Spatial : la France livre un instrument pour la première récolte d'échantillons sur la face cachée de la Lune

La France s'apprête à livrer à la Chine l'instrument Dorn pour mesurer le radon, un gaz radioactif produit de façon continue sur le sol lunaire. Construit à Toulouse par l'Irap sous la houlette du Cnes, l'instrument est intégré à la mission Chang'e 6 qui vise à réussir une grande première mondiale : récolter des échantillons sur la face cachée de la Lune.
Construit à Toulouse par l'Irap sous la houlette du Cnes, l'instrument Dorn est le premier au monde à récolter des échantillons sur la face cachée de la Lune.
Construit à Toulouse par l'Irap sous la houlette du Cnes, l'instrument Dorn est le premier au monde à récolter des échantillons sur la face cachée de la Lune. (Crédits : Cnes, Frédéric Maligne)

Dans la mythologie chinoise, Chang'e est la déesse de la Lune. C'est également le nom choisi par la république populaire pour son programme d'exploration lunaire. « Dès 2007, avec la mission Chang'e 1, la Chine s'est positionnée en orbite autour de la Lune avant d'alunir avec un rover en 2013 puis de tester le retour automatique d'échantillons fin 2020 », rappelle Pierre-Yves Meslin, responsable scientifique de l'instrument Dorn.

La Chine vise un nouveau succès mondial

Cet instrument, construit à Toulouse par l'Irap (Institut de recherche en astrophysique et planétologie) sous la maîtrise d'ouvrage du Cnes, doit permettre à la Chine, avec sa mission Chang'e 6, de réussir une nouvelle grande première mondiale : récolter des échantillons sur la face cachée de la Lune. En effet, jusqu'à présent, les missions américaines Apollo et soviétiques Luna n'avaient foré dans le régolithe uniquement sur la face visible du satellite naturel de la Terre.

La France, n'ayant pas les moyens à elle seule de financer une mission lunaire, voit dans cette contribution au programme chinois l'opportunité d'y aller. L'accord de coopération avait été signé en 2019 lors de la visite du président Emmanuel Macron en Chine alors que la France a déjà travaillé de concert avec la nation asiatique sur le satellite d'océanographie CFOSAT et a livré des instruments de la mission SVOM pour l'observation des sursauts gamma.

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L'instrument Dorn a été fabriqué à Toulouse. (Crédits : Cnes, Frédéric Maligne)

Et ce n'est pas un hasard si la deuxième puissance économique mondiale a fait appel aux talents scientifiques toulousains. « La France est reconnue à l'international pour l'excellence de ses compétences en matière de récolte d'échantillons. Elle est en pole position dans ce domaine », informe Aurélie Moussi, cheffe de projet Cnes sur la mission. Le Cnes est notamment positionné sur la mission japonaise MMX (Martian Moons Exploration) dont l'objectif principal est de ramener sur Terre un échantillon de sol de Phobos, un des deux satellites naturels de Mars.

L'atterrisseur de Chang'e 6 sera équipé d'une pelle et d'une foreuse avec la possibilité de ramener jusqu'à 2kg d'échantillon. L'instrument français Dorn sera livré à l'agence spatiale chinoise au cours du mois de juillet pour un lancement prévu mi-2024. La mission totale doit durer au maximum un mois dont 48h d'activité à la surface de la Lune pour l'instrument Dorn.

Mieux comprendre l'atmosphère lunaire

Ce dernier est équipé d'un spectromètre capable de détecter les particules alpha émises par le radon, un gaz radioactif qui pourrait avoir un rôle central dans la constitution de l'atmosphère lunaire.

« L'objectif scientifique de la mission vise à comprendre les origines de cette atmosphère si fragile. Le vent solaire apporte en permanence des éléments chimiques comme de l'hydrogène ou du carbone qui peuvent venir se recombiner dans la surface lunaire pour créer de la vapeur d'eau, du CO2, du méthane... Les micrométéorites ont elles-mêmes apporté cette matière volatile. Enfin, certains gaz, comme le radon, peuvent provenir d'une origine endogène via le dégazage de la Lune. Ils peuvent migrer vers les régions polaires et se retrouver piégés dans le sous-sol de cratères lunaires où il fait tellement froid que les gaz vont former des glaces », développe Pierre-Yves Meslin.

Le chercheur souligne l'importance de réaliser des mesures sur place dès aujourd'hui étant donné que la compétition internationale pour le retour sur la Lune pourrait engendrer l'alunissage de multiples fusées dans les années à venir susceptibles de venir polluer cette atmosphère si atypique.

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