Scopelec : les salariés sociétaires vent debout contre la direction, une grève nationale prévue jeudi

Mécontentement en interne, direction fragilisée, incertitudes autour du transfert des emplois en sursis... Scopelec et ses 3.600 salariés sont dans la tourmente après la perte de deux importants contrats avec Orange représentant 40% de leur chiffre d'affaires. Par conséquent, "les salariés sociétaires ont décidé de reprendre la main sur leur Scop et un renouvellement de la direction n'est pas écarté.
La direction de Scopelec doit désormais faire face à une contestation des salariés sociétaires en interne.
La direction de Scopelec doit désormais faire face à une contestation des salariés sociétaires en interne. (Crédits : Pierrick Merlet)

Rien ne va plus chez Scopelec, depuis la perte d'importants contrats auprès de l'opérateur Orange représentant près de la moitié de son chiffre d'affaires ! Dans toute la France, selon des informations de La Tribune, les salariés - dont 75% sont sociétaires au sein de la première Scop de France - prévoient de se mettre en grève, jeudi 3 février, pour dénoncer le comportement de la direction de Scopelec.

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"Le climat est morose en interne. Nous ne savons rien et on ne nous dit rien ! Nous voulons savoir ce qui va nous arriver mais personne ne nous parle. Aujourd'hui, il y a un début de rupture entre la base et la direction, nous sommes en train de nous éloigner. Mais Scopelec, ce n'est pas sa direction, ce sont ses salariés sociétaires. Nous pensons que nous ne sommes pas défendus comme nous devrions l'être... Désormais, les salariés sociétaires ont décidé de reprendre la main sur leur Scop", prévient Frédéric Mazars, salarié sociétaire depuis sept ans au sein de Scopelec et délégué syndical FO.

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Ces derniers jours, le CSE a mené en interne, via des canaux numériques une consultation sur "la crise" traversée par l'entreprise et environ 500 sociétaires auraient manifesté un certain mécontentement à l'égard de la direction dans la gestion du dossier Orange. Par conséquent, une assemblée générale extraordinaire pourrait être convoquée prochainement.

Le transfert des salariés, noeud du dossier ?

Cette colère est notamment liée à l'incertitude entourant une majorité de salariés de Scopelec. Avec la perte des contrats d'Orange, ce serait 1.800 emplois sur 3.600 qui seraient menacés à brève échéance, soit d'ici le 1er avril, date à laquelle les contrats de sous-traitance actuelle doivent prendre fin pour l'opérateur spécialisé dans le déploiement et la maintenance de réseaux dédiés à la télécommunication. Le transfert de salariés serait une piste éventuelle pour sauver les emplois à court terme.

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"Au sein de Scopelec SA (la maison mère de la Scop qui emploie 2.000 personnes environ, ndlr), aucune solution de reclassement n'a été proposée aux salariés. Le CSE n'a pas reçu le moindre contrat. On nous dit qu'il y aurait des discussions avec les nouveaux prestataires d'Orange. Mais cela ne se fait pas de demander à des salariés sociétaires de quitter leur famille, leur entreprise, avoir l'avoir vu grandir", ajoute le représentant FO.

Une situation que confirme la direction du sous-traitant dans le secteur des télécoms, jointe par La Tribune. "Il n'y absolument rien de nouveau sur le transfert des salariés : aucune proposition concrète, aucune offre, aucune garantie et un droit social qui ne permet pas ce type de transfert ce type de transfert d'une entreprise à l'autre sans rupture du contrat de travail", justifie-t-elle.

Pourtant, dans certaines filiales du groupe Scopelec, les discussions autour du reclassement des salariés chez les concurrents ont déjà débuté. C'est notamment le cas chez Setelen, qui emploie 780 personnes sur l'Est et le nord-est de la France. Environ 450 emplois seraient menacés dans cette entité.

"Un projet de transfert a été présenté par la direction au CSE dans le courant du mois de janvier. Seulement, le projet présenté manquait d'éléments, avec des documents incomplets, des zones de flou et l'oubli d'informations essentielles comme le salaire ou la reprise de l'ancienneté. Par ailleurs, des salariés de Setelen ont reçu des propositions de contrat directement de la part des concurrents de Scopelec, avec la complicité de notre direction. Seulement, ces propositions laissent apparaître des salaires moindres...", peste un élu du CSE de Setelen.

Mécontente, l'instance s'est attachée les services d'un avocat, qui est parvenu à obtenir une réunion, fixée au 15 février, pour discuter des conditions de ce potentiel transfert de salariés à l'échelle de la filiale. "Nous sommes ouverts à toutes solutions à deux conditions : elles doivent être négociées collectivement et elles doivent être conformes à l'intérêt de tous les salariés", poursuit Maître Blindauer, l'avocat en question.

Un droit du travail qui n'impose rien

Face à l'ampleur du dossier, surtout en nombre d'emplois touchés à terme et à l'approche de l'élection présidentielle, le gouvernement s'est mobilisé sur le dossier Scopelec, notamment à travers le Comité interministériel de restructuration industrielle (CIRI), ce qui n'étonne pas certains experts en matière du droit.

"Dans les télécommunications, il n'existe pas une obligation de reprise du personnel comme dans le nettoyage pour lequel la convention collective oblige le transfert des salariés dans la succession des prestataires. Mais, l'article 1224-1 du code du travail impose la reprise du personnel, à certaines conditions, comme celle d'être en capacité d'identifier une certaine similitude de la prestation demandée avant et après (or, Orange pourrait avoir procédé à un nouveau découpage de la prestation dans ses appels d'offres, ce qui écarterait de fait cette option, ndlr). Ne pouvant s'appliquer, il n'est pas étonnant de voir l'État s'en mêler afin de favoriser le reclassement des salariés par de la négociation mais cela dépend de la volonté du repreneur", analyse Jennifer Carrel, associée au sein du cabinet UGGC Avocats et spécialiste du droit du travail.

Pourtant, selon plusieurs professionnels des télécoms, leur main d'oeuvre connaît de fortes tensions en raison de besoins de recrutements qui ne sont pas comblés par manque de profils. Les potentielles réductions d'effectifs devraient donc être une aubaine pour les nouveaux sous-traitants d'Orange, comme Sotranasa qui a récupéré une partie des contrats de Scopelec en Occitanie.

"En 2018, alors que nous avions d'ores et déjà amorcé notre plan de développement vers des activités telles que les énergies renouvelables, nous avons fait le choix de nous adosser à un grand groupe pour être en capacité d'absorber la croissance, de répondre aux besoins de nos clients au-delà de notre région (la société est installée à Perpignan, ndlr) et financer notre développement. Ce choix stratégique nous a permis de créer en trois ans 300 emplois supplémentaires dans notre région. Nous comptons aussi bien nous appuyer sur le savoir-faire et les compétences du tissu local, en particulier dans les départements sur lesquels nous ne sommes pas implantés, pour faire face à la croissance attendue, que ce soit dans les télécoms ou dans nos autres secteurs d'intervention", promet notamment Jean-Baptiste Navarro, le directeur général de Sotranasa, qui emploie déjà 700 personnes en Occitanie.

Les contrats actuels avec Orange, détenus par Scopelec, sont effectifs jusqu'à la fin du mois de mars 2022. Au 1er avril, les nouveaux partenaires de l'opérateur français prendront le relais, avec l'espoir donc d'avoir pu étoffer leurs effectifs avant cette échéance.

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Commentaires 4
à écrit le 03/02/2022 à 18:00
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C'est surtout que dans une SCOP, la confiance règne...un peu trop : nul ne peut ignorer que la confiance n'exclue pas le contrôle. Et clairement les sociétaires ont été trompés par le conseil de surveillance et qu'eux mêmes auraient du être plus vigi...

à écrit le 03/02/2022 à 10:20
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Les compétences étant rares car demandant un savoir-faire issu d'une longue expérience, les sociétés sélectionnées vont devoir s'y reprendre à plusieurs fois avant soit de débaucher auprès d'une SCOP(un salarié-actionnaire ne quitte pas son navire au...

à écrit le 03/02/2022 à 2:43
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L'union fait la force.

à écrit le 02/02/2022 à 20:46
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excellent!!!!!!!!!!! les salaries proprietaires de leur entreprise vont decouvrir ce que c'est que d'etre ' una ctionnaire patron negrier voleur'!!!!!!!!!!!! ils vont devoir se virer eux memes car ca va pas, ou faire une augmentation de capital, en d...

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