Un A400M de l'armée française s'est posé, jeudi matin 29 février, sur le tarmac de l'aéroport de Rodez à l'occasion d'une visite croisée avec les salariés de Ratier-Figeac qui fabriquent une partie des équipements de l'aéronef dans leur usine à une cinquantaine de kilomètres de là.
« Cet avion est une belle vitrine de notre savoir-faire puisque nous produisons depuis notre usine à Figeac quatre hélices par appareil mais aussi la manette de gaz », explique Jean-François Chanut, président de Ratier-Figeac et directeur général de Collins Aerospace Propeller Systems.
Cette entité, qui regroupe Ratier-Figeac, son antenne au Maroc et un site de production à Windsor Locks (États-Unis), a réalisé un chiffre d'affaires de 580 millions de dollars en 2023, dépassant de 15% le niveau d'avant Covid. L'équipementier lotois projette à nouveau une progression de 10% de son activité en 2024 pour atteindre 640 millions de dollars.
Un A400M de l'armée française sur le tarmac de l'aéroport de Rodez, à l'occasion d'une visite croisée avec les salariés de Ratier-Figeac. (Crédits : Rémi Benoit)
Le groupe s'attend notamment à un bond de la fabrication d'hélices, le coeur de son activité, avec plus de la moitié de son chiffre d'affaires.
« Nous devrions fabriquer, en 2024, 40% de plus de pales et de moyeux d'hélice que l'an passé », annonce le dirigeant.
L'A400M est l'un des moteurs de cette forte croissance avec le maintien en condition opérationnelle de l'avion transport militaire dernière génération développé par Airbus et entré en service en 2013 : « Tous les sept ans, une révision générale est réalisée et donc depuis 2020, nous avons une forte activité de rechange sur ces avions. Le pic d'activité que nous connaissons aujourd'hui sur ce programme devrait s'étaler probablement jusqu'à 2025 », note Jean-François Chanut.
Des hélices très puissantes en composite
Un succès qui s'explique par les performances très poussées de ses hélices.
« L'A400M est équipé de l'hélice la plus puissante du monde occidental avec 11.000 chevaux. C'est à peu près la puissance d'une rame de TGV, sachant que chaque avion comporte quatre hélices. C'est aussi la plus grande sur le marché puisqu'elle fait plus de cinq mètres de diamètre », commente Jean-François Chanut.
Des performances saluées par l'armée française après l'atterrissage de l'avion : « Des hélices très puissantes permettent de démarrer beaucoup plus vite, d'atteindre la vitesse de croisière rapidement et de décoller sur une distance plus courte », fait remarquer le commandant Dorian Gilot, qui pilote l'A400M depuis sept ans.
Jean-François Chanut et Dorian Gilot. (Crédits : Rémi Benoit)
L'A400M est aussi le symbole de la nouvelle génération d'hélices, développée par Ratier-Figeac à partir de matériaux composites.
« Ces hélices en composite permettent de réaliser des gains significatifs en termes de masse et donc d'augmenter nos capacités d'emport de carburant et de fret », ajoute le commandant.
Au-delà du programme A400M, le groupe doit aussi absorber la forte demande de sa nouvelle hélice en composite, la NP2000, au coeur d'un rétrofit des C130 H de l'US Air force. Le rebond d'activité des avions régionaux d'ATR booste aussi sa production.
Equiper les avions du futur
Depuis son nouveau centre d'excellence à Figeac (inauguré fin 2021), le premier fabricant mondial d'hélices planche aussi sur les modèles qui équiperont les avions du futur.
« Ces hélices vont être intégrées sur des aéronefs avec une motorisation soit totalement électrique, comme c'est le cas sur plusieurs projets de mobilité urbaine, soit des avions hybrides qui demandent la production d'hélices spécifiques ou de systèmes plus efficaces en termes d'aérodynamique. Nous travaillons aussi sur des matériaux plus légers, réutilisables ou recyclables, ainsi que sur la réduction du bruit des hélices », développait le dirigeant fin 2023.
Autant d'innovations susceptibles d'équiper un jour les constructeurs établis (Airbus, ATR, De Havilland) tout comme les acteurs émergents, notamment dans la région toulousaine. Ratier-Figeac développe aussi un mini-manche pour piloter les futurs taxis volants de la startup allemande Lilium.
(Crédits : Rémi Benoit)
Des anciennes coiffeuses ou des bouchers en reconversion
Pour remplir toutes ces activités, Ratier-Figeac emploie près de 1.500 salariés, soit 15% de plus qu'avant la crise sanitaire. La croissance des effectifs amène à réaliser une forte montée en compétence de ces nouveaux embauchés, pour certains en reconversion.
« Nous accueillons des anciennes coiffeuses ou des bouchers. Ces personnes n'avaient pas l'habitude de travailler dans l'industrie aéronautique, où les exigences de qualité sont de très haut niveau. Il faut une période d'adaptation pour adopter cette culture. Cela peut générer une légère dégradation de la qualité interne mais nous arrivons à réparer suffisamment tôt, cela nous permet de maintenir une qualité de livraison des pièces au client exceptionnelle. Nous avons atteint zéro ppm pour Airbus, et 17 ppm pour l'ensemble de nos clients, soit 17 défauts par million de pièces livrées alors que beaucoup de sociétés aéronautiques arrivent avec des milliers de défauts par million de pièces », observe Jean-François Chanut.
Le groupe compte à nouveau augmenter son effectif de plusieurs dizaines de salariés en 2024.
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