Colère des agriculteurs : à Toulouse, la grogne reprend, le préfet convoque la grande distribution

Autour de Toulouse, les agriculteurs en colère ont repris le chemin des mobilisations sur les routes du territoire. Simple épiphénomène ou véritables prémices d'une nouvelle vague de mobilisation ? Le préfet d'Occitanie tente de contrôler ce nouveau pic de colère et vient de convoquer les acteurs de la grande distribution à propos de l'application de la loi Egalim. Les détails.
Des points de mobilisation des agriculteurs émargent à nouveau autour de Toulouse, pour partager leur colère.
Des points de mobilisation des agriculteurs émargent à nouveau autour de Toulouse, pour partager leur colère. (Crédits : Rémi Benoit)

Les braises sont encore chaudes et le feu pourrait repartir à tout moment. Pas plus tard que jeudi 15 février, la ville de Montauban (Tarn-et-Garonne) a cru voir revenir le temps d'une journée les barrages d'agriculteurs en colère qui ont ralenti la France pendant près de deux semaines tout récemment. Ils étaient quelques dizaines, sous formes de petits convois, à investir le centre-ville de la commune afin de maintenir la pression sur le gouvernement.

Seulement, la nuit est passée et un autre rassemblement d'agriculteurs en colère a émergé, encore plus proche de Toulouse cette fois-ci. Un convoi de tracteurs a débarqué sur l'autoroute A61, au point de pousser Vinci, son concessionnaire, à fermer la sortie au niveau de Villefranche-de-Lauragais, au sud-est de Toulouse.

« Cela reprend car il n'y a que de la communication et que nous attendons toujours les faits. D'accord, il y a des négociations au niveau européen qui vont prendre du temps, nous en sommes conscients, mais les problèmes franco-français, eux, sont toujours bien présents ! Le GNR (gazole non routier, ndlr) est toujours taxé à 58% par exemple », peste Jean-François Lamassé auprès de La Tribune, le président de la FDSEA Haute-Garonne.

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Quelques heures auparavant, le service des finances publiques de Toulouse a pourtant publié un communiqué pour rappeler l'ouverture anticipée depuis le début du mois de février du guichet pour bénéficier du remboursement de cette fiscalité. « Elle permet aux personnes morales ou physiques qui réalisent des travaux agricoles ou forestiers de bénéficier d'une avance de 50% sur leurs remboursements partiels des taxes sur les GNR, calculée sur la base des achats réalisés en 2023 », souligne l'entité départementale. Cette ouverture anticipée avait été promise par le Premier ministre, Gabriel Attal, lors de sa venue en Haute-Garonne le 26 janvier. Mais le chef du gouvernement s'était aussi engagé à annuler la hausse prévue et même à revenir à l'« ancien système ». Ce qu'attendent les agriculteurs désormais, à huit jours de l'ouverture du prochain Salon de l'Agriculture qui s'annonce mouvementée.

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Des arrêtés modifiés, du « baratin » pour la FDSEA

En plus des finances publiques, le préfet a également convoqué la presse, jeudi 15 février, afin de dresser un état des lieux des réunions menées avec la profession agricole. L'enjeu ? Calmer ce regain de colère des agriculteurs, alors que Toulouse et l'Occitanie ont été l'épicentre du mouvement de colère initial.

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« Nous avons entamé un travail soutenu de simplification, dans le cadre d'une collaboration très constructive avec la chambre d'agriculture de Haute-Garonne et les forces syndicales. L'objectif était de faire en sorte que des textes, parfois anciens, aient encore une utilité aujourd'hui en les mettant au goût du jour. Cela a mené à un travail de très bonne facture », estime le préfet de Haute-Garonne et d'Occitanie, Pierre-André Durand.

Au total, ces réunions de travail ont permis de revisiter quatre arrêtés préfectoraux à l'échelle locale. Si le premier concerne seulement la mise en place du dispositif d'urgence en cas d'alerte pollution dans l'air, l'autre revoit les modalités de défrichement et de replantation. Par ailleurs, un de ces textes revisités encadrait l'emploi du feu pour le brûlage des déchets verts. « Nous avions une réglementation plus restrictive que les Bouches-du-Rhône, département bien plus exposé que nous au risque d'incendie », justifie le préfet. Enfin, le dernier arrêté, en cours de stabilisation, concerne l'émission des bruits pour les populations environnantes.

« Les quatre arrêtés couvrent en réalité des champs d'action très larges et mettent fin à des problématiques vécues par les agriculteurs dans leur vie courante », estime le représentant de l'État.

Pour autant, le travail n'est pas terminé. Des réunions avec les syndicats et la chambre consulaire agricole ont permis de faire remonter des dizaines de propositions de simplification des normes auprès du gouvernement, un travail effectué par toutes les préfectures départementales.

« La simplification de ces quatre arrêtés ce n'est que du baratin ! Nous, ce que nous voyons, c'est que nos revenus ne bougent pas ! Nous, nous voulons des revenus (...) C'est nous qui produisons et nous crevons la dalle », réagit le président départemental de la FNSEA.

Une réunion la semaine prochaine sur Egalim

Si la grogne des agriculteurs a démarré en Occitanie, c'est particulièrement parce que la question de leurs revenus est un sujet sensible sur ce territoire. La région est l'une de celles où ils sont le moins rémunérés. Selon l'Insee et des données de 2021, le revenu agricole mensuel moyen des agriculteurs était de 765 euros dans l'Ariège, 945 euros dans l'Aude, 777 dans les Hautes-Pyrénées ou encore 1.112 en Haute-Garonne pour ne citer que ces exemples. À contrario, la moyenne nationale est de 1.787 euros.

Dans ce contexte, les services de la préfecture ont déjà enregistré 485 demandes d'aides de la part d'éleveurs bovins en région touchés par la Maladie Hémorragique Épizootique (MHE), présentée comme la Covid de la vache. Rien que 169 dossiers ont été déposés dans le département des Hautes-Pyrénées, département français le plus touché par cette maladie. De plus, l'Occitanie devrait bénéficier « d'un peu moins de la moitié  » de l'enveloppe de 80 millions d'euros d'aide d'urgence pour répondre à la crise viticole, selon les dires de Pierre-André Durand. Ce dernier a aussi décidé d'organiser « deux réunions techniques » dédiées à la loi Egalim et son application, les 21 février à Montpellier et 22 février à Toulouse.

« Les distributeurs sont conviés à cette réunion, tout comme les agriculteurs, la DRAAF et la DREETS. Nous allons rappeler les règles. Nous voulons veiller à la bonne application de la loi Egalim en Occitanie, qui protège les revenus des agriculteurs. Nous partagerons également avec eux les contrôles qui ont été menés et leurs conclusions », promet le préfet, qui ne souhaite pas partager pour le moment le nombre de contrôles réalisés.

« La grande distribution n'en a rien à faire d'Egalim, ces gens là ne comprennent que la pression et ils vivent aisément sur notre dos depuis 40 ans. Si rien ne change, ce qui va se passer c'est que nous allons bloquer les accès aux supermarchés les vendredis et samedis jusqu'à ce qu'ils comprennent », met en garde Jean-François Lamassé qui n'attend rien de cette réunion technique avec les services de l'État.

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Commentaires 2
à écrit le 17/02/2024 à 21:37
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Beaucoup de gros tracteurs. Pour des gens qui travaillent pour rien, ils font comment pour obtenir des prêts ?

à écrit le 16/02/2024 à 19:45
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J'aimerais entendre et lire Michel-Edouard Leclerc. Accusé: défendez-vous.... après nous avoir défendus!

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