En Ariège, un gros projet d'usine de géotextile durable à 30 millions d'euros voit le jour

Afin de concurrencer un matériau pétrosourcé, Occitanie Géotex a imaginé un géotextile dit vert pour arriver sur les marchés du génie civil, du bâtiment et de l'agriculture dès 2025. Une usine doit ainsi sortir de terre dans les prochains mois dans l'Ariège et générer près de 200 emplois au total. Engagé sur la question de la renaissance d'une filière textile souveraine en Occitanie, le conseil régional va financer de manière importante ce projet industriel. Les détails.
Le géotextile vert produit dans l'Ariège aura pour matière première la fibre de chanvre.
Le géotextile vert produit dans l'Ariège aura pour matière première la fibre de chanvre. (Crédits : Ondopharm)

C'est peut-être le début d'un renouveau pour un territoire autrefois bastion de l'industrie française du textile. Dans le Pays d'Olmes, en Ariège, où le taux de chômage est bien plus élevé que la moyenne nationale, le projet industriel d'Occitanie Géotex apparaît comme une lueur d'espoir.

« Le projet repose sur la production d'un géotextile vert », fait savoir Victor Lamego, l'entrepreneur local à la tête de l'opération.

En France, il se serait consommé 145 millions de mètres carrés de géotextile en 2022. Ce matériau perméable, très utilisé notamment dans l'industrie du bâtiment, doit favoriser la stabilité des sols et est souvent installé comme une barrière physique entre un terrain naturel et les matériaux pour la réalisation d'ouvrages ou de chaussées. Le géotextile est aussi déployé dans le maraîchage. Seulement, bien que très utilisée, cette matière est aujourd'hui totalement pétrosourcée ou synthétique.

« Je suis convaincu que tout ce qui a une telle origine, dans les années futures, sera interdit et supprimé, surtout au contact des sols. Il y aura un marché », ajoute le porteur de projet.

Afin de se faire une place sur ce marché français, européen voire mondial, le projet industriel d'Occitanie Géotex repose uniquement sur un géotextile biosourcé, à partir de fibres végétales (chanvre) et animales (laines), le tout avec un gisement régional de préférence.

« Nous avons engagé un travail avec les chambres d'agriculture pour la réintroduction du chanvre en Occitanie. Il nous faudrait 4.000 hectares de matières premières pour avoir un gisement suffisant et répondre à la demande. La marche est haute car en 2022 seulement 200 hectares étaient consacrés à la culture du chanvre dans la région », souligne l'entrepreneur.

Pas loin de 200 emplois générés

Après avoir lancé une production test en 2023, sur 12 hectares, dans le souci de mettre sur pied un prototype de son géotextile vert, « concluant » selon Victor Lamego, Occitanie Géotex a lancé en anticipation une production de chanvre sur 400 hectares en Occitanie, contre 400.000 euros. Une nécessité face au calendrier prévisionnel, avec un lancement de la production prévu au second semestre 2025.

« Nous avons déjà localisé une friche industrielle de 10.000 m2 pour l'usine et une autre de 20.000 m2 pour la partie stockage qui accueillera aussi de la production photovoltaïque, avec le souci d'être proche des zones de production de la matière première. Nous avons ensuite engagé un ingénieur R&D pour imaginer les machines capables de produire ce géotextile vert et choisir nos fournisseurs. Entre les douze mois nécessaires à la conception des machines et six mois pour leurs fabrication et implantation, nous tablons sur un démarrage au second semestre 2025 », décrit le porteur de projet.

Dans la conception de son procédé industriel, Occitanie Géotex promet de « recycler 97% des eaux utilisées » en investissant rien que trois millions d'euros sur cette question. Le projet reposera aussi sur la recherche de débouchés pour les coproduits comme les tiges en bois du chanvre et les fibres non utilisées pour des raisons qualitatives. Des pistes sont ainsi engagées dans le marché de la construction avec des blocs d'isolant à partir de ces résidus de chanvre. « Ça sera une industrie totalement décarbonée », assure Victor Lamego.

Cette potentielle industrie verte devrait permettre la création de 40 emplois sur la future usine qui sortira de terre à Lavelanet (Ariège), sans compter les 150 agriculteurs à terme qui profiteront de l'activité d'Occitanie Géotex.

Un projet soutenu par le conseil régional d'Occitanie

Reste néanmoins l'épineuse question du financement, nerf de la guerre de tous les projets de réindustrialisation en France, en plus de la question du foncier. L'entrepreneur a évalué à 32 millions d'euros l'investissement total. Pas moins des deux tiers seront fléchés vers l'outil industriel (plus de 18 millions d'euros exactement).

« Le conseil régional a été moteur sur cette question du financement », concède tout de même Victor Lamego.

La collectivité compte investir deux millions d'euros au capital de la société au travers de l'Agence Régionale des Investissements Stratégiques (ARIS), sans parler de la fourniture d'un « prêt souverain » à hauteur d'un million d'euros. De plus, l'Agence Régionale Aménagement Construction (ARAC), engagée sur le dossier de la fonderie SAM notamment, soutient quant à elle le volet immobilier d'Occitanie Géotex pour 4,9 millions d'euros. Ce qui n'est pas une surprise tant la motivation de la présidente socialiste Carole Delga de relocaliser une filière textile en Occitanie est forte, à l'image des 19 millions d'euros investis auprès des acteurs de la filière depuis 2017.

Lire aussiPetits Cadors, ce champion du coussin de voyage Made In France qui monte et rêve d'Europe

En visite sur place mi-mars pour rencontrer les porteurs du projet, la présidente de la Région avait partagé son ambition de « redévelopper l'industrie textile pour renforcer la souveraineté économique de l'Occitanie et garantir l'emploi sur le territoire ariégeois », elle qui souhaite concilier économie et écologie au travers de son Pacte Vert. En plus des huit millions d'euros de dettes et du soutien de la collectivité, Occitanie Géoflex compte sur un soutien de l'Ademe à hauteur de six millions d'euros, ainsi que de subventions de Bpifrance. Enfin, sur les six millions d'euros de fonds propres recherchés par Victor Lamego, quatre ont déjà été sécurisés par son équipe.

Quant au volet commercial, le porteur de projet se veut confiant pour l'avenir : « Nous avons reçu des lettres d'intention de la part de grands groupes pour passer des commandes dès que possible, comme le groupe SNCF ou encore Eiffage », se réjouit l'entrepreneur.

Occitanie Géotex vise ainsi les 27 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2028. À titre de comparaison, la société castraise SICAM, qui commercialise des géotextiles pétrosourcés, a réalisé un chiffre d'affaires de huit millions d'euros en 2022 tout en frôlant les 20 millions de mètres carrés de géotextile commercialisés sur une année.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.