Les espaces de coworking d'Occitanie à la recherche d'un modèle économique

La Mêlée a rassemblé une cinquantaine de signataires pour demander à la Région Occitanie la création d'un réseau régional des tiers-lieux. Le coworking connaît un essor grandissant mais peu de structures vivent de cette activité. Comment peuvent-elle trouver un modèle économique viable ? Éléments de réponse avec Annie Fachetti, coanimatrice de la commission télétravail de La Mêlée.
115 tiers-lieux ont déjà été recensés sur la Région Occitanie.

Le coworking connaît un essor grandissant en Occitanie. A-t-on une idée précise du nombre de tiers-lieux sur la région ?

Depuis le lancement du site tierslieuxoccitanie.com en septembre dernier, nous avons déjà pu recenser 115 tiers-lieux sur les départements de la région Occitanie. Mais nous apprenons l'existence de nouveaux lieux chaque semaine. Encore ce matin, j'ai découvert un tiers-lieu sur mon territoire, en Ariège. La Haute-Garonne concentre 37 des 115 tiers-lieux (soit 32% du total), devant l'Hérault (14 lieux) et le Tarn (9) (voir la répartition détaillée ci-dessous, NDLR). On peut remarquer par ailleurs que dans l'ex-région Languedoc-Roussillon, l'offre est beaucoup moins développée (mis à part en Lozère).

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La prochaine étape sera de qualifier cette base de données en incitant les tiers-lieux à compléter des informations supplémentaires visibles sur le site : modèle économique, nombre de postes et de places disponibles, services et tarifs proposés pour un poste de travail. Cela permettra d'avoir une idée plus précise de l'offre de coworking en Occitanie.

Quel est le modèle économique des tiers-lieux ?

Ces tiers-lieux ont des modèles économiques différents : totalement public, privé ou issu d'un partenariat public-privé. Il existe très peu de tiers-lieux pour qui l'activité de coworking est rentable. Si l'on prend l'exemple de La Cantine, les deux sites (rue d'Aubuisson à Toulouse et au Quai des Savoirs) ne peuvent exister que parce qu'il y a des subventions pour financer en partie le fonctionnement et le coût de ce type de structures.

Les structures privées réalisent-elles des bénéfices?

Les structures privées sont souvent fondées par des indépendants qui se regroupent dans un même lieu en ouvrant des postes en coworking. Rien qu'avec la mutualisation des bureaux, leur point d'équilibre est quasiment atteint. Pour autant, ils ne réalisent pas forcément de bénéfices. L'autre problème est que la gestion d'un espace de coworking prend beaucoup de temps. Par exemple, Coworking Rodez a été fondé par trois indépendants réunis pour mutualiser des locaux. Mais après deux ans d'ouverture, ils nous ont dit que le travail de gestion, d'animation du lieu se fait au détriment de leur propre activité. Les gens ne viennent pas juste chercher un poste de travail mais du réseau, des animations formelles ou informelles et il faut quelqu'un pour s'en occuper.

Existe-t-il un coworking des villes et un coworking des champs ?

L'offre urbaine est très importante et grandissante. Toulouse concentre à elle seule 60% des 37 tiers-lieux du département de Haute-Garonne. Face à la concurrence grandissante, l'enjeu pour un lieu en ville est de constituer et de pérenniser une communauté de coworking Il faut aussi accepter que cette dernière puisse naviguer entre plusieurs tiers-lieux de la même agglomération.

L'offre périurbaine est moins développée même si plusieurs projets sont en train d'émerger. L'axe de développement de ces tiers-lieux repose sur la captation des flux domicile-travail pour permettre aux salariés de réduire les inconvénients liés aux migrations pendulaires.

En milieu rural, il faut à la fois parvenir à mailler le territoire (sachant qu'un coworkeur parcourra au maximum une vingtaine de kilomètres pour accéder au lieu) et constituer une offre suffisamment attractive pour attirer suffisamment de clients et pérenniser le site. Le tiers-lieu peut prendre des formes différentes. Dans l'Ariège, un tiers-lieu va voir le jour dans la petite commune de Laroque-d'Olmes (2 500 habitants) via un projet sur fonds privés. C'est une belle opportunité mais la question de la pérennité de ce lieu reste entière. À Auterives, au sud de la Haute-Garonne, un autre modèle économique a été choisi. L'espace de coworking a ainsi été installé dans une médiathèque, ce qui permet un coût marginal, et ce même si l'offre n'est pas rentabilisée. À noter que la Lozère (le département le moins peuplé de France, NDLR) compte déjà 7 tiers-lieux car il dispose depuis de nombreuses années d'un programme sur le télétravail et le coworking.

La Mêlée a rassemblé une cinquantaine de signataires (en grande partie des gérants de tiers-lieux) pour réaliser une contribution collective afin de répondre à un appel à manifestation d'intérêt de la Région Occitanie sur le coworking. Quelles sont vos attentes et vos besoins ?

L'un des principaux axes est de savoir comment attirer de nouveaux clients. Plus le nombre de tiers-lieux progresse, plus la concurrence est accrue et plus il faut se partager le gâteau. Aujourd'hui, dans les espaces de coworking, 85% de la fréquentation vient des indépendants. Mais il existe un grand potentiel de croissance du télétravail chez les salariés qui est à ce jour peu développé.

Pour éviter que chaque espace de coworking aille démarcher de son côté Airbus ou la SNCF, il faudrait pouvoir présenter aux DRH de ces entreprises les 115 lieux de coworking de la Région. Nous aimerions qu'il y ait un réseau régional des tiers-lieux comme l'ex-région Midi-Pyrénées l'a fait il y a plus de 20 ans sur les pépinières d'entreprises. On pourrait aussi imaginer un pass télétravail valable sur toute la Région qui simplifie les démarches pour les employeurs. Par exemple, si le mois de mars, une entreprise recense 30 collaborateurs qui ont télétravaillé dans 25 tiers-lieux différents, il faut qu'elle puisse à terme réaliser une facturation unique. Cela permet de rendre l'offre régionale de coworking plus lisible et plus facilement accessible. Le réseau pourrait permettre aussi de mutualiser les fonctions d'animation et de communication autour du tiers-lieu.

À Toulouse, un pass permet déjà d'accéder à cinq tiers-lieux (les deux Cantines, le Périscope, Etymôn et les Imaginations Fertiles). Un réseau départemental a également été mis en place dans le Tarn.

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