Sur l'agrivoltaïsme, la Haute-Garonne veut mettre au pas les énergéticiens

Alors que le décret pour encadrer l'agrivoltaïsme en France se fait désirer, les énergéticiens tentent déjà de sécuriser du foncier agricole en attendant le feu vert législatif. Cet engouement pousse la chambre d'agriculture de Haute-Garonne à agir et à contrôler les projets, elle qui veut un « agrivoltaïsme raisonné » sur son territoire. Les détails.
En Haute-Garonne, l'agrivoltaïsme sera encadré par la chambre d'agriculture, en plus du texte législatif attendu au niveau national.
En Haute-Garonne, l'agrivoltaïsme sera encadré par la chambre d'agriculture, en plus du texte législatif attendu au niveau national. (Crédits : DR)

Si la Charente-Maritime et les Pyrénées-Orientales ont, par exemple, été des terres d'accueil très favorables aux énergéticiens dans le développement de l'éolien, la Haute-Garonne pourrait-elle connaître le même attrait pour l'agrivoltaïsme ? Cette technologie, qui fait notamment l'objet d'expérimentations en Gironde, consiste à installer des panneaux photovoltaïques sur des surfaces agricoles, tout en permettant la poursuite de cette activité agricole. Selon la chambre d'agriculture de la Haute-Garonne, « plusieurs dizaines de projets sont en gestation sur le territoire ».

« Tous les jours, sans exception, j'ai des agriculteurs et des développeurs (énergéticiens, ndlr) qui me contactent pour faire passer des projets d'agrivoltaïsme. Mais nous ne ferons pas passer tous les projets, nous sommes très clairs à ce sujet. Nous voulons une vision de territoire sur ce point et un développement cohérent », met en garde le président de l'institution, Sébastien Albouy.

Le département qui compte 328.000 hectares de surfaces agricoles utiles (source Agreste de 2020) compte déjà deux agriculteurs qui ont monté seuls de tels projets, chacun sur un hectare, en se finançant auprès de banques. Quant aux installateurs officiels tels que les énergéticiens, ils sont toujours dans l'attente d'un décret pour encadrer les futures pratiques de l'agrivoltaïsme en France. « Beaucoup de projets sont dans les cartons mais ne peuvent pas encore sortir », confirmait en septembre dernier auprès de La Tribune Olivier Bousquet, le directeur exécutif du développement de Reden Solar.

« Certains développeurs ont déjà sécurisé du foncier auprès d'agriculteurs locaux et ces derniers touchent déjà des rentes. Ils ont voulu sécuriser leur exploitation, je peux comprendre ces agriculteurs. Mais ces professionnels font croire que l'agrivoltaïsme va sauver l'agriculture française, ce ne sera pas le cas. On fait miroiter des retombées financières dingues aux agriculteurs. Par ailleurs, les gains de productivité agricole sous les panneaux, cela appartient aux croyants », met en garde l'élu.

Face à l'appétit des énergéticiens pour les surfaces agricoles de la Haute-Garonne, territoire assez ensoleillé toute l'année, la chambre d'agriculture du département vient de prendre une décision assez radicale.

Pas le premier département à prendre une telle initiative

Après le département de la Gironde en début d'année 2024, l'institution toulousaine a décidé d'instaurer une charte qui encadre les pratiques des développeurs et énergéticiens autour de cette technologie. Discutée et imaginée avec les syndicats agricoles, cette charte, pour un « agrivoltaïsme raisonné » en Haute-Garonne, a été présentée à l'occasion du dernier Salon International de l'Agriculture.

Lire aussiAgrivoltaïsme : une charte pour protéger les agriculteurs girondins en attendant le décret

Tout d'abord, l'installation d'une production photovoltaïque sur du foncier agricole devra se faire « en dernier recours », « après avoir équipé ou étudié la possibilité d'équiper les toitures, les sols artificialisés et les terres dégradées », étude à l'appui fournie par l'énergéticien. En plus de prioriser la pratique agricole, la chambre d'agriculture prévoit de limiter la surface de l'installation agrivoltaïque à maximum 10% de la surface agricole utile (SAU) de l'exploitation, dans la limite de 10 hectares équipés. À titre de comparaison, le décret national sur l'agrivoltaïsme, attendue pour le début de l'année 2024 mais une nouvelle fois retardée, prévoit la couverture maximale de 40% de la SAU pour chaque projet, ainsi qu'une réversibilité de l'installation.

« Nous avons une quarantaine de développeurs d'agrivoltaïsme sur le département. Tous ces installateurs professionnels n'ont pas la même philosophie. L'idée est donc de trouver des développeurs qui partagent nos valeurs et notre vision, avant de monter des sociétés de projet associant les agriculteurs qui souhaitent investir dans cette technologie », exquise le président de la chambre d'agriculture de Haute-Garonne.

Garantir des revenus supplémentaires à un maximum d'exploitations

Les instances du territoire qui jouit de 5 570 exploitations (source Agreste de 2020) veulent ainsi offrir la possibilité aux agriculteurs de s'associer dans des investissements majeurs qui concernent l'agrivoltaïsme, aux côtés de développeurs professionnels, afin de diffuser un maximum la richesse générée sur le département par cette nouvelle pratique. Parmi les 15 critères présentés dans la charte, l'un demande ainsi de « garantir qu'a minima la moitié de la valeur générée par la société de projet agrivoltaïque revienne aux investisseurs du territoire et aux acteurs du territoire ».

« Si nous laissons faire, cela va profiter à 50 voire 100 agriculteurs, alors qu'il y en a 5.000 dans notre département. Ce qui m'importe, au-delà d'un développement équilibré de l'agrivoltaïsme sur la Haute-Garonne, c'est la question des revenus des agriculteurs. En leur proposant d'investir eux-mêmes, à plusieurs, ce sont peut-être 1.000 agriculteurs qui toucheront un petit SMIC », projette Sébastien Albouy, interrogé par La Tribune.

La Programmation pluriannuelle de l'énergie 3 (2024-2033) prévoit notamment un maximum de 40.000 hectares, au niveau national, concernant l'agrivoltaïsme. La chambre d'agriculture de Haute-Garonne s'attend à plusieurs centaines d'hectares la concernant pour ses champs, ce qui pourrait offrir de nombreuses opportunités d'investissements aux agriculteurs toulousains.

Lire aussiPourquoi l'Occitanie est l'épicentre de la colère des agriculteurs

La quête des nouveaux revenus est un enjeu sensible dans la région, épicentre de la colère agricole qui a enflammé le pays en début d'année, mettant notamment en cause les faibles revenus agricoles des départements de l'Occitanie. Selon, l'Insee, en 2021, le revenu mensuel moyen d'un non-salarié agricole en Haute-Garonne était estimé à 1.112 euros voire 765 euros pour l'Ariège, contre une moyenne nationale à 1.787.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 1
à écrit le 12/03/2024 à 18:53
Signaler
ont, par exemple . étaient ,,, Pierrick corrigez moi vite fait cette faute d'accord "été " et non étaient

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.