Alors que la piste Concorde de l'aéroport Toulouse-Blagnac tourne à plein régime au rythme des allers / retours des géants du ciel, sa jumelle historique 14L-32R, proche de l'aérogare, a fermé ses portes le temps d'une remise à neuf estivale. Sur le tarmac, les engins de chantiers ont remplacé les avions, et les agents d'entretiens ont chassé les aiguilleurs du ciel, dans un balais technique calibré au cordeau.

Depuis le 3 juin, tous les jours de 6h à 20h, 220 personnes se relaient pour moderniser la piste originelle de l'ATB, un chantier énorme. Place aux chiffres pour illustrer le gigantisme du chantier : vingt semi-remorques mobilisées, 45 km de câbles utilisés, 100 000 tonnes de cailloux stockées, et même deux usines éphémères montées le temps des opérations... pour une zone de travaux s'étalant sur 5,5 hectares. "Ici s'illustre le savoir-faire blagnacais et l'ingénierie haut de gamme", s'enthousiasme Bernard Keller, maire de la commune, lors de la visite du chantier en début de semaine. À la manœuvre durant ces deux mois, les entreprises Colas (réfection de la voirie), Razel-Bec (génie civil et assainissement) et Bouygues Energie Service (balisage).

Des travaux "indispensables"
Plus que nécessaire, la mise en chantier de la piste 14L-32R devenait un impératif absolu pour Jean-Michel Vernhes, président du directoire de la société Aéroport Toulouse-Blagnac. "Ces travaux étaient indispensables. Il s'agit non seulement d'opérations d'entretien, mais aussi d'une mise en conformité avec les nouveaux gros porteurs en circulation pour les accueillir dans les meilleures conditions." En jeu notamment, la capacité des pistes à supporter l'impact toujours plus puissant des avions à l'atterrissage, à l'image de l'A350 "mettant à rude épreuve l'état de la route" d'après un officiel de l'aéroport. Si le rétroplanning du chantier est respecté, le dernier coup de pioche aura lieu le 15 août. Coût de l'opération : 14 M€ (12 millions d'euros de travaux, 2 millions en recherches et analyses en amont) totalement financés par l'aéroport Toulouse-Blagnac.

Défi technique
Deux mois, donc, pour refaire une piste datant de l'avant-guerre et dont les derniers travaux d'envergure remontent à quelque quarante ans. Le défi technologique s'annonce corsé pour les équipes toulousaines. "Ces travaux sont les plus complexes que l'on ait eu à réaliser, avertit un responsable de Colas, l'une des trois entreprises mobilisées sur le tarmac blagnacais. Ils représentent un défi technique, préparatoire, et temporel. C'est l'occasion de montrer notre savoir-faire, un savoir qui peut être exportable."

Longue de 3 km pour une largeur de 45 mètres, la piste 1 est constituée de sept tronçons différents, fruits des séquences passées de rénovation, qu'il s'agit aujourd'hui d'homogénéiser. "Nous nous attelons à une rectification géométrique de la piste, insiste Marc Hurault, responsable infrastructure d'ATB et chef de projet Piste 14L/32R. Le décaissement sera compris entre 7 et 20 cm suivant les zones pour une meilleure adhérence des appareils." Résultat, le revêtement nouvellement apposé représente 13 à 16 cm supplémentaires "de matériaux entièrement locaux", tient à préciser un cadre de l'entreprise, clin d'œil à la polémique sur les pavés chinois de l'avenue Alsace-Lorraine à Toulouse.

Autre point chaud du chantier, la rénovation du système de balisage et du réseau d'assainissement, double étendard d'une politique éco-responsable. Ainsi, à l'installation de feux de balisage économes en énergie et résilients (meilleure accessibilité des câbles en cas de réparations nécessaires), s'ajoute la mise en place d'un nouveau mécanisme de collecte des eaux fluviales, l'objectif étant de diminuer les risques de crues et d'assurer une meilleure infiltration des eaux.

Si la fin des travaux est prévue au vendredi 15 août, les engins de chantier devraient déserter la piste 1 dès les derniers jours de juillet au profit du rétablissement du trafic aérien, le temps que les équipes puissent rénover les taxiway alentours. La piste Concorde sera, quant à elle, fermée une dizaine de jours en août.

Jérémy Lacoste
Photo © Rémi Benoit