OneWeb Satellites : Airbus expérimente la production en série des satellites

Depuis Toulouse sont assemblés en ce moment les premiers modèles de la constellation OneWeb dont la mission est de donner un accès internet haut-débit à tous les habitants de la planète. Reportage au cœur du site toulousain où Airbus produit pour la première fois de son histoire des satellites en série.
La chaîne d'assemblage OneWeb Satellites est équipée de smart tools.
La chaîne d'assemblage OneWeb Satellites est équipée de smart tools. (Crédits : Dominique Eskenazi pour OneWeb Satellites)

"Quand nous avons commencé à travailler sur OneWeb, nous étions plusieurs à penser que c'était un projet complètement dingue. Aujourd'hui, même si les satellites ne volent pas encore, nous pouvons dire que nous y sommes arrivés", lance Arnaud de Rosnay, vice-président des satellites de télécommunications d'Airbus. Il y a trois ans, le groupe aéronautique européen s'est allié avec l'opérateur américain OneWeb pour créer la coentreprise OneWeb Satellites. Objectif : réaliser une constellation de 900 satellites qui donnera un accès internet haut-débit à bas coût au monde entier.

Une quarantaine de satellites produits par mois

D'ici la fin de l'année 2018, les dix premiers modèles de la constellation OneWeb seront envoyés dans l'espace. Ils seront fabriqués à Toulouse dans une nouvelle usine de 4 600m2 au sein d'Airbus Defence & Space qui emploie 150 personnes (dont 80 salariés Airbus détachés pour le projet). Le reste de la constellation sera ensuite fabriqué en série dans une usine en Floride avec des lancements tous les mois.

"En général, nous fournissons 8 à 10 satellites par an. Là, il est prévu que la production en Floride atteigne 40 à 44 satellites par mois, soit plus de deux par jour !" illustre Claude Lorda, chef de projet Ioda (In orbit demonstration by Airbus, un service d'accès à l'espace pour des démonstrations et validations en orbite réalisé en partenariat avec l'ESA, basé sur des satellites dérivés de la plate-forme conçue pour OneWeb).

Pour la première fois de son histoire, Airbus expérimente la production en série de satellites. Cette cadence a obligé le constructeur à totalement revoir ses processus de fabrication.

Une véritable chaîne d'assemblage

"Traditionnellement, les équipes travaillent autour du satellite qui ne bouge que très peu. Au sein de OneWeb Satellites, ce sont les éléments du satellite qui sont déplacés à travers la chaîne d'assemblage, poursuit Claude Lorda. Le satellite OneWeb a été conçu en quatre modules : l'avionique (alimentation du satellite, communication avec la Terre, maintien sur la bonne orbite et la bonne orientation), la propulsion qui permet d'amener le satellite vers son orbite finale et l'y maintenir, les panneaux solaires et la charge utile. La Fal (final assembly line) est organisée par station traitant chacun des modules. Un petit robot transporte les palettes contenant les éléments du satellite entre les postes de travail. Il se repère en suivant la ligne rouge tracée sur le sol où des puces RFID ont été installées.

"Quand les quatre modules sont intégrés et testés, nous commençons à les assembler pour arriver au satellite final. Entre le moment où l'on commence la fabrication d'un satellite et le moment où il ressort, il se passe moins de trois semaines", ajoute-t-il.

L'autre défi de la production en série d'une constellation aussi grande réside dans les tests. "Habituellement, nous faisons subir à chaque satellite des tests pour reproduire par exemple les vibrations du lancement ou les températures extrêmes de l'environnement spatial... Cela coûterait une fortune de le faire sur les 900 satellites de la constellation. Nous réalisons donc cette batterie de tests uniquement sur les quelques satellites qui vont servir à la qualification", détaille Claude Lorda.

Tout l'enjeu sera de reproduire la même qualité de fabrication sur les satellites envoyés dans l'espace.

Visseuse intelligente, géolocalisation et caméras

Pour y parvenir, chaque poste de travail est équipé de smart tools. Claude Lorda nous montre une visseuse "intelligente". Dotée d'un système de géolocalisation, elle est capable de déterminer avec une précision de 5 mm où se trouve l'embout de vissage. Si l'opérateur se positionne au mauvais endroit, la machine s'arrête. Au-dessus de l'opérateur, on peut apercevoir des caméras qui filment tous ses gestes. L'ensemble des données captées est envoyé à un système de big data capable d'estimer le niveau de qualité de la production. Une fois terminés, les satellites partiront en conteneur vers la base de lancement. Alors que d'ordinaire, des tests (notamment de carburant) sont réalisés à Kourou en Guyane avant le décollage, les satellites OneWeb seront envoyés dans l'espace sans passer par cette étape.

Avec de tels changements dans les processus de production, y a-t-il un risque que ces satellites ne fonctionnent pas ?

"Officiellement, je suis serein, sourit Arnaud de Rosnay, vice-président des satellites de télécommunications d'Airbus. Les 10 premiers modèles seront opérationnels et permettront de valider les systèmes. Ensuite, nous avons quelques mois entre le lancement des premiers modèles et celui du reste de la constellation au rythme de toutes les trois semaines. Nous pourrons mettre ce laps de temps à profit pour faire des améliorations. Mais des pans entiers du satellite n'ont aucune raison d'être modifiés. On parle peut être d'optimisation du logiciel ou de la charge utile".

Réutiliser l'expérience OneWeb pour d'autres missions

Surtout, l'expérience acquise avec OneWeb va permettre à Airbus de vendre à des agences spatiales ou d'autres opérateurs son savoir-faire acquis en matière de constellations de petits satellites.

"À partir d'un satellite OneWeb, l'idée est de créer une plateforme où l'on enlève la partie spécifique de OneWeb autrement dit la charge utile permettant de donner un accès internet, afin de l'utiliser pour d'autres missions. Pour le projet Earthnow, nous allons installer à la place une caméra sur les satellites pour observer en temps réel la Terre. D'autres applications pourraient venir avec l'Internet des objets, on pourrait aussi installer des capteurs méteo ou atmosphériques. L'avantage est d'avoir une plateforme à un coût abordable et qu'on peut produire rapidement", poursuit Arnaud de Rosnay.

Si les constellations de petits satellites peuvent apporter un vrai plus pour toute une série d'applications qui ont besoin d'une réactualisation en temps réel des informations (jeux en ligne, télémédecine, services bancaires), le cadre d'Airbus estime que les traditionnels satellites géostationnaires resteront indispensables pour certains usages comme la télévision en direct ou l'internet haut débit.

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