Emploi à Toulouse : près de 11.000 intentions d'embauche recensées pour 2022, mais rareté des candidats (1/5)

Pour la seconde édition du StartEmploi, La Tribune a recensé près de 11. 000 intentions d’embauche sur l’année 2022, à Toulouse. Bien que la croissance économique soit de nouveau au rendez-vous, celle-ci est menacée par la pénurie de profils qui agite le marché de l’emploi local. Analyse.
Après sondage auprès des entreprises locales, La Tribune a recensé près de 11000 intentions d'embauches à Toulouse en 2022.
Après sondage auprès des entreprises locales, La Tribune a recensé près de 11000 intentions d'embauches à Toulouse en 2022. (Crédits : Rémi Benoit)

Certains lui promettaient un destin à la Détroit, en référence à cette ville américaine qui a été victime d'une fuite en avant des grandes entreprises de l'industrie automobile et de ses talents en réaction à une crise économique sans précédent. Mais Toulouse, bastion de l'industrie aéronautique, mais aussi du spatial, remonte la pente. Après le trou d'air de 2020 connu par la filière industrielle phare du territoire, celle-ci a connu une croissance de son chiffre d'affaires de + 5 % en 2021 et les professionnels du secteur tablent sur un bond de + 13 % en 2022. "C'est tout à fait en phase avec la remontée progressive des cadences annoncée par Airbus et les grands acteurs de la filière aéronautique", conforte Pascal Robert, le responsable du service des études au sein de l'antenne Occitanie de la Banque de France, à l'origine de ces chiffres suite à un sondage réalisé auprès de 1 750 dirigeants d'Occitanie quelques semaines plus tôt.

Malgré ces turbulences, qui ont inquiété bon nombre d'acteurs économiques dans une ville où deux emplois sur trois sont liés directement ou indirectement à cette industrie, l'image de Toulouse est loin d'être écornée. D'après une récente enquête réalisée par HelloWork en partenariat avec le cabinet Hays, la Ville rose est la quatrième métropole la plus attractive de France, à en croire les retours des près de 2.500 actifs interrogés par les auteurs de l'analyse. Toulouse est même classée seconde du classement sur le critère du dynamisme économique, derrière Nantes. Un ressenti positif qui se démontre par ses opportunités professionnelles.

L'AÉRONAUTIQUE ENFIN PRÉSENTE, LE NUMÉRIQUE TOUJOURS PLUS FORT

Après avoir recensé environ 5.000 recrutements sur 2021, à Toulouse, pour la première édition du StartEmploi, La Tribune en a récolté presque 10 500 pour l'édition 2022 en s'appuyant sur le retour de 96 entreprises qui annoncent ouvrir des postes sur cette nouvelle année. Une enquête dans laquelle ne sont pourtant pas répertoriés les 60 recrutements à venir chez le studio toulousain TAT Productions, fraîchement retenu par la plateforme Netflix pour réaliser une série animée sur Astérix et les centaines à venir chez Airbus sur un total de 1 500 en France cette année. Preuve d'un élan retrouvé au sein de l'industrie aéronautique, au-delà du grand donneur d'ordre, les sous-traitants font leur apparition dans le classement 2022 des 50 meilleurs recruteurs dans ce StartEmploi édité par La Tribune alors qu'ils en étaient les grands absents de 2021. Derichebourg Aeronautics Services, Liebherr Aerospace, Sogeclair, Ascendance Flight Technologies, Airplane, Sabena Technics, ou encore Equip'Aero figurent ainsi parmi les recruteurs toulousains des mois à venir. Dès lors, l'industrie aéronautique, mais aussi le spatial, pèsent pour 10 % des intentions d'embauche annoncées dans la Ville rose.

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Tirées notamment par l'activité de l'industrie aéronautique, les entreprises de service du numérique (ESN) ne sont autres que les premiers recruteurs à Toulouse, comme lors de la première édition de ce StartEmploi. Dans l'édition 2022, ils pèsent pour 21 % (2 100) des intentions d'embauche et ses principaux représentants ont un lien direct avec l'aéronautique, comme SII Sud-Ouest qui promet 370 recrutements. La société d'ingénierie travaille surtout localement pour le secteur aéronautique (plus de 40 % de son activité) et les grands donneurs d'ordre (Airbus, Thales, Liebherr) sur le développement de logiciels et de systèmes embarqués notamment pour la gestion des commandes de vol de l'avion, le pilotage automatique, etc. L'entreprise conçoit également des calculateurs automobiles pour Continental ou Volkswagen. CGI, sur le podium des recruteurs en 2021, recrute encore 300 personnes à Toulouse en 2022. Portée par l'industrie aéronautique, son principal client, la société d'ingénierie vient d'ouvrir dans la Ville rose un centre d'expertise autour du système d'informations allemand SAP, qui a déjà séduit Airbus ou Latécoère. CGI a également lancé tout dernièrement un centre d'excellence dédié à l'industrie du futur, qui pourrait également gonfler son portefeuille clients et qui justifie ces recrutements.

LE E-COMMERCE RECRUTE

Hors lien avec l'industrie, il faut souligner les 51 recrutements annoncés par Lyra Network. Avec sa solution Payzen, le groupe toulousain Lyra a réussi à se faire une place sur le marché du e-commerce en France entre les acteurs historiques et les startups venues de l'étranger. Leader dans l'Hexagone sur les marques blanches des banques avec 50 000 marchands équipés, l'ETI qui emploie déjà 250 personnes à Toulouse réalise la moitié de son chiffre d'affaires dans ses 12 filiales à l'étranger grâce notamment à une offre de paiement via Whatsapp.

Par ailleurs, les services aux entreprises, hors numérique, se présentent comme le second secteur qui recrute sur la métropole à travers des entreprises comme City One ou encore Homefriend. Le domaine de la santé et du médico-social est également au rendez-vous en matière de recrutement, puisqu'il concerne 1 800 postes en 2022, dont 1 600 rien qu'au sein du CHU de Toulouse, meilleur recruteur de la ville l'année passée.

DES PÉNURIES DANGEREUSES ?

Bien que les 10 500 recrutements à venir concernent des secteurs très divers, les motifs de ces intentions d'embauche à Toulouse sont majoritairement identiques selon l'enquête de La Tribune menée auprès d'un millier d'entreprises sur la métropole. 44 % des entreprises qui annoncent recruter dans le StartEmploi le font afin de « répondre ou anticiper une croissance de l'activité ». Ce qui est à mettre en corrélation avec la croissance économique attendue sur le territoire par la Banque de France, en 2022, aussi bien dans l'industrie, les services et le BTP. Le second motif de recrutement, pour 29 % des répondants, est lié « au remplacement ou à l'anticipation de départs ». Une statistique non surprenante alors que la crise sanitaire a modifié les désirs professionnels de nombreux salariés, désormais attirés par les métiers verts ou verdissants (voir plus loin dans le fascicule). Enfin, un quart des entreprises qui créent des postes le font pour se doter de nouvelles compétences, non présentes en interne. Ce dernier point est à mettre en lien direct avec le fait que 43 % des créations de postes annoncées sur la région toulousaine concernent de la R&D, tandis que 38 % seront liées à des fonctions autour du digital et de l'informatique. Pour comprendre cet appétit pour les profils autour de la recherche et du développement, il faut noter que près d'un quart des entreprises qui recrutent en 2022 engagent une diversification d'activité sous diverses formes, tandis que 61 % d'entre elles ont obtenu de nouveaux contrats ou lancé le développement de nouveaux projets dans leur(s) activité(s) phare(s).

Néanmoins, cette relance économique s'inscrit en pointillé dans les mois à venir. Et pour cause, les profils pour trouver preneur aux offres d'emplois se font rares. "Le recrutement sera le point de tension majeur des entreprises en 2022", estime Stéphane Latouche, le directeur régional de la Banque de France en Occitanie. Alors que 70 % des entreprises qui recrutaient en 2021 déclaraient avoir des difficultés dans cette opération dans la première édition du StartEmploi, l'édition 2022 est beaucoup plus marquée sur le sujet avec 85 % des répondants qui considèrent rencontrer des difficultés dans leur recrutement. « Nous faisons face à un marché en tension, sur des métiers pénuriques avec une concurrence forte », regrette une entreprise qui a répondu à l'enquête de La Tribune. « Il y a une pénurie de profils ou ils sont trop chers », témoigne un autre participant. En résumé, trois difficultés sont communes à ces recruteurs toulousains : la pénurie de profils, l'environnement concurrentiel et le manque d'attractivité de certains de ces métiers en tension.

DES PROFILS JUNIORS RECHERCHÉS

« Pour la 1re fois depuis le début de la crise sanitaire, le volume trimestriel des offres d'emploi cadre a dépassé celui de 2019, année record pour les recrutements. Sur le seul mois de janvier 2022, les offres dépassent de 23 % le niveau de janvier 2020. Ces bonnes orientations devraient amplifier les difficultés de recrutement déjà à l'œuvre, sur un marché de l'emploi cadre en Occitanie qui n'a jamais cessé́ d'être en tensio», constate Carole Fistahl, déléguée régionale Apec Occitanie, en s'appuyant sur une note de marché récente de sa structure portant sur l'emploi des cadres.

Pourtant, 50 % ont activé le levier réseaux sociaux pour attirer des candidats, quand 35 % ont organisé des job dating et 15 % ont même procédé à des transferts de salariés comme EDF qui s'est renforcée dans la région Occitanie avec des compétences issues de la filière aéronautique dans sa période creuse. Peut-être que les offres d'emplois ne sont pas suffisamment attrayantes pour les candidats ou les actifs désireux de se confronter à un nouvel univers professionnel ?

D'après l'enquête de La Tribune, seulement 43 % des intentions d'embauche annoncées à Toulouse sont proposées sous forme de CDI, tandis que 29 % le sont en CDD et 28 % via de l'intérim. Enfin, les profils recherchés sont certainement trop restrictifs. Plus d'un recrutement annoncé sur deux (55 %) toucherait des profils plutôt jeunes via 11 % pour des alternants, 13 % pour des stages et 33 % pour des profils débutants. Sur seulement 32 % des postes à pourvoir les profils attendus sont dits « confirmés » et 13 % dits « seniors ». Après avoir eu des frissons pour leur employabilité ces dernières années, les jeunes semblent les gagnants à Toulouse sur le marché du travail post-Covid19.

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