Aujourd'hui, l'IoT est souvent utilisée dans l'industrie pour réaliser du suivi d'outils, d'équipement ou de certaines pièces. Trop onéreux, contraignants techniquement, nécessitant une alimentation murale ou une batterie, les capteurs connectés sont très peu déployés à grande échelle dans l'industrie. La donne devrait cependant changer. Le Toulousain Uwinloc a mis au point une solution de traçabilité, d'identification et de localisation des actifs au sein des zones de stockage sans ces inconvénients. Dénuée de pile et code-barres et de la taille d'une moitié de carte de visite, MahVis fonctionne grâce à la collecte d'énergie radio et de l'émission radio ultra wideband (UWB). Cette innovation est présentée comme une première mondiale par la société.
Répondant aux exigences de l'industrie 4.0, cette innovation a été co-développée avec des industriels de premier plan mondial comme Michelin, Eramet ou encore Collins. Contrairement aux radio-étiquettes (RFID) et tags à code-barres habituellement utilisés pour baliser les palettes et autres cartons dans les espaces de stockage, ce tag permet aux industriels, de tous secteurs, d'avoir une visibilité de 100 % sur l'ensemble de leurs stocks de produits finis ou de pièces détachées et d'optimiser leurs opérations. Destinée prioritairement aux responsables de sites et aux caristes, cette étiquette connectée est aujourd'hui la seule solution qui permet de suivre des millions de produits étiquetés, simultanément dans les entrepôts, avec non seulement l'identification de produit, mais aussi sa localisation précise.
Ainsi, ce tag, à placer sur les cartons, caisses et autres pièces qui doivent être tracés, permet aux industriels d'optimiser leurs espaces de stockage ainsi que le pick and drop des caristes, de réaliser des inventaires automatisés (sans lecture de code-barres), de réduire le temps de recherche des produits dans un espace, etc. MahVis réduit de 30 % à 40 % la consommation des véhicules et peut entraîner une réduction de 20 à 25 % du parc de chariots élévateurs. De plus, elle évite aux équipes les erreurs de chargement et de non-conformité qui entraînent des coûts supplémentaires. Enfin, elle améliore les conditions de travail des caristes et évince des processus les tâches lourdes à faible valeur ajoutée comme les étapes de "douchage" de code-barres par exemple.
"Les seules technologies qui ont réussi à scaler dans le monde de la traçabilité, ce sont celles sans pile. De plus, au cours des dernières années, près de 4.000 acteurs ont émergé avec des solutions actives, avec soit du bluetooth ou du wifi par exemple, qui, certes, sont intéressantes parce qu'elles offrent une possibilité de localisation mais sont équipées d'un boîtier à pile. Si une pile tombe en panne ou qu'il faut la remplacer, l'industriel est obligé d'arrêter sa production ou son flux logistique dans la zone, ainsi que de mobiliser de l'humain ce qui représente un coût phénoménal. Enfin, le tag à piles est beaucoup plus volumineux (5 centimètres d'épaisseur). Il ne permet pas d'empiler des cartons dans un entrepôt et représente une contrainte opérationnelle. Un tag ne peut pas être plus épais que 2 mm pour être déployé dans les flux logistiques", explique Éric Cariou, CEO d'Uwinloc fondée en 2015, au sein du Bizlab d'Airbus.
Localisation et traçabilité en intérieur et extérieur
MahVis repose sur deux briques technologiques, deux puces brevetées, qui ont nécessité près de dix millions d'euros d'investissement et plusieurs années de R&D. La première est dotée d'une portée de collecte d'énergie de plus de 20 mètres et la seconde puce UWB basse consommation permet d'émettre un signal avec très peu d'énergie environnante. L'étiquette connectée peut à la fois réaliser de la traçabilité et de la localisation dans les zones de stockage à l'intérieur et à l'extérieur. Uwinloc est ainsi capable de localiser un produit tagué avec une précision de moins d'un mètre indoor et moins de trois mètres outdoor. De plus, cette innovation génère automatiquement de la data qui va permettre aux professionnels d'améliorer leur processus par la suite.
"Nous venons de déployer la solution au sein d'Eramet, à Pamiers, sur neuf hectares d'aires de stockage à l'extérieur. L'usine réalise des pièces pour l'aéronautique, des alliages qui peuvent être stockés durant de longues années comme quelques jours. Elle en a des dizaines de milliers à l'intérieur et à l'extérieur. À partir de sa référence produit (présente sur le bon de commande) qu'il va la scanner avec la tablette fournie, le cariste voit s'afficher sur l'écran l'endroit exacte où se situe la caisse", révèle le cofondateur de la société.
"Un prix défiant toute concurrence"
L'innovation est commercialisée depuis peu sous forme LaaS. Un client qui démarre va débourser une fois 4.500 euros en coût d'installation puis 950 euros par mois par module MahVis et 0,35 centimes d'euros par mois et par tag. "Le client paie un loyer mensuel fixe qui couvre le hardware, le logiciel et la maintenance. Le coût de notre tag défie toute concurrence, c'est du jamais vu. Cela s'explique par l'absence de pile", affirme Eric Cariou.
Pour l'heure, la solution est déployée chez des partenaires, en France, qui ont contribué à son co-développement, en Angleterre au sein de Rolls Royce ou encore British Aerospace et en Allemagne chez Bombardier. En 2022, Uwinloc a pour but de convaincre une quarantaine de clients en Europe et d'atteindre une dizaine de sites couverts aux États-Unis. Pour atteindre le second objectif, l'entreprise toulousaine compte s'appuyer sur sa filiale new-yorkaise ouverte en 2019.
"La solution peut également être utilisée en dehors de l'industrie. Nous sommes en train de mettre en place un partenariat avec un acteur de la santé américain. Il y a deux ans, nous avons signé un contrat avec Cisco (entreprise américaine leader mondial de la transformation numérique, de l'IT et des réseaux) qui va aboutir au lancement, fin 2022 début 2023, d'un nouveau produit destiné à réduire les coûts d'installation de notre solution fixe."
Devenir un standard global
Depuis sa création et en parallèle de MahVis, Uwinloc développe une solution fixe, des étiquettes géolocalisables avec une précision de 30 centimètres et fonctionnant sans pile, alimentées en énergie uniquement grâce au captage des signaux radio. Cette innovation unique, brevetée, est utilisée par plus de 30 grandes entreprises (Airbus, Alstom, Thales, Safran...) dans six pays différents.
Après avoir réalisé un premier tour de table de 4,5 millions d'euros en 2018 et quelques obligations convertibles pour un montant avoisinant les quatre millions d'euros, Unwinloc est sur le point de boucler une levée de fonds de six millions d'euros. Cette somme devrait servir a accélérer son développement à l'international et le produit. Ce nouveau tour de table lui permettra également de renforcer son équipe de 24 personnes (dont 22 depuis son siège social à Toulouse) sur les parties techniques et commerciales. Elle qui possède déjà des équipes commerciales en Angleterre et en Allemagne, souhaite renforcer sa présence en Europe du Nord et aux Etats-Unis.
En 2021, Uwinloc revendiquait un revenu de près d'un million d'euros dont 30 % à l'international. Avec un nouveau produit et de nouveaux marchés, l'entreprise vise un chiffre d'affaires "très nettement supérieur" pour 2022 avec une part de 45 % à l'international, sans pour autant communiquer sur son prévisionnel.
"Notre rôle est d'aider les industriels à regagner un avantage compétitif. Nous avons le potentiel pour être un élément majeur de la transformation des industriels en Europe et leur permettre de retrouver des points de marge, de la latitude et de l'agilité. L'objectif est que notre solution devienne un standard global", conclut le dirigeant d'Uwinloc.
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