Airbus réorganise son système industriel pour préparer l'avion du futur

Airbus a annoncé lors de son comité européen ce mercredi 21 avril le rapprochement avec ses filiales d'aérostructures, Stelia en France et Premium Aerotec en Allemagne. À l'inverse, les activités de pièces élémentaires outre-Rhin vont sortir du groupe. Ce nouveau schéma industriel engagé par l'avionneur européen vise à renforcer la compétitivité pour se préparer à la relance du trafic aérien mais aussi s'assurer d'une maîtrise totale des aérostructures qui sera l'élément clé dans la définition de la prochaine génération d'avions.
Airbus a annoncé lors de son comité européen ce mercredi 21 avril le rapprochement avec ses filiales d'aérostructures, Stelia en France et Premium Aerotec en Allemagne.
Airbus a annoncé lors de son comité européen ce mercredi 21 avril le rapprochement avec ses filiales d'aérostructures, Stelia en France et Premium Aerotec en Allemagne. (Crédits : Rémi Benoit)

C'est une première étape dans la mise en place d'un nouveau système industriel. Airbus vient de formaliser ce mercredi 21 avril à l'occasion d'un comité européen le rapprochement avec ses filiales d'aérostructures (Stelia en France et Premium Aerotec en Allemagne) par la création de deux sociétés d'assemblage d'aérostructures (des différents éléments de la structure d'un avion comme le fuselage et ailes) à l'horizon 2022. La première en France pourrait regrouper, en plus des effectifs de Stelia dans le monde, les personnels des usines Airbus de Nantes et de Saint-Nazaire pour former un nouvel ensemble dédié aux aérostructures qui pèsera cinq milliards d'euros pour un effectif de 12.000 salariés, dont plus de 9.000 en France.

La deuxième, en Allemagne, regroupera avec les activités du site de Stade et d'assemblage de structures à Hambourg avec celles de Premium Aerotec à Nordenham, Brême et partiellement à Augsbourg. Ses effectifs dépasseront les 7.000 salariés.

"Les deux nouvelles entités détenues à 100 % par Airbus, ne seraient plus considérées comme fournisseurs d'Airbus mais intégrées dans le périmètre du groupe", indique le groupe. Elles dépendront du directeur des opérations qui est actuellement Michael Schoellhorn et qui sera remplacé par Alberto Gutierrez à compter du 1er juillet.

Par ailleurs, une troisième entité sera créée en Allemagne pour sortir du groupe Airbus les activités de pièces élémentaires, jugées moins stratégiques.

Les aérostructures jugées "essentielles"

Cette réorganisation s'inscrit pleinement dans la feuille de route dressée mi-février par le directeur général du groupe, Guillaume Faury. Pour renforcer sa compétitivité, l'avionneur européen cherche actuellement à définir les activités considérées comme essentielles, et celles qui ne le sont pas; celles qui resteront en interne et celles qui peuvent être sous-traitées. Et dans cette transformation industrielle en cours, le directeur général d'Airbus avait cité en février dernier l'exemple des aérostructures, qui regroupent les différents éléments de la structure d'un avion (fuselage, ailes...). Et notamment l'assemblage.

"Nous considérons l'assemblage d'aérostructures comme une activité essentielle pour Airbus. Nous devons également reconsidérer nos activités de logistique et de planification, qui sont la clé d'un système industriel robuste et résistant (...). Cette activité est essentielle pour nous. Nous pensons qu'elle doit rester au sein d'Airbus", avait-il déclaré le 19 février dernier, en rappelant que ce marché des aérostructures était "fragmenté et complexe".

Lire aussi : Airbus : nouveau système industriel en vue pour préparer l'avion du futur

Réduction drastique des coûts chez Boeing

Ce rapprochement signe un retournement de stratégie majeur au sein d'Airbus. En 2009, après avoir échoué à vendre ses usines d'aérostructures (Méaulte et Saint-Nazaire en France) comme le prévoyait le plan de restructuration Power 8 en 2007-2008, Airbus avait placé ces activités dans deux filiales détenues à 100% : Premium Aerotec en Allemagne et Aerolia en France, laquelle, à l'issue de sa fusion en 2015 avec Sogerma, est devenue Stelia Aerospace. L'idée à l'époque était de filialiser ces activités dans le but de les vendre, afin de se concentrer sur la conception, l'intégration de systèmes et l'assemblage final des avions. Mais ces deux filiales n'ont jamais été vendues.

Alors pourquoi changer maintenant de stratégie ? D'abord, la crise. Avec la baisse drastique des cadences, Airbus considère que c'est le moment de réorganiser ses activités de manière à simplifier sa logistique autour des pièces d'assemblage. Ensuite, au moment de la reprise, l'avionneur européen sera confronté à la concurrence agressive de Boeing qui a connu de grandes difficultés financières et qui en profité pour fortement réduire sa base de coûts. "Quand il va revenir sur le marché, il sera super agressif", indique une source proche de l'avionneur. La concurrence chinoise sera également présente avec Comac qui s'apprête dans quelques mois à certifier son avion de ligne. Airbus se retrouvera en concurrence avec deux acteurs au lieu d'un aujourd'hui.

Les aérostructures, la clé de l'avion de demain

Surtout Airbus veut s'assurer d'une maîtrise totale de l'aérostructure qui sera la clé dans la définition de la prochaine génération d'avions. Le groupe réfléchit dans la perspective d'un avion à hydrogène en 2035 à une architecture de rupture autour d'une aile volante, un concept qui implique une intégration bien plus étroite entre moteurs et fuselage. Ce rapprochement doit aussi faciliter la mise en place de la continuité numérique tout au long de la production à travers le DDMS (digital design, manufacturing and services).

Cette réorganisation est accueillie de manière mitigée par les syndicats en France.

"En 2008, nous nous étions battus pour éviter la vente des aérostructures donc nous sommes satisfaits que l'assemblage des aérostructures soit clairement reconnu comme "core" (essentiel) dans ce projet. Maintenant, Airbus répond qu'il n'est pas question de réintégrer Stelia dans Airbus. Pour FO, il est maintenant impératif d'intégrer au maximum cette "new co" (nouvelle entreprise) dans le groupe Airbus sur le principe du "one Airbus". Ces nouvelles entités ne doivent pas être des coquilles vides et des investissements doivent être intégrés dès leurs créations pour permettre de garantir l'avenir et notamment la reprise de notre activité après cette crise du Covid", estime Dominique Delbouis, coordinateur Force Ouvrière d'Airbus Group.

De son côté Florent Veletchy, délégué syndical central CFTC estime : "C'est plutôt positif de regrouper les activités aérostructures pour créer un champion. Maintenant, nous jouons la prudence. Il faut notamment que la nouvelle entité garantisse la préservation et le développement de l'emploi dans nos sites."

"Il n'y a pas de fermetures de sites, il n'est pas prévu de réduire les emplois. Ce sont des points rassurants. Pour autant, nous serons vigilants sur le modèle économique et le statut pour les salariés", réagit pour sa part Françoise Vallin, déléguée syndicale central CFE-CGC.

Les syndicats vent debout en Allemagne

Les syndicats demandent à ce que ce rapprochement se fasse avec des garanties sociales pour qu'il n'y ait pas de changement pénalisant pour les salariés.

En Allemagne, les partenaires sociaux sont vent debout contre cette réorganisation. "En France, la sortie des pièces élémentaires d'Airbus avait déjà été réalisée donc l'impact sera quasiment nul. En Allemagne, il faudra trouver des solutions pour les 3.000 salariés qui travaillent sur ces pièces élémentaires", ajoute Dominique Delbouis.

La création des nouvelles entités aérostructures doit entrer en vigueur au 1er janvier 2022.

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Commentaire 1
à écrit le 21/04/2021 à 19:22
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Les PMI qui avaient investit en aérostructures comme figeac vont être ravies !

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