Aéronautique : Satys alerte sur la pénurie de main d'oeuvre pour la reprise

Spécialiste mondial de la peinture d’avion, le groupe toulousain Satys a beaucoup souffert de la crise aéronautique. Mais alors que la remontée des cadences d'Airbus se profile, l'entreprise craint des difficultés à pourvoir les 50 recrutements prévus dans les mois à venir. Son PDG Christophe Cador tire la sonnette d'alarme face au manque de bras dans certains métiers aéronautiques et la fuite de talents vers d'autres secteurs devenus plus attractifs.
Le groupe Satys dispose de cinq salles de peinture à Toulouse, exploitées aujourd'hui à 50%.
Le groupe Satys dispose de cinq salles de peinture à Toulouse, exploitées aujourd'hui à 50%. (Crédits : Rémi Benoit)

"À un moment donné, notre crainte était que toute la filière aéronautique s'effondre comme un château de cartes. Mais nous avons tenu, en partie grâce au soutien de l'Etat", lance Christophe Cador, PDG du groupe Satys et par ailleurs président du comité Aéro-PME au sein du Gifas. Le dirigeant a profité d'un déplacement de la présidente de région Carole Delga dans son entreprise ce lundi 28 juin pour revenir sur 15 mois de crise aéronautique.

Revendiquant la place de numéro 1 mondial pour la peinture d'avions, le groupe Satys qui emploie 2.200 salariés à travers le globe dont un millier en France (et 400 rien qu'à Toulouse) a vu son chiffre d'affaires chuter de 10% en 2020 pour s'établir à 190 millions d'euros. Une nouvelle diminution de 10% de son CA est attendue pour 2021.

"Nous n'avons pas fait de PSE grâce aux mesures comme l'activité partielle de longue durée (APLD) et en diminuant les fiches de paie. Nous avons quand même dû lancer un plan de départs volontaires. Une centaine de salariés ont quitté l'entreprise", informe Christophe Cador.

Une cinquantaine de recrutements en France

Mais alors que les perspectives étaient encore très pessimistes ces derniers mois, l'horizon s'est brusquement éclairci fin mai lorsque Airbus a annoncé une remontée des cadences à 45 A320 au quatrième trimestre 2021. Et l'avionneur européen se prépare à monter à 64 au deuxième trimestre 2023, un niveau jamais atteint dans l'histoire de l'aéronautique, qui correspond à plus de deux avions livrés par jour.

Et désormais, la supply chain craint plutôt la pénurie de main d'oeuvre. Face au manque de bras, certains sous-traitants du Sud-Ouest (AAA, Lauak) ont proposé à des salariés licenciés d'être réembauchés, parfois pour des contrats précaires.

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Chez Satys, la pénurie de main d'oeuvre est criante sur certains métiers comme les peintres. "Comme beaucoup d'entreprises aéronautiques, nous avons du mal à embaucher. Beaucoup de profils se sont tournés vers d'autres secteurs industriels. Certains de nos salariés se sont également reconvertis en conducteurs de taxi, ont lancé leur foodtruck", constate le PDG de Satys. Le groupe prévoit une cinquantaine d'embauches dans les mois à venir à Marseille, Châteauroux et Toulouse. Une campagne de recrutement qui sera lancée dès le mois de septembre. "Il faut six à douze mois aux salariés pour être opérationnels", rappelle Christophe Cador.

En attendant le retour au niveau d'avant-crise, Satys ne peut exploiter qu'à 50% ses cinq salles de peinture. Avant la pandémie, le groupe avait pour projet de construire une sixième salle. "Nous espérons relancer cette construction dans les trois ans à venir", glisse David Soulage, directeur technique de Satys. L'entreprise espère pouvoir également relancer assez vite son centre de formation qui lui permettait d'intégrer 10 à 12 nouvelles recrues par an.

15 millions d'euros pour une usine à Marignane

En revanche, Satys a maintenu son investissement de 15 millions d'euros (annoncé au salon du Bourget 2019) pour construire une nouvelle usine à Marignane dans les Bouches-du-Rhône dédiée au traitement de surface. Une opération qui lui permet de se rapprocher d'Airbus Helicopters.

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Satys perçoit également de belles perspectives de reprise dans la repeinture des avions. Chaque aéronef doit être repeint au moins trois fois au cours de son cycle de vie. Le groupe s'est porté candidat à un appel d'offres de Qatar Airways dans ce domaine. Un segment où le marché est très exigeant. "Airbus nous demande de réduire les coûts tout en augmentant la qualité", commente Christophe Cador. À ces demandes des avionneurs, Satys doit aussi répondre aux délais très serrés des compagnies aériennes, l'avion à repeindre devant parfois redécoller avec des passagers dès le lendemain. Des timings qui laissent peu de place aux défauts ou aux retards.

Afin de gagner en performance, le groupe compte investir dans de nouveaux équipements pour les salles de peintures. "Nous allons installer des nacelles mobiles qui nous permettront d'éviter les chocs avec les avions. Quand on s'approche de trop près de l'appareil, le risque est de choquer l'avion. Un tel incident est extrêmement coûteux et pénalisant", remarque David Soulage.

Le PDG de Satys Christophe Cador conclut : "Historiquement, la repeinture des avions en service se trouve en Angleterre et en Irlande, du fait d'une flexibilité du travail plus avantageuse. Nous voulons rapatrier ce business en France."

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Commentaires 2
à écrit le 29/06/2021 à 16:59
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Comme dit Joe Biden il faudra peut être penser à payer plus avec des salaires décents 🙂

à écrit le 29/06/2021 à 12:23
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"la fuite de talents vers d'autres secteurs devenus plus attractifs. " Traduction: les jeunes ont compris que pour valoriser leurs études il vaut mieux aller ailleurs qu'à Airbus City. L'industrie aéronautique étant en situation de quasi monopole dan...

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