Pour ses bus à hydrogène, Safra va à nouveau ouvrir son capital

Un peu plus de 18 mois après une première levée de fonds, Safra prépare un autre tour de table de plusieurs dizaines de millions d'euros pour l'industrialisation de ses bus à hydrogène et ses kits de rétrofit pour autocars. Une étape importante dans le développement de l'industriel basé à Albi (Tarn) qui vient d'enregistrer la première commande pour le nouveau modèle de son bus à hydrogène, Hycity.
Le bus à hydrogène Businova de Safra a laissé sa place au nouveau modèle Hycity, qui vient d'enregistrer sa première commande.
Le bus à hydrogène Businova de Safra a laissé sa place au nouveau modèle Hycity, qui vient d'enregistrer sa première commande. (Crédits : Rémi Benoit)

"Nous espérons le closing dans les semaines voire les jours à venir", lâche Vincent Lemaire, le président de Safra, dont l'impatience est perceptible. Le dirigeant, à la tête du constructeur français de bus à hydrogène installé à Albi (Tarn), prépare "une autre grosse opération financière", avec de nouveaux investisseurs. "Nous allons rester au maximum européen", promet-il.

Pas plus tard qu'en 2021 déjà, Safra avait opéré une première levée de fonds d'un peu plus de 20 millions d'euros pour sa montée en puissance et le développement de ses bus à hydrogène. Ce tour de table avait été bouclé auprès d'Aqua Asset Management, un fonds français spécialisé sur l'accompagnement des entreprises françaises et européennes oeuvrant à la transition écologique.

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De l'aveu même de la direction de la PME tarnaise, cette levée de fonds sera plus importante que la première, sans aucun doute. "Nous avons des dizaines de millions d'euros à dépenser d'ici 2025", va même jusqu'à dire Vincent Lemaire. "Nous devons investir dans le foncier pour assurer notre montée en cadence, dans la R&D et nous avons en tête de développer une nouvelle gamme de produits", ajoute-t-il, sans vouloir en dire davantage.

Première commande pour Hycity

Historiquement, la société fondée en 1955 s'était concentrée sur la rénovation des matériels de transport de personnes comme les trains, les tramways et les bus. D'ailleurs, ses ateliers abritent actuellement des tramways de la ville de Saint-Étienne, mais aussi des bus de la métropole de Lille, ou encore des trains express régionaux de la région Occitanie. C'est seulement depuis le début des années 2010 que Safra s'est mise en tête de "décarboner les transports publics" avec "des projets fous" comme aime le résumer son président.

Cette ambition s'est traduite avec le développement et la commercialisation du Businova, la premier bus à hydrogène français. Mais au rythme du développement de la filière hydrogène et ses technologies ces dernières années, le constructeur a fait le choix il y a quelques mois de stopper sa production après une vingtaine d'unités vendues pour la commercialisation d'un nouveau véhicule, le Hycity. Ce nouveau véhicule, dont le prototype sera présenté à la fin de l'année 2022, aura deux versions. Un véhicule de 12 mètres de long et 2,55 mètres de large, avec une capacité de 100 à 120 personnes, et un autre de 16 mètres de long avec une capacité de 160 à 180 passagers.

Au-delà des nouvelles technologies, c'est surtout la stratégie industrielle qui diffère entre le Businova et le Hycity. À ses débuts dans la mobilité à hydrogène, Safra avait fait le choix d'un développement complet en interne de son véhicule, à l'exception de la pile à combustible et les batteries. Désormais, l'industriel albigeois mise sur des sous-traitants experts sur certains éléments, comme Plastic Omnium et ses réservoirs à hydrogène, Symbio pour sa batterie ou encore l'allemand ZF qui va fournir un essieu standard motorisé à l'électrique. Le Toulousain Actia fournit également des calculateurs électroniques. L'idée est de gagner en temps, compétitivité et fiabilité. S'il fallait neuf à dix mois pour produire un Businova, Safra ambitionne de produire pas moins de 200 Hycity par an dès 2025.

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Encore faut-il que le carnet de commandes se remplisse et sur ce point l'optimisme règne dans les rangs de Safra. La société vient d'officialiser sa première commande pour son bus à hydrogène, passée par le conseil régional de la région Auvergne-Rhône-Alpes à travers une centrale d'achat.

"Ce bus zéro émission circulera à compter de la rentrée 2023 sur la ligne Lyon-Montluel. Une ligne stratégique de 25 km et 46 arrêts, dont les véhicules réalisent 24 aller-retours par jour, soit un bus toutes les 15 minutes en pointe, et surtout plus de 250 000 voyages par an. La mise en circulation du Hycity permettra de réduire drastiquement les rejets de polluants en entrée de Lyon, anticipant fortement les obligations réglementaires (ZFE) pour cette ligne interurbaine", précise l'entreprise.

D'autres annonces de ce genre pourraient intervenir prochainement. "Nous avons une centaine de véhicules en jeu dans divers appels d'offres", informe Eric Baleviez, le directeur commercial et marketing de Safra. Par exemple, Dijon, Strasbourg et Clermont font partie des villes qui vont s'équiper de bus à hydrogène dans les mois et années futurs.

Le rétrofit au point ?

En parallèle, Safra espère engranger ses premiers clients sur son activité de rétrofit, réservée aux autocars. Pour la développer et la mettre au point, la société a pu compter sur le soutien du conseil régional d'Occitanie, qui a mis à disposition 15 de ses véhicules de marque Mercedes. Le premier autocar rétrofité de ce deal devrait circuler sur les routes dès le début de l'année 2023. "Nous serons la première région de France à faire circuler des autocars rétrofités", assure Carole Delga, la présidente de la région Occitanie, face à la concurrence de la région Auvergne-Rhône-Alpes sur le sujet. Pour mémoire, le concept du rétrofit consiste à procéder au remplacement de la chaîne de traction thermique par une chaine 100% électrique alimentée par une pile à combustible à hydrogène.

"Nous avons terminé la conception du véhicule. Maintenant, nous sommes dans la phase de certification et nous sommes très avancés. Il roulera en 2023", promet Vincent Lemaire, technologie pour laquelle in a investi trois millions d'euros en R&D.

Avec un plein d'hydrogène en 15 minutes et une autonomie de 500 kilomètres, contre 350 pour son Hycity, le système rétrofit de Safra, dont la commercialisation est aujourd'hui lancée, pourrait vite trouver preneur. Ce qui serait une bonne nouvelle pour les 200 salariés de l'industriel occitan. Si son plan de croissance est respecté, ce dernier prévoit d'employer 400 personnes supplémentaires en 2025.

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