Près de Toulouse, Maison Truffus se veut orfèvre du diamant noir

Fondée en 2019 à la suite d'un rachat, l'entreprise cache derrière elle Maison Truffes Henras, la plus ancienne maison de truffe au monde. Boostée par une nouvelle dirigeante, la société spécialiste dans la sélection et transformation de la truffe affiche un nouveau visage tout en préservant un savoir-faire bicentenaire. Nouvelle marque de produits d'épicerie, nouvel atelier de production, renouvellement du portefeuille client et explosion du chiffre d'affaires à l'international en Amérique du Nord et en Asie.
(Crédits : E.Gentils)

Depuis 1820, la Maison Truffes Henras, est spécialisée dans la préparation de truffes fraîches et la transformation de truffe en conserve à destination des professionnels. Véritable institution, la plus ancienne maison de truffe au monde qui a vu le jour dans le Périgord, en Dordogne, va voyager via le jeu des successions jusqu'à Albas, commune du Lot à moins d'une heure de Cahors. En 2019, Laurence Rolland, entrepreneuse toulousaine au solide parcours dans l'agroalimentaire, croise la route de la conserverie historique. Celle qui a notamment fondé, en 2010, la biscuiterie toulousaine Gourmandes & Cie décide de l'acquérir, au mois d'octobre de la même année, avec l'aide d'un pool d'investisseurs. Elle fonde alors, la Maison Truffus, entreprise qui se donne pour objectif de préserver le savoir-faire bicentenaire tout en insufflant un nouveau souffle à la société rentable, mais « à l'économie au ralenti ».

« L'activité était dirigée par Anne-Marie Gaillard, une des rares femmes dans l'univers de la truffe. Elle arrivait à un âge où elle voulait transmettre son entreprise à un repreneur qui faisait sens. De mon côté, je venais de vendre ma biscuiterie et étais à la recherche d'une activité dans l'agroalimentaire, patrimoniale, sur un produit noble. C'est à ce moment-là que nous nous sommes rencontrées et qu'elle m'a choisie pour reprendre la Maison Truffes Henras », se souvient Laurence Rolland, cofondatrice de Truffus.

« Faire passer l'entreprise au 21e siècle »

Très vite, la nouvelle dirigeante « fait passer l'entreprise au 21e siècle ». L'activité et l'effectif de sept personnes sont transférés à Montauban, dans un bâtiment de 800 m2 dont la moitié est dédiée à un atelier de production moderne qui a nécessité un investissement de 350.000 euros. L'outil permet de transformer le précieux champignon sous plusieurs formes, conserve, surgelée, etc. L'entreprise y produit aussi sur demande, en fonction du cahier des charges de ses clients (pelures, jus, lamelles...). Autre nouveauté : Maison Truffus développe une gamme de produits d'épicerie à base de truffe, sans arômes, (foie gras, tartinables, pâtes, sauces, huiles...), sous la marque Truffes Henras. Aujourd'hui, depuis son usine, la société gère 10 tonnes de truffe par an, principalement de noire du Périgord, et a la capacité de monter jusqu'à 30 tonnes. L'ingrédient brut, est acheté auprès des trufficulteurs en direct ou par le biais de courtiers mandatés. Durant la pleine saison, de novembre à mars, la structure traite entre 300 et 500 kilos par semaine.

Haut de gamme les différentes références sont vendues en BtoB auprès d'une clientèle de grossistes, de restaurateurs, de métiers de bouche, d'industriels, etc. Cette branche représente 65 % des activités de Truffus. Les produits dérivés sont distribués dans des épiceries fines ainsi que sur le site de la marque. En tout et pour tout, la marque dispose d'un portefeuille client de près de 600 clients.

« Nous sommes distribués en grande et moyenne surface via une marque dédiée, Atelier Truffus, uniquement pour les opérations de fin d'année chez Carrefour, Auchan et Intermarché. La marque est prémium et fait autour de 150.000 euros de chiffre d'affaires. C'est inédit. Nous avons complètement varié le portefeuille client. Après le Covid, il était indispensable d'aller chercher de nouveaux professionnels et le consommateur final en direct. Aujourd'hui, rien que via notre site, nous faisons autour de 200.000 euros de chiffre d'affaires, ce qui est loin d'être négligeable en agroalimentaire », détaille la directrice générale.

Un succès criant à l'étranger

Autre gros levier de croissance pour la boîte bicentenaire, l'export. Truffus a mis en place une stratégie de déploiement à l'international avec en ligne de mire l'Amérique du Nord. Pari gagnant, puisqu'en deux ans, l'entreprise est passée de 200.000 euros à près d'un million d'euros de chiffre d'affaires à l'international. L'export représente à ce jour 30 % de son activité.

« Anne-Marie Gaillard exportait un peu en Asie. La volonté était de conserver ces lieux et de dupliquer le modèle au Canada et aux États-Unis, deux pays à fort potentiel, amateurs de truffe. Nous avons dû obtenir toutes les autorisations nécessaires pour exporter de la conserve, en particulier aux États-Unis.

Une fois validés et enregistrés par la Food and Drug Administration (chargée de la surveillance des produits alimentaires) nous avons commencé à démarcher des clients notamment à travers le "Fancy Food Show" à New York, le plus grand salon de l'alimentation. Nous avions en ligne de mire les distributeurs auprès du secteur CHR, spécialisés dans les produits français prémium et capables de traiter du produit ultra frais. L'histoire, le savoir-faire de notre maison et la qualité de nos produits nous ont permis de faire de la notoriété. »

Depuis 2021, Truffus, accompagnée par Ad'Occ, l'agence de développement économique de la région Occitanie, a mis un pied aux États-Unis et au Canada. Elle a décroché des marchés auprès d'une poignée de distributeurs new-yorkais et sur la côte ouest, à San Francisco et Los Angeles. Au Canada, elle est implantée sur les grands axes dans des villes comme Montréal, Vancouver et Ottawa. La petite structure montalbanaise séduit aussi le marché asiatique, notamment Hong Kong, Singapour, la Thaïlande et le Japon. Sur le marché très porteur du diamant noir où le kilo valait selon la variété de truffe entre 900 et 1500 euros en 2023, Truffus réalisait un chiffre d'affaires de 4,4 millions d'euros cette même année.

« En France, le leader est Plantin, un gros faiseur avec plus de 30 millions d'euros de chiffre d'affaires. Ensuite, nous sommes trois petites maisons à réaliser entre 3 et 5 millions. Notre volonté n'est pas de faire de gros volumes. Ce que l'on veut, c'est être l'orfèvre de la truffe, reconnu sur la truffe haute couture. Beaucoup de nos confrères fragilisés par la crise sanitaire cherchent à se renforcer. Nous allons entrer dans une phase de consolidation où il y aura des regroupements et rachats d'entreprises. À terme, nous opérerons sans doute un rapprochement avec un ou plusieurs acteurs », conclut Laurence Rolland.

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