Aéronautique : malgré leur handicap, ils ont intégré Airbus

Depuis 2010, l'association Hanvol permet aux demandeurs d'emploi en situation de handicap d'accéder à une pré-formation ou un coaching personnalisé pour les préparer à intégrer en alternance les entreprises de la filière aéronautique et spatiale. Une initiative d'autant plus bienvenue à l'heure où le secteur fait face à d'énormes besoins de recrutement pour suivre les remontées de cadences. A Toulouse, Elio, 20 ans, né très grand prématuré et atteint de dyspraxie, accomplit son rêve en suivant un BTS aéronautique au sein d'Airbus. Mohamed, 52 ans, atteint d'une maladie de longue durée, suit également un BTS chez l'avionneur européen pour se reconvertir de la sécurité vers l'aéronautique.
Mohamed, 52 ans, suit un BTS chez l'avionneur européen pour se reconvertir de la sécurité vers l'aéronautique.
Mohamed, 52 ans, suit un BTS chez l'avionneur européen pour se reconvertir de la sécurité vers l'aéronautique. (Crédits : Hanvol)

« J'avais deux ans quand l'A380 a fait son premier vol et mes parents m'avaient emmené dans l'axe de la piste à Saint-Martin du Touch pour regarder les avions. C'est comme ça que j'ai attrapé le virus de l'aéronautique. Aujourd'hui encore, parfois j'y retourne pour photographier et prendre des avions. Après mes études, j'aimerais travailler dans le domaine des essais en vol », livre Elio Lecellier. Ce jeune Toulousain de 20 ans commence en suivant actuellement un BTS aéronautique en alternance au Training Center d'Airbus à Blagnac. Pourtant, son parcours scolaire était loin d'être tout tracé.

Né très grand prématuré, il est diagnostiqué dyspraxique durant sa scolarité. « Quand j'ai visité le lycée Airbus, je me suis vite rendu compte que je ne me voyais pas du tout dedans parce qu'il y a beaucoup de pièces minutieuses et que pour moi, la synchronisation des gestes était très compliquée. Enfant, j'avais des difficultés à lacer mes chaussures, je ne me voyais pas travailler avec des outils à la main dans une chaîne d'assemblage », se remémore-t-il. Mais lors du salon du Bourget, il croise la route de l'association Hanvol qui l'aide à intégrer la filière aéronautique.

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 Elio, 20 ans, né très grand prématuré et atteint de dyspraxie accomplit son rêve en suivant un BTS aéronautique au sein d'Airbus. (Crédits : Hanvol)

Fondée en 2010 sous l'impulsion du Gifas (groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales), l'association Hanvol permet aux demandeurs d'emploi en situation de handicap d'accéder à une pré-formation ou un coaching personnalisé pour les préparer à intégrer en alternance les grands noms de la filière aéronautique et spatiale (Airbus, Thales, Safran, Collins Aerospace, etc) mais aussi des acteurs du transport aérien de la Fnam avec par exemple l'aéroport Toulouse-Blagnac. Une initiative d'autant plus bienvenue à l'heure où le secteur fait face à d'énormes besoins de recrutement pour suivre les remontées de cadences.

Les membres du GIFAS ont annoncé vouloir recruter 25 000 personnes en 2023, dont 18 000 en CDI et 7 000 en contrats d'alternance et d'apprentissage. Airbus compte à lui seul recruter 3.500 salariés en France dont 2.300 personnes à Toulouse cette année. Il faut dire que l'avionneur européen a actuellement 8.000 avions dans son carnet de commandes, c'est-à-dire plus de dix ans de production au rythme actuel.

Lire aussiAirbus va encore recruter 3.500 personnes en France cette année

« Sécuriser le recrutement » pour l'employeur

« Notre dispositif est gagnant-gagnant. Il permet au demandeur d'emploi en situation de handicap un retour à l'emploi dans un secteur qui recrute. C'est positif aussi pour l'entreprise car elle peut recruter sur des métiers en tension avec des profils qui ont préparé leur projet professionnel, ce qui sécurise leur embauche », relève Laurent Dujaric, délégué général de l'association Hanvol qui vient de lancer la campagne de recrutement pour 2024.

Avant d'intégrer l'entreprise en alternance, les demandeurs d'emploi suivent 400 heures d'une pré-formation rémunérée de trois mois dont 10 jours dans les centres de formation aéronautique pour s'essayer aux différents métiers de la filière (ajusteur, mécanicien câbleur...). Les candidats bénéficient également d'une remise à niveau académique (en mathématiques, physique, français, anglais) étant donné que le dispositif s'adresse à des profils qui ont quitté depuis un moment les bancs de l'école.

Pour les profils plus proches de l'emploi, notamment les étudiants, l'association propose un coaching personnalisé pour préparer leur candidature et les aiguiller dans leur orientation. « Par exemple, si le candidat a une restriction de port de charge de 6 kg, il faut trouver une entreprise qui ne dépasse pas cette restriction. La diversité des entreprises du réseau permet à des personnes avec des handicaps différents de s'insérer », mentionne Laurent Dujaric.

70% des alternants embauchés

Au total, chaque année 45 personnes sont accompagnées par l'association. 70% d'entre elles signent un contrat en alternance à l'issue du dispositif et 70% des alternants sont ensuite embauchés par l'entreprise d'accueil. Les autres peuvent rejoindre une autre société du réseau de l'association.

Pour sa part, Mohamed Ait-Larbi, 52 ans, est retourné sur les bancs de l'école en intégrant un BTS en alternance chez Airbus commercial après une carrière dans la sécurité. Sa maladie inflammatoire chronique de l'intestin ne lui permettait plus de poursuivre à son poste.

« L'association Hanvol constitue un tremplin pour les personnes en situation de handicap. De mon côté, je partais avec deux handicaps, mon âge et ma maladie. J'ai intégré l'unité des mâts réacteurs pour l'A350 qui regroupe tous les corps de métier. C'est ce côté touche-à-touche qui me plaît dans l'aéronautique », témoigne-t-il.

« Je ne me suis jamais senti différent chez Airbus »

De son côté Elio Lecellier a lui aussi trouvé ses marques. « Au début, j'avais peur d'être jugé, discriminé par rapport à mon handicap. Mais j'ai été très bien accueilli. Un référent handicap au sein d'Airbus a informé mon manager qui a lui-même briefé ensuite les équipes de techniciens. En expliquant les choses, le tabou du handicap se lève. Et puis, le fait d'avoir des connaissances dans le domaine aéronautique et deux ans de BTS en informatique précédemment m'aide à me débrouiller car il y a beaucoup d'informatique dans les simulateurs », explique Elio Lecellier.

Depuis plus de 30 ans en France, les entreprises de plus de 20 salariés ont l'obligation d'embaucher au moins 6% de travailleurs handicapés. Le dispositif Hanvol les aide à atteindre cet objectif. « Malgré cette obligation légale, je ne me suis jamais senti différent chez Airbus. J'ai eu des retours positifs sur mon travail et l'impression de faire partie intégrante de l'entreprise, ce qui me redonne confiance en moi », ajoute Mohamed Ait-Larbi.

Une clé essentielle pour favoriser l'insertion professionnelle des personnes en situation de handicap. « Souvent, ils ont connu plusieurs échecs sur le marché de l'emploi qui les conduisent à se réduire à leur handicap. Certains le cachent de peur que ce soit un facteur discriminant et sans voir leurs compétences transférables vers un métier. Il faut rétablir une relation de confiance pour les faire avancer », conclut Laurent Dujaric.

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Commentaires 2
à écrit le 24/11/2023 à 9:28
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Mais moi malgré mon handicap et mes 18 ans d’expérience ce je ne l’ai pas intégré et sans aucune explication après 6 demandes et un métier très recherché ?

à écrit le 23/11/2023 à 20:44
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Malheureusement ce ne sont pas quelques cas mis en valeur qui cacheront le très faible taux de salariés handicapés chez Airbus. Beaucoup de com par contre.

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