Pili lève 14,5 millions d'euros pour décarboner l'industrie de la couleur

Moment fatidique pour la biotech toulousaine Pili, qui ambitionne notamment de décarboner l'industrie du textile, mais pas que. La jeune pousse vient de lever 14,5 millions d'euros pour passer d'une société de recherche à une société industrielle. Cette opération doit notamment lui permettre de financer un démonstrateur industriel dans l'Isère et lancer la production de son premier produit, un indigo biosourcé.
La biotech toulousaine Pili a mis au point un indigo biosourcé.
La biotech toulousaine Pili a mis au point un indigo biosourcé. (Crédits : Marie-Sarah Adenis)

C'est un pas de plus pour la biotech Pili dans sa mission de décarboner l'industrie de la couleur. La société toulousaine, installée chez TWB, vient de boucler un nouveau tour de table de 14,5 millions d'euros. Cette levée de fonds va tout d'abord permettre à l'entreprise née en 2015 de lancer la commercialisation et la production à grande échelle de son premier produit : un indigo, ce pigment très utilisé dans l'industrie textile notamment pour colorer les jeans, biosourcé.

« C'est un indigo qui combine les performances d'un indigo synthétique et qui est plus vertueux pour l'environnement. Il est biosourcé, c'est-à-dire qu'il est produit à base de sucres industriels dérivés de l'amidon à partir de biomasses (...) On l'oublie mais l'industrie de la couleur rejette 220 millions de tonnes de CO2 chaque année », commente auprès de La Tribune Guillaume Boissonnat-Wu, le directeur scientifique et industriel et cofondateur de Pili.

En remplaçant l'indigo pétrosourcé par son indigo biosourcé, Pili parvient à réduire drastiquement la dépendance au pétrole de cette industrie et diminue les émissions de CO2 liées à sa production de plus de 50% selon des chiffres communiqués par la biotech toulousaine. Pour y parvenir, la jeune pousse travaille sur un procédé industriel basé sur deux étapes à savoir « une partie fermentation microbienne avec des matières renouvelables », suivie « d'une étape de chimie », avait précisé auprès de La Tribune en 2021 Jérémie Blache, le CEO.

Pili

Guillaume Boissonnat-Wu, Marie-Sarah Adenis et Jérémie Blache, les co-fondateurs de Pili, veulent décarboner l'industrie de la couleur (Crédits : Pili).

Quatrième levée de fonds

L'entreprise a déjà sécurisé « plusieurs millions d'euros de chiffre d'affaires » avec des pré-commandes de colorants et pigments biosourcés pour cet indigo, notamment auprès de deux acteurs de l'industrie du textile. Son marché premier et d'origine lié au fait que la jeune pousse a été incubée en 2017 dans une structure dédiée au textile responsable aux Pays-Bas, Fashion For Good. Mais Pili souhaite aussi s'adresser aux marchés de la peinture et de l'encre.

Lire aussiPeinture biosourcée : Colibri, la success story toulousaine qui se rêve en enseigne nationale

« Nous avons mis au point une technologie plateforme sous forme d'intermédiaire qui nous permettra à terme de produire plusieurs gammes de produits avec plusieurs couleurs. L'idée est d'avoir une gamme de produits pour chacune de ces trois applications à partir du jaune, du bleu et du rouge, avec lesquelles nous pouvons reproduire toutes les couleurs », précise Guillaume Boissonnat-Wu.

Ainsi, un autre tiers de la nouvelle levée de fonds doit lui permettre de poursuivre la R&D sur ces autres marchés visés. C'est le quatrième tour de table pour Pili depuis sa naissance en 2015. Une opération en seed auprès du Toulousain WiSEED lui avait permis de lever un million d'euros en 2018, avant une autre d'amorçage avec Elaia Partners notamment de 3,5 millions d'euros mi-2019. Cette levée de fonds avait fait l'objet d'une extension du même montant, couplée à l'obtention d'une subvention du fonds France Relance de 1,5 million.

Lire aussiFrance Relance : Pili crée des colorants et pigments, écologiques et français

Pour le nouveau tour de table en Série A, Pili est parvenue à rassembler le fonds Ecotechnologies 2, géré par Bpifrance dans le cadre des actions du plan France 2030. Cette opération permet également de faire rentrer au capital la holding d'investissement Famille C Participations et une société privée italienne dont le nom n'a pas filtré, aux côtés des investisseurs historiques de Pili (Elaia Partners, SOSV et le réseau de business angels allemands Startupangels.de, qui ont réinjecté des fonds).

Une usine dans les prochaines années ?

En huit ans, la direction de Pili dit avoir mobilisé 30 millions d'euros depuis sa création. Mais la nouvelle levée de fonds de 14,5 millions d'euros doit lui permettre de franchir un cap : passer d'une société de recherche avec très peu de chiffre d'affaires à une entreprise industrielle qui devra réaliser « plusieurs millions d'euros de chiffre d'affaires »d'ici fin 2024.

« Notre prochain challenge va être ce changement d'échelle, c'est-à-dire devenir une PME industrielle qui produit des molécules biosourcées. Une dernière partie de la nouvelle levée de fonds doit nous permettre de financer un démonstrateur industriel avec une capacité de production de 10 tonnes par an », précise le directeur scientifique et industriel de la biotech toulousaine.

Si le siège social de cette dernière et ses équipes R&D sont installés à Toulouse, pour un total de 15 salariés, Pili a choisi Roussillon (Isère) pour installer ce démonstrateur où elle y a trouvé une plateforme industrielle adaptée à ses besoins. « Nous sommes aussi dans la vallée de la chimie, qui abrite des partenaires et sous-traitants de Pili », justifie Guillaume Boissonnat-Wu. Ainsi, une dizaine de recrutements devrait être réalisée à Roussillon dans les 18 prochains mois sur des profils techniques tels que des ingénieurs procédés, des techniciens et des opérateurs de production.

D'ici deux à trois ans, la biotech ouvre la porte à un nouvelle levée de fonds plus conséquente pour financer son usine, qui affichera une capacité de production de plusieurs milliers de tonnes. « Nous serons rentables que quand nous aurons notre propre outil de production en interne et ce point fera l'objet d'une opération de financement spécifique », confirme le dirigeant. Pour l'instant, le montant de cet investissement n'est pas arrêté.

Lire aussiAvec ses poudres nutritives upcyclées, Green Spot Technologies s'insère dans l'industrie agroalimentaire

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.