Depuis l’Aveyron, Fertilaine transforme la laine de mouton en engrais 100 % naturel

L'entreprise familiale aveyronnaise a mis au point un engrais éco-conçu à partir de laine de mouton et qui réduit de 25 % la consommation d'eau lors de l'arrosage. Écologique et économique, il permet de valoriser la laine des éleveurs tout en les rémunérant.
Fertilaine transforme la laine de mouton en engrais 100 % naturel.
Fertilaine transforme la laine de mouton en engrais 100 % naturel. (Crédits : Fertilaine)

Chaque année au printemps, les moutons sont tondus pour éviter la prolifération de parasites et pour leur confort. La tonte coûte en moyenne 1,50 euro par bête aux agriculteurs, mais ne leur rapporte quasiment rien. En effet, en France, seule une petite partie de la laine locale est vendue et transformée, en textile majoritairement, le reste part à la poubelle.

Depuis Vezins-de-Lévézou dans l'Aveyron, en plein cœur du bassin de Roquefort, la famille Fabry, éleveurs et producteurs de lait de brebis depuis plusieurs générations, a décidé de valoriser cette laine issue de la tonte de moutons en engrais naturel. Réalisé entièrement à base de laine, sans ajout de produits chimiques, Fertilaine n'a aucun impact négatif sur la nature.

« L'idée née en 2018 est celle de mon père qui en cherchant une solution pour fertiliser les sols naturellement s'est tourné vers la laine. Avec mon frère, Pierre-Marin, nous avons fondé l'entreprise en 2022. Aujourd'hui, nous sommes les premiers et les seuls en France à proposer un tel produit », explique Vincent Fabry, cofondateur de Fertilaine.

Un plus pour les plantes et les éleveurs

Le procédé de fabrication est simple : sans être lavée ni traitée chimiquement, la laine brute est déshydratée, broyée et réduite en granulés. Ce produit est naturellement riche en azote et en potassium, deux éléments favorables au bon développement des plantes. Il a une durée d'action de 6 mois et se dégrade lentement, contrairement aux engrais ordinaires. Doté d'une forte capacité de rétention d'eau de 300 %, il permet de diminuer la fréquence d'arrosage. En effet, la laine agit comme une éponge, elle absorbe et retient trois fois son poids en eau, ce qui permet de réduire de 25 % la consommation d'eau pour l'arrosage.

La laine nécessaire à la production provient uniquement de moutons aveyronnais. En plus de valoriser la matière, la jeune entreprise agit pour l'économie circulaire et offre aux éleveurs une rémunération juste pour leur travail. Ainsi, pour chaque kilo de fertilisant vendu, 20 centimes leur sont reversés. À l'avenir, le souhait de l'entreprise est d'augmenter cette somme afin de couvrir une partie des frais de tonte.

« Aujourd'hui, la laine française est considérée à 95 % comme un déchet. Depuis 2020, les exportations sont arrêtées. L'Aveyron est le premier département moutonnier français. Rien que dans le bassin de Roquefort, plus de 1.500 tonnes de laine sont produites par an. Fertilaine est une réponse à une filière en crise. Nous essayons de créer de la valeur pour les éleveurs et d'agir en faveur d'une agriculture plus durable. »

Faute de solutions en France et à cause d'une législation défavorable, Fertilaine confie la fabrication à un sous-traitant allemand. « La réglementation française ne nous permet pas de transformer de la laine brute en engrais organique. Nous voulons que les choses changent et alerter les législateurs. Notre souhait est de produire, créer de l'emploi et de la valeur localement, mais le cadre actuel ne le permet pas », regrette le chef d'entreprise.

Tester le produit sur le marché

 Destiné au grand public, Fertilaine a été lancé en mars 2023 via une campagne de financement participatif sur la plateforme Miimosa. La société a comptabilisé près de 1.500 précommandes, soit près de deux tonnes de laine, bien au-dessus de leur objectif de 100 précommandes. « Les commandes provenaient de partout en France, de Suisse, de Belgique, d'Angleterre, etc », se souvient Vincent Fabre. L'opération a permis à l'entreprise de gagner en visibilité et de lancer sa première production. Les premiers clients ont ainsi été livrés en mai dernier. Aujourd'hui, l'engrais 100 % naturel est commercialisé via le site internet de la marque et la marque est également distribuée localement au sein d'une dizaine de magasins spécialisés.

Dès 2024, la société souhaite débuter la vente et distribution de son produit à plus grande échelle, en région Occitanie, au sein de jardineries, pépinières, etc. Des discussions sont en cours avec de potentiels distributeurs. « Après cette phase de test commercial, nous pourrons nous lancer dans un développement national. Nous viserons tous les grands acteurs du marché, Gamm Vert, Jardiland, Delmas, etc », se projette-t-il. Dans le futur, si son développement et sa capacité de production lui permettent, Fertilaine envisage de s'adresser aux professionnels qui ont de plus grands besoins en engrais comme les municipalités, les horticulteurs, les viticulteurs, etc.

Etoffer la gamme

Aujourd'hui, le projet est entièrement piloté par les frères Fabry. Par ailleurs, Vincent a quitté son emploi dans la logistique et réparation en aéronautique afin de s'y consacrer pleinement. Ces derniers souhaitent commencer à recruter dès 2024 sur les parties production et commerciale. Persuadé des bienfaits de la laine et qu'elle n'a pas livré son plein potentiel, le duo se penche déjà sur la mise au point de nouveau produits qui viendront élargir et compléter la gamme Fertilaine. « Nous sommes en discussion avec l'école d'ingénieurs de Purpan, à Toulouse afin de mener des études agronomiques sur notre engrais. Nous avons des certitudes sur notre produit, mais nous voulons aller plus loin avec l'appui des scientifiques », termine Vincent Fabry.

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