RSE : Longtime, le label toulousain contre l'obsolescence programmée en plein essor

LE MOIS DE L'ENGAGEMENT - INITIATIVES RSE. Deux Toulousains sont à l'origine de Longtime, le premier label indépendant européen à permettre aux consommateurs d'identifier les produits conçus pour durer et lutter contre l’obsolescence programmée. Parmi les six premiers fabricants qui ont décroché le sésame figurent de grands noms de l'électroménager (Rowenta, Whirlpool) mais aussi des PME adeptes du made in France.
Longtime est le premier label indépendant européen destiné à identifier les produits conçus pour durer.
Longtime est le premier label indépendant européen destiné à identifier les produits conçus pour durer. (Crédits : Ethikis)

"Notre presse-agrumes jaune et vert est utilisé dans tous les bistrots et bars en France. C'est notre produit mascotte, il a la réputation d'être increvable. Même sur un appareil des années 70, il suffit de changer quelques pièces pour qu'il reparte à neuf", lance Aurélien Fouquet à la tête de la PME lyonnaise Santos (17 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2019). Ce fleuron français des équipements professionnels fait partie des six premiers fabricants à avoir décroché le label Longtime.

41 critères à remplir

Premier label indépendant européen destiné à identifier les produits conçus pour durer, ce dernier a été imaginé par de simples citoyens toulousains qui ont décidé d'agir contre l'obsolescence programmée. Florent Preguesuelo, infirmier pendant dix ans et Elsa Lomont, qui a géré pendant six ans une structure de loisirs, ont fondé en 2018 la Scop Ethikis pour mettre en oeuvre leur projet.

"Le label Longtime, repose sur 41 critères répartis en trois piliers, détaille Elsa Lomont. Le produit doit être conçu pour assurer une longévité. Cela veut dire que le fabricant utilise des matériaux robustes. Par exemple, lorsque sur une machine à café il y a beaucoup de retours à cause d'une pièce particulièrement vulnérable, l'entreprise met en place des actions correctives pour que les pannes soient moins fréquentes.

Le deuxième pilier est celui de la réparabilité. Les pièces détachées pour remettre en état le produit doivent être disponibles pendant une longue durée (10 ans pour un aspirateur) et le prix de la réparation ne doit pas être excessif. Le troisième pilier est lié au contrôle des conditions de garantie et de service après-vente".

Le label est attribué suivant ce cahier des charges établi par Ethikis. Mais ce sont deux organismes indépendants (Ecocert et Apave Certification) qui se chargent de réaliser l'audit auprès de chaque entreprise candidate au label Longtime. Le fabricant doit ensuite débourser "quelques milliers d'euros" par an pour utiliser le logo sur ses produits.

Des circuits courts pour réparer les produits

De son côté Santos a pu décrocher le label sans bouleverser les processus de fabrication de ses presse-agrumes. "Comme notre gamme s'adresse à des professionnels, nos appareils sont majoritairement en acier, avec des moteurs asynchrones, dont la durée de vie est en théorie illimitée. D'où la différence avec des appareils B2C (pour les particuliers, ndlr)", souligne Aurélien Fouquet.

Santos a également la particularité de fabriquer en France, en faisant appel à des fournisseurs de proximité, ce qui facilite la réparation des pièces. "Nous privilégions les circuits courts puisque 80% de nos fournisseurs sont basés en Rhône-Alpes. Ce sont des partenaires de longue date, donc nous pouvons garantir la disponibilité des pièces d'antan, à très longue échéance", ajoute-t-il.

Autre adepte du Made in France et également labellisé Longtime, le fabricant de radiateurs électriques Univr'Chauffage met en avant depuis des années "le 100% réparable". "La majorité de nos fournisseurs sont implantés dans un rayon proche de notre entreprise. Cette fabrication française nous permet d'être très réactif dans la traçabilité et éventuellement le retour des produits aux fournisseurs", remarque Bruno Giorgi, dirigeant de la société qui réalise quatre millions d'euros de chiffre d'affaires annuel.

Pour lui, décrocher ce label permet de "valider par un organisme indépendant des particularités mises en avant par l'entreprise depuis des années". Son homologue de Santos partage cette vision. "L'impact est difficile à quantifier. Cela ne nous apporte pas encore des volumes de ventes supplémentaires. Par contre, le label a un intérêt en termes d'image de marque de l'entreprise et de valorisation du savoir faire, notamment à l'étranger."

Rowenta et Whirlpool labellisés

Le label Longtime commence aussi à débarquer dans les magasins d'électroménager. Rowenta, marque appartenant au mastodonte français de l'électroménager Seb (groupe qui a réalisé 1,5 milliard d'euros de chiffre d'affaires en 2018) affiche le logo Longtime sur l'un des aspirateurs de sa gamme qui a rempli les critères requis. De son côté, le groupe américain Whirpool a labellisé une partie de ses fours. "Nous avons audité avec succès notre plateforme de fabrication de fours implantée en Italie. Cela correspond à 50 modèles de four actuellement vendus sur le marché français : la collection W (la gamme premium de la marque, la ligne Absolute et celle que nous appelons Évolution et qui correspond aux produits pour les cuisinistes", décrit Aurélie Rochefolle, responsable RSE du groupe.

Avant d'ajouter : "Dès la conception des fours, nous prenons en considération leur réparabilité. À l'aide d'un simple tournevis, il est possible d'accéder rapidement à toutes les pièces importantes du four." Prochaine étape pour Whirlpool : labelliser sa gamme de lave-linge.

Un indice de réparabilité entre en vigueur

L'initiative toulousaine, annoncée en mai 2018, a tout de suite attiré l'attention des autorités françaises. Ethikis a intégré dans la foulée le groupe de travail sur l'instauration d'un indice de réparabilité dans le cadre du projet de loi sur l'économie circulaire. Depuis le 1er janvier 2021, les fabricants doivent apposer cet indice sur cinq familles de produits en France, à savoir les lave linge, les télévisions, les smartphones, les ordinateurs et les tondeuses électriques. Et ce n'est pas fini. Les autorités françaises planchent sur un indice de durabilité à l'horizon 2024 qui prendrait en compte en plus la durée de vie des produits.

"Nous observons un véritable retournement de marché. Les consommateurs veulent des produits durables et les fabricants voient qu'ils vont devoir s'adapter", remarque Elsa Lomont.

 De quoi promettre un bel avenir au label toulousain.


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Commentaires 3
à écrit le 18/05/2021 à 20:57
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Il y a un gros scandale pour ça, c'est la tondeuse à gazon électrique, le moteur électrique est composé d'un gros bobinage pour la puissance et un petit pour le déphasage, et c'est le petit qui crame, quoi 1h de boulot pouur remplacer, sauf que ce mo...

à écrit le 18/05/2021 à 11:18
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ils devraient songer a aller manifester contre les maisons ecolos, en platre et polystirene, qu'il faudra detruire et recycler dans 30 ans ha ben non, ca c'est ecolo, pas de manifs c'est ' une pollution juste et bienveillante' donc dans la morale (...

le 18/05/2021 à 14:03
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Les maisons écolos, fabriquées par qui ? Ça fait bizarre votre polystyrène, parlez-vous des isolants (quand expansé, emprisonne de l'air) servant à isoler les murs ? On détruit les maisons tous les 30 ans ? J'ai du PS entre plaques de placo(murs), j'...

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