Aéronautique : l'Onera prépare déjà l'arrivée de l'avion à hydrogène

Le centre français de recherche aérospatiale, l'Onera, a lancé cet été un programme de 40 millions d'euros pour moderniser ses bancs d'essai en Ile-de-France et en Occitanie afin de les préparer à l'arrivée des avions à hydrogène et des nouveaux carburants. Au sud de Toulouse, l'Onera va se doter d'une capacité de stockage d'une tonne d'hydrogène pour alimenter ses deux bancs d'essai.
Airbus s'est fixé pour objectif de faire voler un avion à hydrogène en 2035.
Airbus s'est fixé pour objectif de faire voler un avion à hydrogène en 2035. (Crédits : Airbus)

Airbus s'est fixé pour objectif de faire voler un avion à hydrogène dès 2035. Une rupture technologique à laquelle se prépare déjà l'Onera, le centre français de recherche aérospatiale.

"L'hydrogène, nous sommes déjà dedans. Nous disposons d'une petite capacité d'essai sur le banc Micado installé sur notre site de Palaiseau en Ile-de-France. Le premier essai d'une portion du moteur pour une caractérisation fine de la combustion va débuter à l'Onera dès février dans le cadre du projet Hyperion mené notamment par Safran et financé par la DGAC. Les essais visent à tester le fonctionnement en combustion de différents injecteurs innovants à hydrogène. Sachant que sur ce projet, l'aspect modélisation numérique a commencé depuis à peu près un an", lance Jérôme Anthoine, directeur du département multiphysique pour l'énergétique de l'Onera.

Des moyens actuels insuffisants face à l'arrivée des nouveaux avions

Mais les moyens de recherche actuels ne suffiront pas face à l'ampleur des tests requis pour intégrer la propulsion à hydrogène à bord d'un avion. Le centre de recherche a donc lancé cet été un programme d'investissement de 40 millions d'euros pour moderniser ses bancs d'essai en Ile-de-France et en Occitanie.

Baptisé Becar (pour bancs d'essai pour la combustion dans les futurs foyers aéronautiques), le projet doit se dérouler sur quatre années. Pour le moment, le financement du programme est assuré sur les deux premières années : 24 millions d'euros provenant à 80% de la DGAC, le reste étant issu de fonds du conseil régional  d'Occitanie (trois millions d'euros) et des fonds propres de l'Onera.

"Une combustion à l'hydrogène demande une température beaucoup plus élevée donc des contraintes plus importantes sur la chambre de combustion. Ces contraintes demandent de nouveaux moyens d'essais dont nous ne disposons pas actuellement et qui nous conduisent à rénover l'ensemble des bancs d'essai de l'Onera.

Avec le programme Becar, nous allons étendre les capacités de nos bancs d'essai pour aller faire fonctionner le moteur à plus haute pression, de l'ordre de 50 bars, contre à peu près une trentaine de bars actuellement, et de monter idéalement à 1.000 K (726°C) de température en entrée de chambre. Et en même temps, l'objectif est de faire fonctionner le moteur à un régime plutôt pauvre en combustible", détaille Jérôme Anthoine.

Le projet Becar vise aussi à doter les bancs de moyens d'essais de circuits de carburants de synthèse durables et d'hydrogène injecté froid (autour de 150 K, soit une température de -123°C). L'Onera dispose actuellement de deux bancs de combustion des moteurs à Palaiseau en Ile-de-France (M1 pour les essais plutôt complexes et Micado pour la caractérisation fine) et de deux autres bancs sur son site de Fauga-Mauzac, à 30 km au sud de Toulouse (Lacom pour la caractérisation de l'atomisation du brouillard et des instabilités de combustion et Mercato pour les essais d'allumage en altitude).

Grands travaux et stockage d'hydrogène doublé

Des travaux colossaux sont nécessaires pour moderniser les installations.

"Par exemple sur le banc M1 à Palaiseau, il faut remplacer un compresseur qui a 65 ans et qui pèse 43 tonnes. Son remplacement demande de revoir les fondations du bâtiment. Il faut aussi changer toute l'installation électrique. En Occitanie, pour la modernisation du banc Mercato, nous allons construire un bâtiment neuf dédié. Il s'agit donc de grands projets qui vont s'étaler sur quatre années", complète le directeur du département multiphysique pour l'énergétique de l'Onera.

Ces travaux seront aussi l'occasion de faire monter en puissance les capacités de stockage d'hydrogène des sites de l'Onera. En Ile-de-France, le site de Palaison va passer d'une capacite de 200 kilos actuellement à 500 kilos à l'issue du programme. En Occitanie, l'Onera disposera d'une zone de stockage d'une tonne d'hydrogène pour les besoin de ses deux bancs d'essai. L'ensemble devrait être opérationnel à l'été 2025. "Dans l'optique d'un avion à hydrogène en 2030 ou 2035, nous serions dans les temps", salue Jérôme Anthoine.

À noter que l'Onera mène d'autres programmes autour de l'aviation décarbonée. Le centre de recherche a lancé la semaine dernière près de Toulouse la construction du laboratoire PyCoFire pour tester la résistance au feu des matériaux composites de plus en plus utilisés par les constructeurs afin d'alléger le poids des avions. Des essais en vol sont également menés grâce à l'avion Blade pour réduire la consommation de carburant par laminarité. En altitude, un écoulement se produit le long des ailes de l'avion qui est d'abord laminaire avant de devenir turbulent avec une traînée et une consommation de carburant beaucoup plus importantes. L'objectif du programme est de repousser le plus loin possible cette transition vers la turbulence. Enfin, l'Onera mène avec l'Institut Pierre-Simon Laplace un programme de 12 millions d'euros pour mesurer l'impact climatique de la formation des traînées de condensation des avions.

Lire aussi 3 mnL'Onera construit un laboratoire près de Toulouse pour la résistance au feu des nouveaux avions

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