C'est "une victoire", pour le syndicat Unsa Snmsac. Tandis que Force Ouvrière évoque "une prise de parole qui fait plaisir". Les représentants de ces syndicats au sein de Derichebourg Aeronautics, sous-traitant aéronautique toulousain de rang 1, ne comprennent la précipitation de leur direction à vouloir signer un Accord de performance collective (APC) avant le 10 juin, tout en ne fermant pas la porte à un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) par la suite, afin de faire face à la chute d'activité dans l'industrie aéronautique. Une situation sur laquelle s'est exprimé jeudi 4 juin Bruno Le Maire, le ministre de l'Économie, invité de l'émission télévisée "Vous avez la parole" sur France 2.
"Derichebourg peut attendre de voir ce que nous allons proposer dans le plan aéronautique, pour voir s'il y a des solutions dans ce plan. Il y a peut-être d'autres solutions de réduction des coûts (que celle de réduire les avantages sociaux à l'égard des salariés, ndlr)", a alors déclaré le membre du gouvernement.
Abondé certainement par les Conseils régionaux, ce plan, dont la présentation est attendue mardi 9 juin, devrait comporter une longue extension du chômage partiel pour la filière aéronautique, un dispositif de formation pour les salariés, un fonds de soutien à la sous-traitance et des crédits pour financer le développement de l'avion vert.
Le président de l'entreprise va à la rencontre de salariés mécontents
Pour le moment, la direction de Derichebourg Aeronautics n'a pas réagi à ces déclarations du ministre de l'Économie. Néanmoins, quelques heures plus tôt, à l'issue d'une réunion avec les représentants du personnel sur l'élaboration de cet APC, le président de l'entreprise, Pascal Lannette, est descendu à la rencontre d'environ 200 salariés venus témoigner leur mécontentement sur le site du siège de l'entreprise, situé à Blagnac.
Le syndicat Unsa Snmsac a mobilisé jusqu'à 200 personnes jeudi 4 juin devant le siège de Derichebourg Aeronautics, à Blagnac (Crédits : Rémi Benoit).
"Je ne sais pas qui a donné cette date du 10 juin (...) Mais nous voulons réagir rapidement car aujourd'hui nous sommes dans une situation extrêmement difficile. Je préfère agir maintenant plutôt que d'attendre et ne pas pouvoir relever la société", a-t-il notamment déclaré devant la foule.
Est-ce un premier rétropédalage de la direction sur la date limite de la signature de l'Accord de performance collective ? En tout cas, après des réunions sur le sujet mardi 2 et jeudi 4 juin, la direction et les représentants du personnel (FO, CFE-CGC et Unsa Snmsac) ont de nouveau un rendez-vous le 9 juin, jour de présentation supposé du plan de soutien à la filière aéronautique. Des mesures qui pourraient changer le contenu des négociations ? Pour le moment, celles-ci concernent la suppression du 13ème mois pour les salaires supérieurs à 2,5 fois le SMIC et la suppression des indemnités repas et transports, car l'entreprise ne payant pas de cotisation sociale dessus elles sont jugées illégales par l'Urssaf qui applique plusieurs millions d'euros de pénalités à Derichebourg Aeronautics chaque année.
"On nous propose la suppression de tous les acquis sociaux qui donnent envie de travailler chez Derichebourg, c'est incompréhensible. Pourquoi faire tout cela dans la précipitation sans attendre le plan de soutien à la filière, qui nous permettrait peut-être d'éviter de telles décisions ?", estime Romain, représentant du personnel suppléant au sein de l'Unsa Snmsac chez Derichebourg Aeronautics.
Selon les syndicats, la suppression de ces indemnités pourrait faire perdre jusqu'à environ 300 euros environ par mois à chaque salarié.
"Nous, Force ouvrière, avons demandé a minima qu'elles soient remplacées par l'obtention de tickets restaurants, ce que nous devrions obtenir. Avec cette compensation, cela devrait représenter une perte mensuelle moyenne de 170 euros environ par salarié", tient à souligner Jean-Marc Moreau, délégué FO, le syndicat majoritaire au sein du sous-traitant aéronautique.
Division des syndicats à propos d'un éventuel PSE
Au départ, cet effort collectif de la part des salariés devait permettre d'éviter un plan de sauvegarde l'emploi dès le mois de juin qui pourrait concerner 700 salariés (sur 1 500), pour le reporter à septembre avec une ampleur moindre. Ce que ne partage pas l'Unsa Snmsac.
"Beaucoup de salariés préfèrent procéder immédiatement à un PSE et conserver leurs acquis sociaux. De plus, la direction est incapable de nous dire combien d'emplois seraient épargnés par la signature de cet APC", lâche Boris, un autre représentant de l'organisation.
Une vision que ne partage pas FO et qui, en tant que syndicat majoritaire au sein de l'entreprise tient la corde dans les négociations avec la direction.
"Militer pour un PSE alors que la filière aéronautique va connaitre une crise sur plusieurs années est irresponsable. Les personnes touchées resteraient au chômage des années, ce qui serait pire que de garder un travail avec un salaire moindre", avance Jean-Marc Moreau.
Par ailleurs, le représentant du personnel ne signera pas l'APC si la direction ne s'engage pas en contrepartie au non recours d'un PSE jusqu'à la fin de l'année, au maintien au chômage partiel des salariés plutôt que procéder à des licenciements et à une incitation financière à la mutation géographique au sein de groupe, Derichebourg Aeronautics ayant des postes ouverts sur d'autres sites en France. Prochain round des négociations dans quatre jours.
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