trois heures d'autonomie, soit beaucoup plus que de petits avions électriques alimentés par des batteries », détaille Olivier Savin, fondateur de Blue Spirit Aero.

L'entrepreneur fait figure de pionnier dans ce domaine. Dès les années 90, ce diplômé de Supaéro a travaillé au sein de Honeywell aux États-Unis pour le remplacement de la pile à combustible de la navette spatiale mais aussi sur des projets d'avions solaires. De retour en France au début des années 2000, il a rejoint le groupe Dassault Aviation dans lequel il a mené là encore plusieurs projets hydrogène. Une expertise qui le conduit à devenir chairman du groupe de travail international sur la standardisation des solutions piles à combustible et hydrogène. En 2020, il quitte Dassault pour créer Blue Spirit Aero.

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Jumeau numérique et test de la pile à combustible

Trois ans après sa création, la jeune société a déjà franchi des étapes-clés de développement. Blue Spirit Aero a d'abord réalisé un jumeau numérique, autrement dit une représentation totalement fidèle de l'avion sur ordinateur, en s'appuyant sur les logiciels de Dassault Systèmes. « Cela nous permet de développer plus vite et pour moins cher notre projet », observe Olivier Savin.

Puis en mars dernier, la startup a lancé une campagne de tests d'une maquette à l'échelle 1/4 de son futur avion. « L'appareil (de trois mètres d'envergure) n'est pas équipé de propulsion à hydrogène, il s'agit surtout d'étudier le comportement de l'avion. Et l'avion a volé avec des performances exactement conformes aux projections de notre jumeau numérique », se réjouit le dirigeant.

En parallèle, Blue Spirit Aero a testé une première petite pile à combustible à hydrogène dans un avion de voltige du Basque Aéro Mécanic's. « Jusqu'à présent, des avions ont seulement volé à plat avec une pile à combustible. Nous avons testé la pile dans des conditions très sévères avec des accélérations jusqu'à 4G. C'est une première mondiale », souligne Olivier Savin. La prochaine étape est de faire voler une pile à combustible de 10 kw, la puissance nominale qui équipera le futur avion (l'aéronef sera doté d'une puissance totale de 240 kw). Blue Spirit Aero mène par ailleurs des essais en soufflerie d'une aile en Australie.

Le coup de pouce de France 2030

La startup, qui avait déjà décroché des aides publiques de la Région Occitanie et de Bpifrance, va connaître un coup d'accélérateur à son développement grâce au soutien de l'État dans le cadre de France 2030. Blue Spirit Aero fait ainsi partie des neuf projets sélectionnés dans l'appel à projets sur la production d'aéronefs bas carbone, doté de 49 millions d'euros et annoncé vendredi dernier par Emmanuel Macron. « Cela nous permettra de produire les pièces d'Alpha, le premier prototype de notre avion qui doit réaliser son premier vol d'ici fin 2024 », informe Olivier Savin. Le chef d'entreprise table ensuite sur fin 2026 pour obtenir la certification et une mise en service commerciale dans la foulée.

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Si son siège social est installé dans la région parisienne, le coeur du développement de Blue Spirit Aero est mené depuis Toulouse. À l'été 2021, la jeune société a pris ses quartiers au sein du B612, bâtiment totem des projets aéronautiques et spatiaux innovants dans la Ville rose. Désormais, ils sont une quinzaine à imaginer le futur avion dont une moitié de jeunes diplômés de l'Isae-Supaéro mais aussi des ingénieurs seniors passés par les grands noms de l'aéronautique et qui apportent leur expertise au projet.

La société aimerait à terme intégrer le futur campus hydrogène de Francazal.

« Ce lieu accueillera notre première chaîne de production destinée à fabriquer l'avion de démonstration. Ensuite, nous nous agrandirons pour avoir en 2025 une capacité de production d'une dizaine d'avions par an et atteindre jusqu'à 150 à 200 avions par an à l'horizon 2030 », détaillait à l'automne dernier Olivier Savin.

Un fort besoin de renouvellement dans les aéroclubs

Des chiffres ambitieux mais qui reflètent d'après le fondateur de Blue Spirit Aero la forte demande à venir de petits avions plus économes.

« Notre avion de quatre places est destiné à contribuer au renouvellement de la flotte d'avions qui équipent les aéroclubs. Sur les 250.000 avions existants de cette gamme, nous estimons qu'il y aura besoin de renouvellement sur 1.500 à 2.000 appareils par an. Ce sont des aéronefs qui ont en moyenne 45 ans, ils ont été maintenus opérationnels en les rafistolant au fur et à mesure. Mais aujourd'hui, cela revient plus cher de faire voler un avion que ce que cela rapporte en termes de location.

Il y a aussi besoin d'avions de nouvelle génération, qui ne reposent pas sur le pétrole et qui génèrent moins de nuisances sonores pour les riverains. Et puis, il existe un déficit gigantesque de pilotes. Sur les 20 prochaines années, on doit former 600.000 nouveaux pilotes, les écoles de pilotage sont en train de s'équiper de dizaines d'avions pour répondre à ce besoin », conclut-il.

Outre les subventions publiques, la startup prépare une levée de fonds en faisant appel à des financeurs privés.

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