Jean-Jacques Romatet : "Le CHU de Toulouse vise la 1re place des hôpitaux français"

A la tête du Centre Hospitalier Universitaire depuis 2007, Jean-Jacques Romatet pilote plusieurs chantiers qui vont transfigurer l'hôpital toulousain. Avec les pôles de compétitivité, il participe également à plusieurs projets innovants qui visent à faire de Toulouse un pôle majeur de santé publique. Comment se positionne le CHU par rapport aux autres hôpitaux ?

A la tête du Centre Hospitalier Universitaire depuis 2007, Jean-Jacques Romatet pilote plusieurs chantiers qui vont transfigurer l'hôpital toulousain. Avec les pôles de compétitivité, il participe également à plusieurs projets innovants qui visent à faire de Toulouse un pôle majeur de santé publique.

Comment se positionne le CHU par rapport aux autres hôpitaux ?
Le CHU de Toulouse a été classé 2e dans le classement national du Point en 2009, c'est évidemment une satisfaction. Si vous regardez le classement du magazine sur 12 ans ou 13 ans, vous verrez que nous sommes sept ou huit fois les premiers. Et quand on arrive à être premier avec l'hôpital de Rangueil qui a 35 ans, avec l'hôpital de Purpan qui n'avait pas été rénové depuis la guerre de 40... Qu'est ce que ça va être lorsque nous aurons l'hôpital de Rangueil rénové et celui de Purpan complètement reconstruit ! Nous sommes en matière de santé à peu près ce qu'est le Stade Toulousain en rugby.

Des travaux importants ont été engagés, de quoi s'agit-il ?
C'est vrai que nous avons lancé un plan d'investissements très importants sur plusieurs années. Nous allons ouvrir un nouveau plateau technique pluridisciplinaire sur le site de Rangueil. Ce bâtiment, le BOH3 (bloc et réanimation) sera équipé d'un robot chirurgical et de très nombreuses autres innovations. Il représente un investissement de 62,7 M€ et ouvrira au dernier trimestre 2010. Les blocs opératoires seront dédiés à la chirurgie digestive, pour l'urologie, la gynécologie, la chirurgie plastique et la chirurgie cancérologique. Cet équipement va faire de Rangueil un haut lieu de la chirurgie.

Des travaux sont également en cours à Purpan ?
Oui nous sommes en train de construire la Clinique Pierre Paul Riquet Purpan, un vaste bâtiment, à peu près 80 000 m2, qui sera ouvert en face de l'Hôpital des Enfants. Ce projet équivaut à un investissement de 324 M€. L'ouverture est prévue fin 2012. Les travaux du bâtiment, construit par le cabinet d'architectes Cardete et Huet, se déroulent à la semaine près et dans des conditions parfaites. En face de l'Hôpital Mère Femme Enfants, nous allons également construire le nouveau centre Urgences Réanimation Médecines. L'investissement s'élève à 80 M€ et l'ouverture est aussi prévue pour 2012. Avec ces deux projets, on peut dire que le site de Purpan dans son entier sera rénové et deviendra l'un des hôpitaux les plus modernes de France et d'Europe.

Où en est le projet de Clinique Universitaire du Cancer ?
Les travaux avancent. Il faut bien avoir à l'esprit que ce projet est totalement inédit en Europe. En 2012, les malades auront accès à une nouvelle plateforme technique en cancérologie orientée recherche et innovation, mutualisée et accessible à tous les acteurs publics et privés. Ce nouvel hôpital réunira les équipes du Centre Claudius Regaud et certaines équipes du CHU.

Quels sont les liens du CHU avec le pôle de compétitivité Cancer-Bio-Santé ?
Nous avons des liens forts avec les trois pôles de compétitivité et nous sommes évidemment très liés avec le pôle Cancer-Bio-Santé dont j'ai la chance d'être vice-président aux côtés du président Pierre Montoriol. Le président de la République nous a fait remarquer que la France avait perdu des places dans la compétition mondiale. Nous avons entendu le message et sommes déterminés à y remédier, y compris grâce à des programmes communs avec les deux autres pôles Aerospace Valley et Agrimip Innovation. Avec ce pôle agro, nous mettons en place des programmes de santé publique pour combattre l'obésité. Quand on voit le nombre d'enfants en surpoids, on comprend que la situation s'aggrave à une vitesse inquiétante et qu'il faut développer une médecine du « bien manger ».

Deux appels à projets sont en cours pour des actions au niveau national. De quoi s'agit-il ?
Il s'agit d'un appel à projet sur le centre d'excellence en cancérologie et sur le projet d'Institut Hospitalo-Universitaire du vieillissement (IHU). Les IHU, dont la création a été annoncée par le président de la République le 20 septembre 2009, ont pour objectif d'être des centres d'excellence organisés autour des plateformes de soins, de recherche et d'enseignement de niveau mondial. La dépendance, c'est le grand ennemi de demain et nous sommes déterminés à nous battre sur ce terrain.
Ce label IHU sera accordé à cinq centres maximum au niveau national dans le courant de l'année. Nous avons évoqué ce dossier avec Nora Berra, la secrétaire d'État aux Aînés, lors de sa visite à Toulouse début février.

Et le Centre d'Excellence en Cancérologie ?
Nous allons nous battre pour obtenir ce label dans le cadre d'un appel à projets destiné à labelliser environ cinq centres d'excellence au niveau national. Comme pour les IHU, il s'agit de focaliser les crédits de la recherche sur des ensembles de soin et de recherche cohérents, disposant de la masse critique suffisante et s'inscrivant dans une grande dynamique locale. Pour Toulouse, il s'agit de fédérer toute la cancérologie publique (la future Clinique Universitaire du Cancer, mais aussi toute la cancérologie du CHU, de Rangueil et Purpan) et en s'appuyant aussi sur les meilleures équipes publiques et privées qui pourront être associées à ce projet, soit par des co-utilisations d'équipements, soit sur des projets de recherche. Il faut bien voir qu'aujourd'hui, un CHU est à la fois un lieu de soin mais aussi de formation, de recherche et d'innovation.

Le CHU est-il engagé dans une démarche de e-santé ?
Oui, nous sommes impliqués dans un projet national puisque nous sommes Centre National de Référence (CNR) Santé à domicile et Autonomie. Le Centre Expert e-santé (CEES) verra le jour le 1er mars 2010 à Toulouse, précisément dans une aile de l'Hôtel-Dieu. Il est destiné à faciliter le développement de la filière santé à domicile et autonomie. C'est un dossier majeur car la filière santé à domicile peut à la fois faire reculer la dépendance et générer des économies. Voyez qu'avec tous ces projets, le CHU entend jouer un rôle important dans le développement économique de Toulouse.

Quels sont les domaines d'excellence du CHU de Toulouse ?
Sur le site de Rangueil, le CHU dispose d'une spécialité cardio-métabolique de niveau européen. Même chose pour la chirurgie digestive. Il y a aussi un très bon service d'urologie et de chirurgie gynécologique. Sur l'hôpital de Larrey, nous avons un service cœur-poumon de très grand niveau qui est toujours classé premier. Sur le site de Purpan, inutile de vous dire que l'Hôpital de la Mère et l'Hôpital des Enfants sont des réussites complètes. Nous avons aussi un des pôles très performants en neuroscience (médicale et neurochirurgicale), orthopédie, rhumatologie, ORL, ophtalmo sans compter la médecine infectieuse qui est très réputée. Mais il est difficile d'être exhaustif pour un CHU qui compte 80 services et 15 pôles techniques.

Quelle est la clientèle de l'hôpital ?
Nous avons des patients de proximité mais aussi une « clientèle » régionale au sens large qui vient de Perpignan/Béziers, Pau, Agen et même Limoges et Brives.

Quel type de management exercez-vous ?
Dans un CHU qui est un établissement très complexe, il n'est pas imaginable de prendre une décision ex abrupto, sans un process transparent et participatif. Même si personne ne doute que lorsqu'il faut trancher, c'est moi qui tranche. Le fait d'avoir à la fois à accomplir des missions du service public et de se retrouver dans une compétition d'efficience, nous oblige à avoir une organisation de bonne qualité. D'ailleurs le CHU de Toulouse vient d'être certifié par la Haute Autorité de Santé pour l'ensemble de ses activités. C'est une grande récompense de nos pairs et nous faisons beaucoup mieux que Bordeaux, Montpellier ou Marseille. Je dois dire que c'était un énorme dossier, une véritable épreuve avec six visiteurs nuit et jour pendant un mois. Le rapport définitif est très bon car le CHU est certifié sans réserve et sur 375 critères. C'est un excellent résultat grâce à l'engagement des 13 000 médecins et personnels de l'établissement.

Quelles sont vos relations avec Pierre Cohen qui est président du CHU en tant que maire de Toulouse ?
Très bonnes parce que très franches.

Quel bilan tirez-vous de la gestion de la grippe A ?
L'épisode de la grippe est passé plus facilement que nous pouvions le craindre, on peut s'en réjouir. Je crois que ce qu'il faut retenir de la grippe A est que c'est la première pandémie qui a été suivie au niveau mondial et que nous n'avons pas le droit de passer à côté d'une défaillance. Ce qu'il faut retenir aussi, c'est que les médecins ont suivi les recommandations de vaccination mais que nos soignants ne se sont pas vaccinés suffisamment. Ce n'est pas une bonne chose. C'est même une vraie régression. Les problèmes liés aux vaccins sont incomparablement inférieurs aux bénéfices qu'ils apportent. Et la moindre des choses, c'est qu'un soignant prenne toutes les précautions pour ne pas transmettre une infection.

Propos recueillis par Emmanuelle Durand-Rodriguez

En savoir plus :
Le CHU de Toulouse en chiffres
- 80 services, 15 pôles techniques et 5 médico-techniques
- 13 000 emplois dont 11 000 équivalent temps plein (dont 3 000 médecins)
- Répartition du personnel hospitalier : soins 61 % ; médico-techniques 15 % ; logistique et technique 16 %, administration 8 %
- chiffre d'affaires 2009 : 900 millions d'euros
- Premier acheteur public de Midi-Pyrénées selon l'enquête réalisée en 2009 par Secteur Public
- Le programme de travaux de construction devrait générer, à l'horizon 2014, plus d'un milliard d'euros d'achats.

En photo : Jean-Jacques Romatet, directeur du CHU de Toulouse (© Rémi Benoit)

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