Une méthode révolutionnaire pour analyser l'ADN en 10 minutes

Récompensé par la société chimique de France pour ses recherches, le chercheur toulousain Aurélien Bancaud a mis au point une méthode permettant d'analyser l'ADN en 10 minutes au lieu de quatre heures. Développée au laboratoire Laas-CNRS, cette innovation promet de grandes perspectives et a fait l'objet d'un transfert de technologie vers l'entreprise Picométrics. Reportage photo dans son laboratoire.
Aurélien Bancaud

C'est dans le laboratoire de biotechnologie du Laas-CNRS qu'Aurélien Bancaud reçoit ses visiteurs. Le jeune chercheur vient de recevoir le prix d'instrumentation en chimie physique de la société chimique de France. Une récompense qui a mis en lumière ses recherches dont La Tribune Toulouse se faisait l'écho en septembre 2015. Aurélien Bancaud a mis au point une méthode permettant d'analyser l'ADN en 10 minutes au lieu de quatre heures. Une technique à ne pas confondre avec le séquençage.

"L'analyse génétique, c'est l'analyse de l'ADN en général. La technique d'analyse la plus classique est la séparation en taille (celle pratiquée par Aurélien Bancaud, NDLR). Celle-ci peut permettre ensuite de faire du séquençage (déterminer l'ordre des différents composants de l'ADN, NDLR) ."

Aurélien Bancaud

Aurélien Bancaud © photo Rémi Benoit.

Toute l'innovation d'Aurélien Bancaud et son équipe tient dans cette plaque de silicium grande comme le plat de la main et découpée en petites puces d'environ un centimètre de diamètre.

Aurélien Bancaud

Des puces de silicium © photo Rémi Benoit.

"Ce sont des laboratoires sur puce, explique le scientifique. Chacune d'elle dispose d'un canal où nous faisons couler l'ADN."

Aurélien Bancaud

Un puits à électrophorèse et un laboratoire sur puce © photo Rémi Benoit.

Cette puce remplace par exemple l'appareil (ci-dessus) où se pratique l'électrophorèse de l'ADN, une opération essentielle qui permet de séparer l'ADN pour ensuite analyser sa structure moléculaire.

"Le problème de l'électrophorèse en gel est que le procédé est fastidieux et qu'il est associé à un échauffement important, car nous faisons migrer l'ADN grâce à du courant électrique, poursuit Aurélien Bancaud. Des industriels ont amélioré cette technique dans les années 1980 en utilisant des capillaires, les structures classiques des fibres optiques, puis les laboratoires sur puce au tournant des années 1990.

Notre technique de laboratoire sur puce permet de réaliser de multiples opérations analytiques sur l'ADN : séparation, enrichissement d'une solution très diluée et détection. Nous sommes donc dans une dynamique d'intégration et d'automatisation."

Aurélien Bancaud

Des membres de l'équipe d'Aurélien Bancaud réalisent une analyse génétique en moins d'une minute © photo Rémi Benoit.

Réalisée industriellement en 10 minutes par Picométrics Technologies qui a acquis le brevet de l'innovation, l'opération ne prend qu'une minute en laboratoire, comme le montre la vidéo ci-dessous. L'ADN présent dans une solution aqueuse coule dans le canal jusqu'à un rétrécissement appelé "construction". Dès que le champ électrique est activé, les fragments d'ADN s'immobilisent en fonction de leur taille à des endroits différents, ce qui permet de les différencier.

Après avoir amélioré la technique pour réduire le temps de l'opération de dix à une minute et augmenter la sensibilité de détection d'échantillons de plus en plus dilués, l'équipe d'Aurélien Bancaud se tourne à présent vers d'autres horizons.

"Nous développons à présent l'analyse génétique à partir d'échantillon de sang. L'idée est de faire des prélèvements et de déterminer sa concentration et sa distribution en fonction de la taille des fragments d'ADN, explique le chercheur. Les outils actuels demandent beaucoup d'étapes laborieuses pour parvenir à ses résultats. Nous espérons pouvoir accélérer les pratiques."

Par ailleurs, un partenariat a été passé avec le Centre de recherche en cancérologie de Toulouse dans le cadre du programme Onco-Device pour mettre au point des dispositifs plus performants. "Ma mission de recherche est d'améliorer l'instrumentation, insiste Aurélien Bancaud. Pour l'instant, nous ne savons pas encore reconnaître une séquence génétique. C'est le prochain verrou à faire sauter. Si on y arrive, nous pourrons faire de l'identification de séquences spécifiques de gènes. Et là, notre plus-value en instrumentation pour la cancérologie sera plus significative."

Ces recherches pourraient aboutir dans cinq ans. Rendez-vous en 2021 pour un nouveau saut en avant grâce aux puces du Laas-CNRS.

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