« Airbus n'a pas attendu ChatGPT pour se mettre à l'intelligence artificielle »

Le buzz mondial créé par ChatGTP n'a pas échappé aux grands groupes. Pour autant, « Airbus a commencé à faire de l'intelligence artificielle il y a près de 30 ans», a rappelé jeudi à Toulouse Catherine Jestin, vice-présidente exécutive en charge du numérique. Maintenance prédictive des avions, gestion des stocks de pièces, détection d'information sur les images satellite... le géant européen exploite déjà largement les milliards de données générées chaque jour par ses engins et pourrait bientôt dégainer une formation maison dédiée à l'IA. Cette dernière constitue une avancée technologique-clé dans l'optique de la décarbonation même si Airbus reste conscient des risques associés alors que le groupe doit contrer quotidiennement des cyberattaques.
(Crédits : Rémi Benoit)

« Airbus a commencé à faire de de l'intelligence artificielle il y a près de 30 ans, au milieu des années 90, donc nous n'avons pas attendu que ChatGPT fasse du bruit dans le landerneau », a rappelé Catherine Jestin, vice-présidente exécutive en charge de la gestion de l'information et du numérique au sein du géant européen de l'aéronautique et du spatial le 28 septembre à Toulouse à l'occasion de l'événement la Mêlée numérique.

Maintenance prédictive des avions et détection d'informations sur les images satellite

Alors que l'outil de conversation basé sur l'intelligence artificielle générative a créé un buzz mondial, la dirigeante a remémoré le déploiement massif d'applications utilisant l'IA dès le début des années 2000 au sein d'Airbus, notamment dans le spatial.

« Les premières applications sont venues du monde spatial et en particulier tout ce qui était lecture et interprétation des images. OneAtlas utilise des algorithmes pour exploiter des informations contenues dans les images satellite pour de multiples usages : détecter l'huile de palme et éviter la déforestation, identifier les surfaces des champs et optimiser les rendements agricoles, déterminer l'ampleur des dégâts provoqués par une catastrophe naturelle pour les assurances.... », détaille-t-elle.

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Catherine Jestin, vice-présidente exécutive en charge de la gestion de l'information et du numérique d'Airbus lors de la Mêlée numérique (Crédits : la Mêlée).

Dans le domaine aéronautique, Airbus a lancé en 2017 la plateforme de big data Skywise qui permet de collecter les données de 24.000 paramètres de l'avion.

Les compagnies mettent à disposition leurs données (qui sont anonymisées) et peuvent les comparer avec celles des concurrents. À partir de cette masse d'informations, l'outil est aussi en mesure de réaliser de la maintenance prédictive. « Nous détectons les signaux faibles qui vont nous permettre de faire la maintenance à une escale prévue plutôt que de se retrouver avec l'avion qui ne peut pas décoller parce que l'incident a été détecté trop tard. Nous travaillons aussi avec des données, par exemple la météo, pour optimiser l'utilisation des aéroports et éviter que les avions soient trop en attente avant d'atterrir, » développe la dirigeante.

Le constructeur aéronautique estime que l'inefficacité opérationnelle des flottes (problèmes de réseau, de carburant ou opérations de maintenance inopinées) coûte environ 40 milliards de dollars par an aux compagnies aériennes et qu'il serait possible grâce aux outils numériques de réduire la facture de 10 milliards de dollars.

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Pour une intelligence artificielle « responsable  »

Il faut dire que le géant européen brasse des milliards de données chaque jour.

Chez Airbus, 6.500 applications sont utilisées sur l'activité avions, à peu près 4.000 chez Airbus Defence and Space et près de 2.500 chez Airbus Helicopters. Pour faire remonter de l'information, l'intelligence artificielle est absolument nécessaire. Il existe des modèles algorithmiques qui reprennent les taux d'utilisation des appareils, les conditions dans lesquelles ils ont volé (températures, degré d'hygrométrie). Toutes ces informations sont ingérées de manière à prédire l'utilisation et le nombre de pièces détachées nécessaire pour chaque avion. Pour rappel, aujourd'hui 10.000 avions Airbus volent dans le monde et chacun d'entre eux est composé de deux millions de pièces, calcule Catherine Jestin.

 Pour la responsable, ces avancées technologiques permises par l'intelligence artificielle « seront un élément-clé dans la décarbonation de l'industrie et la création des prochaines générations d'avions et d'hélicoptères décarbonés ».

Malgré les progrès technologiques envisagés, Catherine Jestin prône « une intelligence artificielle responsable », consciente des risques associés notamment de fuites de données. « Nous n'interdisons pas à nos salariés d'utiliser ChatGPT mais nous leur avons bien expliqué de ne pas y mettre de données sensibles. Nous travaillons également en étroite collaboration avec Google sur beaucoup de sujets et nous avons mis en œuvre un espace privé qui est protégé et qui est monitoré pour éviter que notre API (interface de programmation, ndlr) ou notre connaissance ne soit éparpillée sur le grand Internet mondial », indique Catherine Jestin.

Bientôt un diplôme maison dédié à l'intelligence artificielle ?

Des précautions de mise alors qu'« Airbus est la cible d'attaques informatiques tous les jours ». Airbus a été victime par exemple à la fin de l'été d'une fuite de données, un pirate informatique ayant récupéré les contacts de 3.200 fournisseurs du géant européen de l'aéronautique après avoir infecté l'ordinateur d'un employé d'une compagnie aérienne. « Nous faisons deux entraînements par an pour simuler une crise majeure. Nous avions anticipé le scénario du ransomware il y a un peu plus de deux ans », informe-t-elle. Préoccupation majeure, « la cybersécurité mobilise aujourd'hui près 10 % des effectifs et du budget des systèmes d'information. »

Alors que la cybersécurité fait appel à des compétences « très rares » sur le marché de l'emploi, Airbus a créé à Toulouse depuis septembre 2022 une licence en cybersécurité. Il pourrait bientôt en être de même pour l'intelligence artificielle. « Nous avons un plan d'action sur les trois années à venir pour développer un format de formation interne pour avoir plus de ressources sur l'intelligence artificielle », a confié Catherine Jestin.

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Commentaires 2
à écrit le 30/09/2023 à 8:06
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la maintenance predictive et la gestion des stocks, c'est pas de l'AI, c'est des stats et de la modelisation, ( et la chacun peut faire sa cuisine, y a des milliers d'outils) dans le meilleur des cas! a un moment donne, faut arreter de tout melanger...

le 02/10/2023 à 20:20
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Entièrement d'accord avec vous!!! Les arrogants d'airbus veulent maintenant nous faire croire que ce sont eux qui ont inventé l'AI... pfffff ils vont dire que ce sont les méchants américains qui leur ont piqué l'idée...

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